CENTRAFRIQUE : NOUVEAU GOUVERNEMENT, UN COUP D’ÉPÉE DANS L’EAU
Bangui, le 17 septembre 2017.
Par : Joseph Akouissonne, CNC.
SARANDJI BIS
Le Président de la République, démocratiquement élu, est libre de nommer un nouveau Premier Ministre ou de reconduire le précédent, selon ce qu’il souhaite. Cela n’interdit en rien aux citoyens souverains de s’interroger sur les actes majeurs du Président.
Les Centrafricains sont donc dubitatifs et surpris devant ce qui s’apparente à la reconduction pure et simple d’un gouvernement qui, malheureusement, a failli.
Le Premier Ministre Sarandji n’a ramené ni la paix (SIRIRI), ni la réconciliation nationale. L’insécurité envahissante reste l’une des plaies de la République Centrafricaine. Le pays est désormais en état de quasi-partition. 60% du territoire sont occupés par des rebelles et des mercenaires étrangers sanguinaires. Les provinces vivent sous la terreur des ex-Sélékas, des mercenaires étrangers et des Peuls nomades et agressifs qui font brouter leur troupeau dans les champs des sédentaires. Quand ceux-ci protestent et veulent défendre leur parcelle de culture, on les égorge. Même les enfants subissent le supplice. Des lieux de culte chrétiens sont profanés dans la Kotto, la Haute-Kotto, le Mbomou et le Haut-Mbomou. Un prêtre a été égorgé à Bria. Des femmes sont quotidiennement violentées et violées.
La paix qui semble régner à Bangui, la capitale, est une illusion trompeuse. Certains quartiers, la nuit venue, deviennent de véritables coupe-gorge. La rupture avec le passé, promise par le président Touadera, n’a pas été mise en pratique par le premier gouvernement Sarandji.
Les injustices sociales, les prévarications sont toujours présentes. Le pays, loin d’être apaisé et gouverné, est la proie d’un chaos indicible. Pourquoi reconduire un gouvernement qui n’a pas accompli sa mission ? Pourquoi renommer un Premier Ministre dont tout le monde en Centrafrique réclamait le limogeage avec insistance ? Quels sont les critères qui ont orienté les choix du Président ? Des ministres, incompétents notoires, dont les Centrafricains attendaient avec impatience le départ, ont conservé leur maroquin. Certains sont même des prévaricateurs patentés. Quoi de plus choquant ?
On aurait aimé voir un gouvernement de combat ! Un gouvernement restreint et composé de patriotes convaincus ! Au lieu de quoi, les ministres sont encore plus nombreux – ce qui est, non seulement incompréhensible, mais aussi absurde, étant donné l’état de délabrement économique du pays, obligé de vivre grâce à l’aumône internationale.
En outre, les choix du président Touadera semblent être guidés par le clanisme, le népotisme, le tribalisme et les accointances amicales. Si tel est le cas, c’est un reniement des engagements pris devant les Centrafricains. Quelles actions va engager ce gouvernement, qui n’auraient pas déjà été mises en œuvre par le précédent pour ramener la paix et la sécurité en Centrafrique ?
DES EX-SELEKAS DANS LE NOUVEAU GOUVERNEMENT
C’est insupportable ! On peut même parler de trahison.
Le nouveau gouvernement comporterait des éléments proches des ex-Sélékas, ceux-là mêmes qui ne cessent de massacrer les Centrafricains. Nommer à la conduite du pays des criminels de guerre et des responsables de crimes contre l’humanité, quoi de plus méprisant pour les victimes ? Quelle insulte à leur mémoire !
Les ex-Sélékas continuent à terroriser le pays. Noureddine Adam, l’ex-bras droit de Michel Djotodia, hausse le ton et menace de faire capoter le DDRR, si ses hommes retenus au Camp de Roux ne sont pas libérés. Ce séparatiste frénétique prévoit même que les autres factions des rebelles suivront son exemple.
Comment se fait-il que ce criminel se pavane tranquillement en Centrafrique, se livre à des déclarations intempestives sans que le gouvernement ne fasse un commentaire ou demande aux forces internationales de l’arrêter ? Lui et beaucoup d’autres rebelles ne sont-ils pas lestés d’un mandat d’arrêt et d’une interdiction de voyager lancés par l’ONU ?
Etant donné la tournure que prennent les événements à Bangui, il est fortement à craindre que se prépare une « nuit des longs couteaux » à la centrafricaine. Personne ne songe à consulter le peuple légitime. La reconduction de Sarandji ressemble à la prime d’un maître chanteur. Il n’y a pas si longtemps, quand le président Touadera, poussé par la vox populi, a décidé de changer de Premier Ministre, Sarandji a menacé de publier les secrets de trente ans d’amitié avec le président. Il a peut-être pris Touadera en otage.
Si on continue dans cette voie, ce quinquennat risque fort d’échouer. La paix et la réconciliation nationale seront, hélas ! Encore loin. Espérons malgré tout, que le Gouvernement Sarandji 2 ramène la paix la sécurité et la réconciliation nationale.
JOSEPH AKOUISSONNE
(16 septembre 2017)