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Le terrorisme en Afrique : de la faiblesse des États africains à la vulnérabilité des pays occidentaux

Corbeau news Centrafrique.

Pendant que certains Centrafricains discréditent l’image de notre Pays, d’autres, par contre, font la fierté de notre beau pays qui est la République Centrafricaine.

C’est le cas de Monsieur Aristide Briand REBOAS, Expert en matière de Droit de l’Homme auprès de Force Régionale d’Intervention de l’union africaine pour la lutte contre L’armée de la Résistance du seigneur (LRA) et ancien Directeur Général au Bureau National de la Documentation à la Présidence de la République. Après avoir été invité au sommet africain sur le terrorisme au Kenya, il est maintenant invité par le Docteur BOAZ GANOT, au 14e sommet mondial sur le terrorisme, du 8 au 14 septembre 2014 qui aura lieu à l’institut international pour la lutte contre le terrorisme, à l’échelle internationale.

Notons aussi que c’est la première fois qu’un spécialiste centrafricain atteint ce niveau surtout dans ce domaine.

Voici donc la substance de son Intervention à ce sommet.

 

Aristide Briand REBOAS
Aristide Briand REBOAS

 

Le terrorisme en Afrique : de la faiblesse des États africains à la vulnérabilité des pays occidentaux

L’Afrique comme on le constate devient de plus en plus un terrain de prédilection pour la préparation et l’accomplissement d’actes terroristes visant le continent et l’Occident. Aqmi au sahel Boko haram au Nigeria, Cameroun et Tchad, les Shebab au Kenya et la Somalie, la LRA en Ouganda, Congo Démocratique et Centrafrique, les germes d’un terrorisme en Centrafrique depuis l’arrivée de Séléka au pouvoir le 24 mars 2013 sont autant d’exemples de groupes terroristes opérant sur le sol africain. La lutte contre le terrorisme dans le monde doit prendre en compte ces nouveaux terrains du terrorisme. Les Etats-Unis, la France, Israël et l’occident doivent intégrer l’Afrique dans leurs plans d’action préventive et répressive.

Les frontières poreuses des Etats Africains, la faiblesse des moyens de travail des différentes forces de sécurité en Afrique constituent donc de sérieuses menaces terroristes pour l’occident. La pauvreté, l’ignorance et le chômage qui sévissent en Afrique rendent facilement manipulables et très vulnérables les jeunes africains avides d’argent et de gain facile.

Le terrorisme comme le recours illégitime à la violence contre des individus ou des biens afin de contraindre et intimider des Etats et des sociétés pour des revendications politiques exprimées la plupart du temps en termes sociaux, économiques ou religieux, a véritablement constitué une des préoccupations internationales à partir des attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis.

Il se distingue fondamentalement de la criminalité, organisée ou non, par le fait que son objectif premier n’est pas un gain financier. Sa forme varie sans cesse, notamment en fonction des cycles de la répression dont il fait l’objet. Par exemple, les craintes européennes d’attaques similaires après celles du 11 septembre contre le World Trade Center à New York concernaient aussi les systèmes d’information, les centrales nucléaires, les installations pétrolières, etc. Mais là n’est pas l’important. En réalité, le terrorisme vise d’abord à terroriser. Son impact effectif n’est qu’un moyen et non une fin. Celle-ci, pour paraphraser la mission de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture (The United Nations Educational, Scientific and Cultural Organization, UNESCO), est d’influencer des esprits, ceux des hommes et des femmes qui, par leur action ou au contraire leur inertie, peuvent avoir une influence quant aux objectifs politiques visés par les terroristes.

Le terrorisme est donc par nature organisé, même si un enchaînement d’événements qui ne serait dû qu’au hasard parvenait lui aussi à semer la terreur,   Sa constante, le dénominateur commun de ses différentes attaques, demeurent l’intimidation d’une cible particulière, la destruction, au moins partielle, d’un système politico-économique spécifique. Néanmoins, l’aspect le plus terrifiant du terrorisme est qu’il frappe souvent des victimes (potentiellement, chacun d’entre nous) qui ne sont pas directement liées au système politique ou à l’idéologie vers lesquels se dirigent en fait ces attaques.

