Centrafrique : nouvelle vague de licenciement inquiétante chez les éco-gardes de WCS dans la Bamingui-Bangoran

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Centrafrique : nouvelle vague de licenciement inquiétante chez les éco-gardes de WCS dans la Bamingui-Bangoran

 

Centrafrique : nouvelle vague de licenciement inquiétante chez les éco-gardes de WCS dans la Bamingui-Bangoran
Une vue de l’entrée de la base du WCS en charge de la protection du Parc Saint-Floris Manovo Gonda à Bamingui. Photo: WCS

 

Par la rédaction de Corbeau News Centrafrique, CNC.

 L’ONG WCS procède une nouvelle fois à une vague de licenciements inquiétante touchant de nombreux éco-gardes expérimentés. Des décisions spectaculaires , liées à des accusations d’exploitation illégale, provoque l’indignation des personnels et des observateurs, déclenchant protestations en cascade au sein du personnel.

 

 

En effet, depuis janvier dernier, une vague de licenciements massifs frappe durement les employés de l’ONG Wildlife Conservation Society (WCS) dans le nord-est de la République centrafricaine. En tout, plus d’une quarantaine d’éco-gardes, formés depuis 2008 pour protéger les parcs nationaux de Manovo Gounda Saint Floris et de Bamingui-Bangoran, se retrouvent aujourd’hui sans emploi, abandonnés par une organisation censée défendre la conservation de la faune. Ces licenciements, survenus en plusieurs vagues distinctes, pousse à s’interroger sur la gestion interne de l’ONG et les répercussions sécuritaires dans une zone déjà fragilisée par l’insécurité.

 

Des éco-gardes expérimentés jetés à la rue

 

Ces éco-gardes licenciés ne sont pas de simples employés. Certains ont été recrutés dès mars 2008 sous des projets comme ECOFAC et ECOFAUNE, puis intégrés par WCS en 2019, ils ont bénéficié de formations poussées, souvent dispensées par des assistants techniques étrangers, incluant maniement d’armes, combat corps à corps et stratégies anti-braconnage. Parmi eux, des figures comme NGAIKOISSET Marcellin, délégué principal du personnel, ZAGA Edmont, chef de patrouille à Ndélé, et NDOUROU Boris Harding, chef des opérations de lutte anti-braconnage à Bamingui. Leur expertise, forgée sur plus de 17 ans, faisait d’eux des remparts contre les menaces pesant sur ces parcs classés au patrimoine mondial de l’UNESCO.

 

Pourtant, sans explication claire ni cause apparente, ces paramilitaires aguerris ont été licenciés en masse. Les lettres officielles, adressée aux employés suspectés le 27 janvier 2025 par le directeur pays de WCS, Dr Felin Twagirashyaka, évoquent des « fautes lourdes »,  notamment une prétendue implication dans l’extraction illégale de diamants dans le parc. Mais ces accusations, jugées floues et non étayées par des preuves tangibles, sont contestées avec véhémence par les concernés.

 

« Je rejette ces allégations, elles sont inventées de toutes pièces », affirme par exemple monsieur NDOUROU dans une réponse écrite datée du 11 janvier 2025, demandant une enquête transparente et une confrontation avec ses accusateurs.

Tensions croissantes à Bamingui-Bangoran : Le licenciement des surveillants-pisteurs par WCS fait redouter l'apparition d'un nouveau groupe armé dans le nord
Dans le Parc Saint-Floris Manovo Gonda dans la Bamingui

 

Une gestion opaque et des soupçons de corruption

 

Derrière ces licenciements, un scandale plus sombre semble se dessiner. Des sources proches des éco-gardes révèlent que le directeur pays, un ressortissant rwandais récemment remplacé, aurait instrumenté ces renvois pour masquer des activités illicites impliquant l’exploitation de diamants dans le parc. Selon des témoignages recueillis par la rédaction du CNC, les éco-gardes auraient intercepté des artisans miniers, dont Benjamin Mawada et Junior Yamaza, opérant avec des armes, des câbles et des motos au bord de la rivière Manovo. Mais, sur instruction explicite du directeur – relayée par WhatsApp au chef des opérations anti-braconnage –, ces braconniers auraient été libérés, et les patrouilles redirigées ailleurs.

