Corbeau News Centrafrique
La république centrafricaine tombée dans une situation chaotique sans précédent à cause de sa crise récurrente qui est l’une de la barbarie de notre siècle, se passe pour l’un des pays de la planète très menacé par la déforestation. Avec ses quatre domaines floristiques, l’inquiétude de perte forestière a commencé vers la fin des années 90. Selon les statistiques, l’estimation indique une couverture de 8227 millions d’hectares de forêt dense, 21 395 millions d’hectares de mosaïques forestières et 24 746 millions d’hectares de zone de brousse ligneuse. De 2000 à 2009, le taux de déforestation n’a cessé de grimper l’échelle selon les experts des agences de l’Organisation des Nations Unies, notamment du FAO. On a relevé 15 aires de catégories protégées, couvrant une superficie estimée à 15 330 015 ha représentant 28% du territoire national environ.
L’exploitation conséquente et rationnelle de cette richesse nationale suffit bel et bien de réduire la pauvreté en République centrafricaine et faire face à la résolution d’autres problèmes sociaux que vivent dangereusement les populations centrafricaines. De ce point de vue, on ne peut ne pas dire que la Centrafrique manque cruellement d’une bonne politique de développement pour ne pas dire d’émergence car l’anarchie est de mise. Le monde entier a assisté à un défilé hideux de gouvernements des prédateurs qui se sont succédé en « régime semi-normal » sous le règne de François Bozizé et régimes de transition qu’il faut vite y mettre un terme pour que la RCA redevienne un Etat de droit et recouvre toute sa souveraineté. La condition sine qua none pour la normalisation et l’engagement sans ambages de la lutte contre la corruption, le pillage systématique et le déboisement.
En effet, le secteur forestier a une contribution fiscale annuelle toujours très faible à cause des détournements des revenus que le Département de tutelle encaisse au niveau de ses services de recouvrement. Alors que la production de bois est très exportée vers l’occident par la seule voie maritime de Douala mais les plus-values sont faiblement estimées pour permettre à l’Etat de réaliser des infrastructures modernes dans le pays. D’ailleurs, l’on a relevé que presque tous les ministres qui se sont succédé à la tête de ce département manquent de vision et n’élaborent aucun projet de développement digne de ce nom. Pour preuve, il n’existe aucune usine de fabrication de papiers dans le pays alors que pays producteur de bois et pas d’écoles modernes équipés dans les zones forestières qui regorgent immensément des bois. Nos écoliers et élèves en souffrent chaque année depuis l’indépendance. Se renflouer les poches et devenir riche est la politique de prime à bord mise en application par les ministres de tutelle qui ont acheté des villas en Europe et envoyé leurs enfants à l’école dans ces pays occidentaux. Hormis les chiffres des abattages déclarés dans les cahiers de charge des services communaux, il existe des abattages sauvages clandestins dans les aires forestiers et dont les grumes et sciages prennent la direction des pays voisins tels que le Soudan, le Cameroun, le Tchad. La loi du code forestier a été promulguée ainsi que les lois relatives au domaine national et protection environnemental ont été votées et promulguées mais ces garde-fous sont foulés au pied par les ministres de tutelle qui pilotaient à vue ce département stratégique. Il en est suivi trop de plainte des populations vivant dans ces zones forestières, devant pourtant bénéficier des fruits de ces exploitations anarchiques qui constituent des crimes économiques et qui méritent l’engagement des poursuites judiciaires. Il n’y a pas eu des fruits escomptés en faveur des populations qui manquent cruellement d’écoles modernes, centres de santé digne de ce nom et d’infrastructures énergétiques pouvant faciliter le développement local.
Vu ce constat amer, de milliers de bois abattus clandestinement sont relevés dans les zones forestières et dégagent à la longue les émissions du CO2. Ipso facto une perte à gagner et un danger pour les populations autochtones. Il va sans dire que le pourrissement du bois dans la forêt dégage du carbone et le renvoie dans le sol. En effet, l’écosystème en Centrafrique est une cible pour les prédateurs. Et la corruption qui gangrène le secteur constitue un obstacle pour tous les projets du secteur forestier financés par la Banque mondiale et d’autres partenaires de la République centrafricaine dans cette filière.
A la prise du pouvoir le 24 mars 2013, les bandes armées, notamment les éléments de la coalition séléka que dirige Michel Djotodia jusqu’à sa démission ont saccagé et pillé les matériels informatiques du ministère des Eaux et Forêts, Chasse et Pêche où toutes les données relatives à l’écosystème ont été stockées. Ces biens de l’Etat font aujourd’hui le bonheur de ces barbares du siècle.
Je disais tantôt que la cause principale de cette déforestation et la dégradation forestière est incontestablement le pilotage à vue des gérants du département, et il manque à notre gouvernement une politique cohérente et saine de développement de ce secteur qui constitue l’un des poumons de l’économie centrafricaine.
D’une part, je dirai que si l’électrification était assurée dans toutes les 16 préfectures du pays et les ménages utilisent du gaz pour la cuisson, on allait certes réduire le taux d’exploitation du bois de chauffe qui reste une industrie informelle en Centrafrique. Ceci étant, les ménages centrafricains qui vivent pour la plupart dans une extrême pauvreté produisent quotidiennement et en quantité considérable du gaz à effet de serre, contribuant efficacement aux conséquences néfastes du réchauffement climatique. Dans ce cas de déforestation évoquée, il existe aussi un système artisanal et sauvage à la tronçonneuse très pratiqué par les acteurs anti-développeurs qui aggrave chaque année la déforestation.
Selon la projection faite par des experts, en 2020, il aura une superficie de 52 500 ha déboisés. Le plus souvent, ces bois abattus échappent au contrôle des agents forestiers. Même si tel n’en est pas le cas, à voir le degré de la pauvreté dans le pays, le trésor public ne verra jamais ces pièces de 100 francs ou 200 encaissées au niveau des barrières. Pauvre RCA ! Où allons-nous ? Je crois qu’il est temps de révolutionner les choses dans l’intérêt général en mettant les gens qu’il faut à la place qu’il faut…
Pierre INZA