 

Ce serait d’ailleurs une terrible injure faite aux souffrances des Africains que de se limiter à des chiffres sur un terrorisme “international”. Le phénomène est en effet très largement répandu en Afrique sous une forme interne aux Etats. Il y est pratiqué par des mouvements rebelles (Union nationale pour l’indépendance totale de l’Angola [Unita] en Angola, Résistance nationale mozambicaine [Renamo] au Mozambique, Lord’s Resistance Army [LRA] en Ouganda, [3] Patriotes résistants Maï Maï [Parema] en République démocratique du Congo [RDC], Libériens unis pour la réconciliation et la démocratie [LURD] et Mouvement pour la démocratie au Liberia [Model] au Liberia, etc.) mais aussi des forces gouvernementales (Liberia, Zimbabwe, notamment durant la répression dans le Matabeleland des années 1980, Angola, Soudan, etc.), les uns comme les autres recourant largement aux moyens de la terreur et de l’effroi.

En Afrique, le terrorisme prend la forme d’un recours à la terreur comme une stratégie délibérée dans la plupart des conflits intérieurs qui affectent le continent africain.

 

En Tunisie, en Libye, en Egypte et dans certains Etats subsahariens, seules des mesures de sécurité rapides et efficaces colmatèrent la situation. Malgré cela, 58 touristes étrangers furent massacrés à Louxor en novembre 1997 et les deux ambassades américaines de Nairobi et de Dar es-Salaam furent détruites simultanément le 7 août 1998 (sans parler d’une tentative avortée à Kampala et d’autres à Bangkok et Tirana). En dépit de sa prétendue marginalisation, l’Afrique ouvrait, avec le reste du monde, un nouveau chapitre d’une vieille histoire. Le caractère international du phénomène était souligné, dès le 20 août 1998, par une attaque de représailles américaine près de Khartoum contre une usine chimique incriminée. Précédemment, la tentative d’assassinat de l’été 1995, contre le président égyptien Hosni Moubarak à Addis Abeba, avait déjà fait monter la tension entre l’Egypte, le Soudan et l’Ethiopie.

 

Rétrospectivement, les attaques terroristes dans cette région du monde apparaissent comme une esquisse des événements du 11 septembre 2001. Les attentats anti-américains du Kenya et de Tanzanie avaient surpris, et pourtant des signes inquiétants apparaissaient bien dès la guerre du Golfe : le 25 janvier 1991, par exemple, le département d’Etat américain invitait les familles de ses diplomates et les personnels non indispensables à quitter la Tanzanie en raison de menaces terroristes liées à ce conflit. Parallèlement au recours local ou régional à la terreur, une vague mondiale de terrorisme prenait corps, en fait, depuis plusieurs décennies, et ce, bien avant les attaques dont le World Trade Center fut par deux fois l’objet, en 1993 puis en 2001, pour incarner les nouveaux dangers de l’après-guerre froide. Ces derniers événements ne font, en réalité, que refléter l’aggravation d’un problème mondial de sécurité, qui exige une réaction également de portée mondiale, dans laquelle devront s’inscrire l’Afrique et les différents Etats qui la composent.

 

L’aspect technologique de la mondialisation reste un facteur important de diffusion de ce terrorisme international : Internet, les téléphones portables et les moyens de transport modernes ont fourni à ce dernier un environnement favorable. Grâce à la télévision et aux autres médias, l’impact sur l’opinion d’actes terroristes spectaculaires, mais aussi leur portée mimétique sur un terrorisme local, étatique ou non, dans les zones comme la rive gauche du Jourdain, encouragent à la fois l’action et la réaction face à ses effets. Les déplacements massifs de populations dans le monde, les migrations vers les pays à économie libérale de populations immigrées s’intégrant mal, du point de vue culturel, dans les sociétés-hôtes, concourent également à faciliter l’internationalisation du terrorisme.

                                                                                                          

Le recours à la violence et à la terreur est indéniable sur l’ensemble du continent. Cependant, seule une part minime de celle-ci peut être attribuée, semble-t-il, à ce qui serait du terrorisme proprement dit, tel qu’il a été défini plus haut. Si l’on constate, en ce début de XXIe siècle, une tension croissante entre pays développés et monde musulman (auquel se rattache une part substantielle de l’Afrique), c’est bien parallèlement un univers de violence qui est devenu le lot quotidien de millions d’Africains et l’aveuglement volontaire du monde développé ne saurait l’ignorer éternellement.

Reconnaître ce facteur, tout comme la peur qu’inspire souvent l’islam aux Occidentaux, ne doit pas avoir pour conséquence de concentrer (de manière exclusive) les stratégies de contre-terrorisme sur le traitement de l’environnement social, économique et politique alimentant haine, aliénation et radicalisme.