 

Cette décision, perçue par les employés de WCS comme une tentative de dissimuler un trafic lucratif, aurait précipité les licenciements des éco-gardes les plus expérimentés, ceux susceptibles de dénoncer ces dérives.

 

« Le directeur n’avait aucune connaissance de la gestion de ces paramilitaires ni de la faune. C’était un opportuniste, plus à l’aise dans les bars que sur le terrain », confie une source anonyme au sein de WCS. Les indemnités dérisoires et incompréhensibles versées – comme les 427 600 FCFA octroyés à NDOUROU pour 17 ans de service – renforcent le sentiment d’injustice et d’abandon.

 

Une menace sécuritaire imminente

 

L’éviction de ces experts aguerris n’est pas sans conséquences. Dans une région comme le nord-est de la RCA, où groupes armés, braconniers et coupeurs de route prospèrent, ces éco-gardes licenciés, désormais sans ressources, risquent de basculer dans l’illégalité. « Ce sont des hommes entraînés au combat, qui connaissent le terrain mieux que quiconque. Que vont-ils faire demain ? Se tourner vers le banditisme, rejoindre les rebelles ou attaquer la base même de WCS ? », s’interroge un observateur centrafricain. Cette hypothèse n’est pas farfelue : certains ex-agents auraient déjà exprimé leur frustration sur les réseaux sociaux, accompagnant leurs messages de photos symboliques d’incendies, comme pour annoncer un chaos à venir.

 

La situation est d’autant plus inquiétante que les parcs, déjà fragilisés par des décennies de braconnage et d’insécurité, pourraient devenir des zones de non-droit. Sans ces sentinelles, les braconniers et les exploitants illégaux de ressources – diamants, or, faune – risquent de reprendre le contrôle, au détriment d’un écosystème que WCS prétend protéger.

 

La justice et  l’intervention de l’État

 

Devant cette crise, les voix s’élèvent pour exiger une enquête indépendante. Les licenciements, jugés arbitraires et mal motivés, devraient faire l’objet d’un audit approfondi par les autorités centrafricaines, notamment l’Inspection du travail et le ministère de l’Environnement.

 

« L’État doit enquêter et, si possible, réintégrer ces éco-gardes. Leur départ est une bombe à retardement pour la région », plaide un ancien collaborateur de WCS. Les contrats précaires à répétition, en violation du Code du travail centrafricain qui impose un CDI après deux ans, ajoutent une couche de légitimité à ces revendications.

 

Le cas de NDOUROU illustre l’ampleur du gâchis : promu à plusieurs reprises, de chef de patrouille à chef des opérations, il a vu sa carrière durement stoppée sans preuves solides.

 

WCS : une mission trahie ?

 

Créée pour préserver la biodiversité, WCS se trouve aujourd’hui sous le feu des critiques. L’ONG, financée par des bailleurs comme l’Union européenne et la Norvège, semble avoir perdu de vue sa mission dans cette région importante. Alors que le parc de Manovo Gounda Saint Floris lutte pour sortir de la liste UNESCO des sites en péril, ces licenciements jettent une ombre sur les efforts de conservation. Le départ précipité du directeur rwandais, juste avant une nouvelle vague de renvois, renforce les soupçons d’une fuite en avant pour étouffer un scandale.

 

Pour les employés de WCS, il est plus qu’urgent que la lumière soit faite sur ces événements. Sans une intervention rapide de l’État et des partenaires internationaux, le nord-est de la RCA risque de payer un prix exorbitant : l’effondrement d’un système de protection patiemment construit et l’émergence d’une nouvelle menace sécuritaire. Les éco-gardes licenciés, hier gardiens de la nature, pourraient bien devenir, par la force des circonstances, les artisans d’un chaos annoncé.

 

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