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Poker menteur entre Bangui et les groupes armés

 

Bangui, 20 nov. 21 (Corbeaunews – Centrafrique ) – Sous l’impulsion de Luanda, plusieurs chefs de milices armées ayant participé l’année dernière à la Coalition des patriotes pour le changement ont récemment signé un premier accord avec le gouvernement centrafricain. Mais deux groupes rebelles restent réfractaires au projet et sont suspectés par Bangui de se réarmer rapidement depuis des pays de la sous-région.

Le chef rebelle Mahamat Alkatim du MPC
Mahamat Alkatim, chef d’État major du MPC.

 

En parallèle du dialogue républicain, toujours à l’arrêt (AI du 10/11/21), le président centrafricain Faustin Archange Touadéra s’active pour renouer avec les groupes armés. Sous l’activisme du président angolais João Lourenço et selon la feuille de route composée par Luanda, avec le soutien de Kigali, quatre de ces groupes ont accepté de revenir dans le cadre de l’accord de Khartoum signé en 2019 avec quatorze milices, officiellement appelé Accord politique pour la paix et la réconciliation en République centrafricaine (APPR-RCA).

 

Six des principaux groupes avaient quitté l’accord en décembre 2020 pour rejoindre la Coalition des patriotes pour le changement (CPC), de François Bozizé. Il s’agissait du Front populaire pour la Renaissance de la Centrafrique (FPRC), l’Union pour la paix en Centrafrique (UPC), le Mouvement pour la paix en Centrafrique (MPC), Retour, réclamation et réhabilitation (3R), ainsi que deux mouvances anti-Balaka proches de Bozizé. Mais très vite, la CPC est devenue une coquille vide, plombée dès l’origine par un manque de coordination entre ses composantes, parfois d’anciens ennemis.

 

Le Général Bobo (3R), Mahamat al-Khatim (MPC) ainsi que François Bozizé ont signé cet automne un accord d’engagement avec l’Etat centrafricain. Celui-ci acte notamment le cantonnement de leurs combattants et l’engagement du pays dans un processus de désarmement, démobilisation et réintégration et rapatriement (DDR). La question de l’exil des chefs de guerre hors de Centrafrique a également été discutée, sans que les modalités soient détaillées dans la feuille de route.

 

Les combats continuent

 

Dans ce cadre, Faustin Archange Touadéra avait proclamé le 15 octobre un cessez-le-feu unilatéral. Mais cette progression reste fragile. Celui-ci a peu d’effet dans l’arrière-pays, qui connaît des flambées de violences dans l’Ouest et le Centre. Or ces combats risquent d’hypothéquer à tout moment les faibles avancées obtenues par Luanda.

 

Surtout, les gouvernements centrafricain et angolais prennent le pari de faire vivre l’Accord de Karthoum, qui a pourtant toujours eu le plus grand mal à être appliqué. Les groupes armés l’ayant dénoncé se sont justifiés par le manque de coordination avec les autorités et par les faibles avancées du processus de désarmement, potentielle manne financière pour leurs dirigeants.

 

Deux principaux groupes réfractaires

 

Autre motif d’inquiétude pour Bangui : le refus d’Ali Darass de l’UPC et de Nourredine Adam du FPRC, les deux plus puissants groupes armés, de signer le document présenté par Luanda. Les deux généraux autoproclamés sont désireux d’intégrer le dialogue républicain, lancé en parallèle avec l’opposition démocratique. Ali Darass, toujours présent sur le sol centrafricain, refuse toute idée d’exil.

 

Ces deux groupes armés illustrent à eux seuls aussi l’importance des dynamiques sous régionales qui échappent à Bangui. Ainsi, Nourredine Adam vit actuellement à Khartoum, où il regroupe ses forces armées entre le Soudan et la Vakaga, au nord de la Centrafrique. L’année passée, le chef de guerre y avait perdu le contrôle de nombreuses localités au profit de groupes armés proches du gouvernement, et notamment du ministre de la justice Arnaud Djoubaye Abazène, comme l’a détaillé le panel des experts de l’ONU.

 

Ali Darass, chef peul puissant dans le centre et l’est du pays, est quant à lui en contact permanent avec Baba Laddé, le nouveau patron des renseignements généraux tchadiens – également issus de la communauté peule -, dont il fut le bras droit dans les années 2000. Baba Laddé est par ailleurs le frère du Général Bobo (AI du 21/10/21). La nomination de Baba Laddé a ainsi suscité une vague d’inquiétude à Bangui qui a été amplifiée par l’officialisation, début novembre, de la présence de François Bozizé dans la capitale tchadienne.

 

Africa Intelligence 17/11/2021

 

 

 

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