 

L’apparition effective du terrorisme exige également des conditions structurelles propres, qui se concrétisent dans la politisation d’un sentiment de frustration ou autre. Elle demande aussi des motifs précis et appropriés de révolte, avec des sujets ou des événements conduisant à transformer l’insatisfaction en violence concrète. Elle suppose également une direction, une organisation, des troupes, des soutiens. Enfin, elle requiert un environnement favorable, ainsi que des ressources et des cibles. Une chaîne dont l’origine se perd au loin serait une image correcte de la relation entre l’action terroriste et ce qui a contribué à la faire naître. Dans la continuité de cette chaîne jusqu’à l’action terroriste, chaque maillon compte effectivement, mais il n’y a pas de modèle social ou de théorie apte à embrasser l’ensemble de la chaîne, en d’autres termes pouvant prédire avec certitude que telle action se produira à terme, du fait de l’enchaînement précédant des facteurs. Plus l’on va vers le bout de la chaîne, plus les choses deviennent claires, mais, comme on l’a souvent remarqué, il n’y a d’autre science sociale que rétrospective.

La complexité de l’apparition du terrorisme une fois posée, pourquoi la forme intérieure de celui-ci est-elle virtuellement endémique en Afrique ? Cette nouvelle question renvoie à un sujet très controversé, la nature du système social africain.

 

Pour certains et en ce qui concerne les “causes profondes”, le comportement politique ordinaire en Afrique dériverait directement de la situation de pauvreté du continent. En effet, en cas de précarité des ressources, le but principal de la compétition politique est de garantir une consommation économique, but qui, à son tour, est atteint d’une manière optimale par la captation du pouvoir central ou bien par la substitution à celui-ci d’un nouveau pouvoir local (comme au Kivu, dans l’est de la RDC, par exemple). Ce système politique tend à dégénérer en lutte à mort pour l’accès personnel à des ressources étatiques toujours limitées ; ce jeu à somme nulle oblige aussi des leaders politiques putatifs à engranger des bénéfices matériels pour obtenir des soutiens et vaincre leurs concurrents.

Le développement d’un clientélisme systématique, le recours à la grâce personnelle contre le soutien politique, en recourant dans ce système aux ressources de l’Etat, font que les régimes néo-patrimoniaux africains ont fait preuve de très faibles capacités de développement tout en se révélant incapables d’assurer la sécurité. “De la sorte, les relations politiques reposent en Afrique sur des accords de patronage et de loyauté entre des big men et leurs affidés. Ce sont les règles non écrites de la politique néo-patrimoniale qui dictent en fait les décisions des dirigeants, persuadent les citoyens d’obéir et ordonnent la marche de l’administration.

 

Dans un tel système et à la limite, les acteurs étatiques et sous-étatiques ont intérêt à favoriser la guerre et le désordre puisque ceux-ci peuvent leur fournir des occasions supplémentaires d’accumuler des ressources leur permettant mieux d’asseoir les divers réseaux patrimoniaux sur lesquels ils s’appuient. En l’absence d’autres possibilités pour le système néo-patrimonial et dans des conditions de raréfaction de la ressource, associer la vie politique au règne du désordre, guerre ou activités criminelles peu importe, devient une tentation irrésistible. La violence apparaît nécessaire pour acquérir ou conserver sa part du gâteau. Le désordre se fait lui aussi un impératif et une chance à la fois en termes de gains prévisionnels, alors que les incitations à organiser la société d’une manière plus formelles se raréfient.

 

En Ouganda, ni l’Allied Democratic Forces (ADF) dans l’ouest ni la LRA au nord n’auraient été capables de mener une rébellion sans appuis gouvernementaux extérieurs et fourniture d’armes et de soutiens divers. Produits alimentaires, carburant, armes, munitions, moyens d’encadrement et d’approvisionnement, pneumatiques, vêtements, matériel médical ont franchi pêle-mêle et clandestinement les frontières. Les mêmes mécanismes servent aussi à exacerber localement des rivalités communautaires, comme entre les agriculteurs sédentaires et éleveurs peul sur le plateau de Mambilla dans le nord-est du Nigeria, ou encore entre pasteurs turkana et voleurs de bétail toposa à la frontière soudano-kényane.

 

A la manière de l’Afghanistan, des Etats africains effondrés ou en crise, comme la RDC, le Liberia ou la Somalie, sont aussi devenus des zones d’échanges libres et informels de matières premières (diamants, or) et d’armes, mais aussi d’êtres humains ou de drogue, au bénéfice de réseaux clandestins regroupant acteurs locaux et grand banditisme international. L’une des caractéristiques de l’après-guerre froide a été justement le développement d’une économie grise du trafic d’armes, animée par des marchands et des transporteurs privés. Mercenaires et terroristes se fournissent désormais auprès des mêmes réseaux clandestins ou semi-clandestins, sans doute associés au trafic de drogue, et blanchissent leurs règlements d’une manière similaire tout en recourrant massivement à des documents d’identité falsifiés.

