Centrafrique : Quel rapport entre Dologuélé et le mouvement des syndicats ?
Bangui, le 5 octobre 2017.
Par : Fred Krock, CNC.
Depuis quelques semaines, notamment à l’approche de la rentrée académique 2017-2018, et comme à l’accoutumé, la Bourse de travail – lieu de rencontre par excellence des Centrales syndicales a renoué au traditionnel mouvement de foule de chaque samedi. Seulement, la coïncidence entre la résurgence des syndicats et le retour à Bangui du Président de l’URCA (Union pour le renouveau centrafricain) suite à sa longue tournée hexagonale, ainsi que les dernières prises de position de l’opposant, font rappeler aux Soutiens de Touadera, le contrat signé entre l’honorable Anicet Georges Dologuélé et un certain nombre de centrales syndicales en février 2016.
Dologuélé, encore lui, et lui seul… Les Soutiens de Touadera ont encore aperçu sa longue main derrière les derniers mouvements à la Bourse de travail.
Au fait, début septembre, la Bourse de travail a renoué avec ses traditionnelles rencontres des Centrales syndicales. Et, depuis lors, la tension monte au sein des partenaires sociaux, car les dernières décisions qui sont prises par le syndicat correspondent à s’y méprendre à un bas de fer avec le gouvernement. Le syndicat a mis toute la pression possible pour que le gouvernement puisse payer certains arriérés de salaires, notamment du régime Séléka sous Michel Djotodia Am Nondroko, afin de permettre aux parents d’élèves de faire face aux urgences d’inscription et fournitures scolaires.
L’appel du GSTC (Groupement syndical des travailleurs de Centrafrique), en date du 9 septembre, par la voix de son Secrétaire général, M. Firmin Zoh-Ponguélé, a été plus explicite sur cet enjeu. « Suite à l’assemblée générale du samedi 9 septembre à la Bourse de travail, les camarades travailleurs dans leur majorité nous ont instruits de vous demander de bien vouloir rejoindre la dynamique de la lutte en cours pour la revendication du paiement des deux mois d’arriérés de salaires », peut-on lire dans cet appel du GSTC qui poursuit qu’ « à ce titre, un document de revendication consigné par tous les secrétaires généraux pourra peser sur les négociations. Devant l’importance de cette revendication, une réunion urgente de concertation entre les secrétaires généraux s’impose ».
De cette initiative du GSTC est né le centre de gravité des dernières tensions entre le gouvernement et le syndicat. Une menace de boycott de la rentrée a d’ailleurs été sur la table du syndicat qui exigeait effectivement le paiement préalable des mois d’arriérés avant la rentrée des classes. Le Premier ministre, Simplice Mathieu Srandji a dû rencontrer les leaders syndicaux pour tempérer provisoirement la situation. Ce qui est sûr, d’un moment à l’autre, si jamais la promesse du PM n’arrivait pas à se concrétiser, la menace du syndicat pourrait être mise en exécution.
Là n’est pas le problème, puisque le syndicat n’a fait que faire son job, d’interpeler le gouvernement dans le cadre de défense des intérêts du bas peuple ou des travailleurs. Seulement, les proches du Président de la République voient derrière cette montée de tension syndicat/gouvernement, une main noire de l’honorable député de Bocaranga 1 et Président de l’URCA, chef de fil de l’opposition centrafricaine. Le point qui a interpelé les Soutiens du chef de l’Etat, c’est selon eux, la coïncidence entre les prises de positions intransigeantes du syndicat et le retour à Bangui de Dologuélé suite à sa tournée hexagonale, et surtout par les dernières prises de paroles toujours acerbes vis-à-vis du pouvoir en place.
Pour être complet dans leur schéma d’accusation contre Dologuélé dans ce feuilleton, les Soutiens du chef de l’Etat ont exhumé et brandi un Protocole d’accord entre l’URCA et les Centrales syndicales signé en date du 6 février 2016. Aux termes de ce contrat, les centrales synicales signataires s’engagent à soutenir l’action politique de Dologuélé entre temps candidat qualifié dans le cadre du second tour de la dernière élection présidentielle.
Les signataires sont M. Edmond Dengué du CSTC, Mme Faustine Grothe du CNTC, M. Louis-Marie Kogréngbo de l’ODSTC, M. Oumarou Sanda du FOC, M. Firmin Zoh-Ponguélé du GSTC et M. Hervé Gbaké du SNTC.
A en croire, ces derniers, ce protocole d’accord justifierait à suffisance que « le syndicat, malgré son statut apolitique, joue le rôle de l’opposition de Dologuélé, avec qui, il parle le même langage pour enfreindre les actions du gouvernement ».
Faut-il rappeler que ce n’est pas la fois que Dologuélé est accusé par les Soutiens du Président de la République d’être l’intelligence des manouvres de déstabilisation du pouvoir. L’on se souviendra du rocambolesque feuilleton putsch manqué dont Dologuélé a été indexé ; la manifestation échouée du 9 septembre projetée par la diaspora de France pour demander la démission de Touadera où certains proches du Président extrapolent même que Dologuélé aurait remis 1500 euros à chacun des manifestants ; la dernière prise de position du GTSC (Groupe de travail de la société civile) également.
Bref, l’ombre du chef de fil de l’opposition plane, selon les soutiens du chef de l’Etat, sur tous sulfureux dossiers qui minent la République. Et, l’on s’interroge, cela va-t-il aller jusqu’où et jusqu’à quand ?