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Tchad : le gouvernement retient ses coupes

Tchad :  le gouvernement retient ses coupes

 

 

 

 


Le président du Tchad, Idriss Déby à l’Elysée, 28 août. Photo Ludovic Marin. AFP
Social

 

 

Bangui, le 16 mars 2018.

Par : Celian Macé.

 

Un accord qui prévoit l’annulation de principales mesures d’austérité a été signé avec les syndicats, mettant fin à une longue grève de la fonction publique.

 

Après sept semaines d’une grève qui a paralysé l’ensemble des administrations tchadiennes, un accord a finalement été signé entre le gouvernement et les syndicats mercredi soir. Le mouvement de protestation avait été déclenché en réaction aux mesures d’austérité entrées en vigueur le 1er janvier. L’Etat tchadien s’est engagé dans une série d’économies drastiques, ses caisses se vidant au rythme de la chute des cours du pétrole, amorcée en 2014. La dureté de la récession conjuguée aux coupes salariales ont débouché sur un mouvement social d’une rare ampleur dans ce pays comptant parmi les plus pauvres du monde.

Les syndicats estiment aujourd’hui avoir obtenu satisfaction. L’accord de trois pages négocié directement avec le cabinet du président tchadien, Idriss Déby, gèle ou annule la plupart des mesures controversées. «Le décret 687 qui prévoyait une réduction de 50% des primes et indemnités ne s ’appliquera pas ni l ’abattement des salaires des fonctionnaires, explique Michel Barka, président de l’Union des syndicats du Tchad et signataire du texte. A partir de mai, les salaires doivent retrouver leur niveau de 2016.» Ce délai de quelques mois est un «compromis» qui doit permettre «un petit temps de respiration financière pour le gouvernement», précise Younous Mahadjir, vice-président de l’UST.

Sérieux tri

Les partenaires sociaux revendiquent deux autres victoires. Le paiement des salaires des grévistes pour le mois de février, ainsi que la suspension du recensement des fonctionnaires lancé en début d’année. Ce programme avait pour objectif de faire le ménage dans une administration pléthorique, aux effectifs artificiellement gonflés par des attributions de postes de complaisance, profitant à des réseaux familiaux ou clientélistes. En période de vache maigre, ces fonctionnaires fantômes pèsent sur le budget famélique de l’Etat tchadien. Le Fonds monétaire international exigeait un sérieux tri avant de débloquer ses prochaines «tranches de financement».

«C’est une réalité. Certains reçoivent leur solde sans être dans le pays, d’autres sont des illettrés qui vivent en brousse, sans parler de ceux qui sont inscrits dans deux ou trois ministères, reconnaît Younous Mahadjir. La revue est nécessaire, mais elle doit se faire avec discernement, notamment le contrôle des diplômes, un sujet sensible dans la fonction publique. Il y a déjà eu sept recensements depuis l’arrivée au pouvoir d’Idriss Déby, en 1990 ! A chaque fois, on découvre que des milliers d’agents n’ont pas de fonction réelle… Mais ils restent en place ou sont remplacés par d’autres.» L’accord prévoit désormais d’associer les syndicats à la commission chargée d’exercer ce recensement.

Géant du trading

Au lendemain de la signature de l’accord, les organisations de travailleurs bombent le torse : «La base est statisfaite», commente Michel Barka, qui précise que les fonctionnaires seront officiellement appelés à reprendre le travail «quand les versements auront été effectués». Comment expliquer ces soudaines concessions gouvernementales ? «Ils ont eu peur d’un embrasement du pays. Les réunions à la Bourse du travail étaient vraiment bouillantes. Les syndicats sont le seul vecteur puissant de mobilisation, au Tchad, bien davantage que les partis d’opposition par exemple, rappelle Younous Mahadjir. Le Président l ’a compris. Il a besoin de paix sociale pour continuer à bénéficier d’une image de stabilité vis-à-vis de la communauté internationale.»

Mais c’est surtout un autre accord signé par N’Djamena, le 21 février, qui a pu décider Idriss Déby à lâcher du lest. Celui-ci a été conclu avec la société de négoce suisse Glencore, qui exploite le pétrole tchadien depuis 2013. La Société des hydrocarbures du Tchad avait contracté un emprunt de 1,45 milliard de dollars (soit 15% du budget de l’Etat) auprès du géant du trading… quelques mois avant la dégringolade du baril. Il est rapidement devenu une montagne impossible à rembourser. Après sept mois de négociations (dans lesquelles Paris aurait lourdement pesé), Glencore et N’Djamena se sont mis d’accord sur une restructuration de la dette : le Tchad gagne un répit de deux ans dans le remboursement, un allongement de la «maturité du prêt» jusqu’à douze ans et une révision à la baisse du taux d’intérêt de 7,5 % à 2%. Une bouffée d’oxygène qui a certainement boosté la lutte des fonctionnaires tchadiens.

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Avec la libération.fr

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