La tournure prise par le forum de Brazzaville ne peut que conforter la grande majorité du large front du refus qui a choisi de rester à Bangui. C’est sans doute uniquement pour sauver la face au président congolais et médiateur de la crise centrafricaine Denis Sassou Nguesso que malgré elle, contrainte et forcée, la délégation de Séléka va se voir obligée de
co-signer le fameux accord de cessation des hostilités avec les anti-balakas annoncé avec tambours et trompettes depuis Bangui avant la tenue du forum de Brazzaville. C’est donc aux forceps qu’on nous brandira probablement un accord de cessez-le-feu qui aura résulté de laborieuses négociations où Séléka aura réussi à focaliser sur elle toute les attentions quant à sa façon de faire monter les enchères avec ses exigences politiques. Dès lors, quelles sont les chances qu’un accord signé dans de telles conditions soit mis en œuvre et respecté une fois tout ce beau monde revenu au bercail ? Quasiment nulles !
Parmi les revendications de Séléka, seule celle ayant trait à sa volonté de diviser la RCA par la fondation d’une république au Nord, a légitimement beaucoup ému les Centrafricains et l’opinion internationale mais selon nos informations, Séléka a formulé à Brazzaville d’autres exigences politiques tout aussi importantes telles que le départ de Mme Catherine Samba-Panza ainsi que plusieurs portefeuilles au gouvernement de transition tels que celui de la défense, de la sécurité, des mines ainsi que la primature. Toujours le dossier des promesses faites lors du sommet des chefs d’état de la CEEAC de N’djaména en janvier dernier qui n’auraient pas été respectées par Catherine Samba-Panza et auxquelles tant Séléka que le président tchadien tiennent à tout prix.
Le fond du problème est qu’au regard de l’ampleur des pillages, crimes de guerre, violations des droits humains et exactions de toutes sortes auxquels le nom Séléka est désormais attaché dans la mémoire des Centrafricains, ses dirigeants devraient faire preuve d’un peu de doigté et surtout d’un minimum de psychologie. Force est de constater plutôt que c’est le contraire qu’ils font. Aujourd’hui, Séléka s’est aliénée une bonne partie des musulmans centrafricains qui ont aussi fait les frais de leur arrivée au pouvoir. Malheureusement, l’amalgame a été faite et ces compatriotes sont aussi mal vus car soupçonnés à tort d’être complices de Séléka.
Sous l’influence de certains de ses leaders va-t-en guerre qui affectionnent la méthode forte, c’est à coup d’ultimatum et de menaces que la coalition rebelle fonctionne. Cette attitude est sans doute dictée par le fait qu’après la démission de Michel Djotodia, Séléka continue de disposer d’un arsenal de guerre quasi intact disséminé dans les principales du Nord qu’elle dit contrôler et qui lui permettent d’avoir la tentation d’en faire une république. Côté gestion de la chose publique, c’est seulement maintenant que certaines malversations et dossiers de prédation et mauvaise gestion de certains départements ministériels gérés pendant huit mois par des ministres Séléka commencent à voir le jour.
A l’évidence, il n’y a pas grande différence avec la prédation sous le règne de la bozizie. Parfois les ministres Séléka ont même fait pire. C’est justement à cause de cela que cette affaire d’octroyer certains portefeuilles comme les mines, la défense et la sécurité publique à des ministres issus de Séléka peut apparaître comme une inadmissible prime à l’impunité, à la mauvaise gestion et mauvaise gouvernance. C’est beaucoup moins à cause de leur musulmanité que l’idée a du mal à passer dans l’opinion nationale.
Centrafrique presse