 

Ce genre d’interconnexion pose un problème de sécurité mondiale. Dans les pays où il est facile d’échapper à des contraintes comme un plan de vol et des formalités douanières et de police, il est parallèlement difficile de combattre efficacement la criminalité et de détecter les activités subversives. L’on rappellera, par exemple, que les terroristes qui ont failli abattre un avion de ligne avec un missile SAM-7 à Mombasa avaient pu introduire cette arme en fraude au Kenya.

 

Les relations entre le crime organisé et le terrorisme international sont bien, de fait, aussi étroites que le suppose la résolution 1373 (article 4) du Conseil de sécurité de l’ONU, qui insiste sur la nécessité d’une coopération régionale et internationale accrue contre l’un et l’autre.

 

En Afrique, tout particulièrement en Algérie, au Soudan, en Somalie, en Ouganda et en RDC, ainsi que naguère en Sierra Leone et au Liberia, le recours à la terreur est bien un trait récurrent des conflits locaux. Il y est devenu une stratégie si ordinaire qu’y recourir passe presque inaperçu. Il y a d’ailleurs, beaucoup en conviennent, un risque réel à tout confondre dans la lutte mondiale contre le terrorisme, qui implique souvent des arrière-pensées répressives de la part de gouvernements soucieux avant tout de contrecarrer des revendications politiques locales : autodétermination ou revendications de certains droits. Pris dans cet étau, des millions d’Africains ordinaires sont terrorisés par des gangs aussi bien que par des rebelles et des gouvernements. En pratique, il n’y guère d’autre choix que d’imputer toute manifestation du terrorisme à son bilan mondial, mais ceci n’apporte que bien peu de soulagement effectif aux victimes.

 

Le continent présente à la fois un environnement favorable et un vaste champ d’action pour tous ceux qui voudraient s’y attaquer aux Etats-Unis et au système mondial.

 

La CEMAC particulièrement est une zone de forte turbulence terroriste, du fait du conflit du Darfour, des rebellions au Congo RDC, au Tchad et en RCA. Les Chefs d’Etat doivent prendre des mesures communes pour lutter contre la prolifération d’activités terroristes dans la sous-région. Les Etat européens doivent aussi soutenir davantage financièrement et matériellement la sous-région, pour éviter que les attentats dont ils peuvent être victimes sur leurs sols soient préparés en Afrique.

Aujourd’hui, il est impensable que la voix des experts africains de la question terroriste et des acteurs politiques africains soit ignorée par le monde et les grandes puissances occidentales qui luttent contre le terrorisme. De ce point de vue, le gouvernement Israélien s’est distingué ; le 17 juin 2014, Avigdor Lieberman, le ministre israélien des Affaires étrangères, a annoncé la disposition de l’Etat Hébreu à coopérer avec l’Afrique de l’Est dans la lutte contre le terrorisme. Il est fortement souhaitable que les autres puissances notamment, les Etats-Unis, la France, l’Angleterre puissent tisser des liens assez étroits avec l’Afrique. L’Afrique mérite d’être prise en compte pour plusieurs raisons. On se souvient encore des attentats simultanés au Kenya et en Tanzanie en 1998 ayant occasionné plusieurs victimes d’origine occidentale, attestant ainsi clairement la vulnérabilité du continent africain en matière terroriste. En Ouganda,République centrafricaine, RDC, et le sud soudan la LRA emploie des méthodes terroristes depuis longtemps. La Somalie est souvent en proie à des attaques terroristes des Shebab. En Afrique Centrale, des germes du terrorisme naissent et se développent notamment en Centrafrique avec l’arrivée de la coalition rebelle Séléka au pouvoir en 2013. Le Centre Centrafricain de Recherches sur le Terrorisme créé par Aristide Briand REBOAS mérite aussi d’être soutenu par la communauté internationale. L’Afrique est aujourd’hui un nid pour terroristes, personne ne doit l’ignorer.

 

Aristide Briand REBOAS
Aristide Briand REBOAS

Par : REBOAS Aristide Briand, ancien Directeur Général des Renseignements Généraux Centrafrique, ancien conseiller juridique, droits de l’homme a la force régionale d’intervention de l’union, africaine pour la lutte contre la LRA Diplômés de HEI, PARISMail : abr.aris@yahoo.fr et aparddialogue@yahoo.com tél 0601155799.

 

 

 

 

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