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CENTRAFRIQUE : L’OBSESSION DÉMESURÉE ET VIRALE DE LA MODIFICATION DE LA CONSTITUTION ÉCLIPSE LES PRIORITÉS DU QUINQUENNAT.

 

 

Rédigé par Bernard Selemby Doudou

Publié par Corbeaunews Centrafrique (CNC), le dimanche 17 avril 2022

 

Bangui (CNC) – À la sortie du dialogue politique qualifié de républicain, le spectre d’une modification jubilatoire de la constitution plane sur la démocratie centrafricaine encore embryonnaire mais tant fragilisée. C’est ainsi que des manœuvres, intimidations et spéculations visant à fragiliser l’opposition démocratique se multiplient par des débauchages des élus de la nation appartenant à l’opposition en vue de s’approprier une majorité absolue à l’assemblée nationale.

Bernard Selembi Doudou
Bernard SELEMBY DOUDOU, auteur de l’article. Photo courtoisie

 

Cette pratique moyenâgeuse vise à vider l’opposition démocratique de sa substance, de l’anéantir et de la contraindre à conjuguer le même verbe que le pouvoir existant. Il apparaît important d’affirmer solennellement qu’il est évident que la constitution du 30 mars 2016 capitalise beaucoup de coquilles et d’incohérences d’où la nécessité de l’actualiser, de l’adapter aux contraintes politiques modernes mais c’est le « timing », l’opportunité ou alors les mobiles de cette révision constitutionnelle qui interrogent le commun des mortels. Pour être légitime et exempt de contestations, la modification de la loi constitutionnelle doit obéir à des règles strictes de procédure.

 

En effet, le titre 15 de la constitution qui ne comporte que trois articles fixe expressément les règles de procédure de la révision et les limites. Ainsi, l’article 151 de la constitution accorde concurremment au président de la république et à l’assemblée nationale le droit de l’initiative de la révision sous réserve de l’approbation par les 2/3 des membres la composant. L’alinéa 2 de l’article 152 définit des limites liées à la période c’est à dire que la révision constitutionnelle ne peut se faire pendant la vacance de la présidence de la république ni lorsque l’unité et l’intégrité du territoire sont atteintes. Enfin, l’article 153 qui consacre le caractère rigide de la constitution se contente d’énumérer des exclusions au modification constitutionnelle dont le nombre et la durée du mandat présidentiel c’est à dire que toute modification de la constitution ne concernera nullement ce domaine.

 

Fort de ce rappel constitutionnel, le citoyen lambda craignant l’instrumentalisation ou la satisfaction d’un agenda caché s’interroge :

Quelles seraient les réelles motivations pour justifier une éventuelle modification de la constitution ?

Cette modification de la constitution qui se présente en filigrane est-elle opportune et indispensable ?

Cette modification de la constitution « a tout va » garantit-elle un avenir meilleur à la jeune démocratie centrafricaine ?

Le modèle politique centrafricain calqué sur la cinquième république française serait-elle épuisée et inadaptée aux réalités du moment ?

Un éventuel référendum réputé budgétivore serait-il l’idéal à la sortie d’une dépense inopportune du débat républicain ?

Au delà de tout ce qui précède, nous tenons à souligner que l’expérience africaine des révisions de la constitution tendant à se maintenir au pouvoir n’a apporté que des pleurs et désolations.

À l’instar de certains présidents qui ont tenté et échoué la modification de la constitution comme le président Olusegun Obansajo du Nigéria en 2006, le président Frederic Chiluba de la Zambie en 2001, le président Blaise Campaoré du Burkina et récemment le président Alpha Condé de la Guinée Conakry. Ces expériences respectives n’ont enregistré que des morts d’hommes, des exiles, des arrestations arbitraires ou emprisonnements, des dégâts matériels importants, des sanctions diplomatiques et/ou économiques, de la dégradation de la qualité des institutions républicaines sans oublier la méfiance des investisseurs…ce que nous ne souhaitons pas pour notre nation, car évitable.

Pour finir, en référence à la sémantique sur fond du politiquement correct, nous nous permettons d’affirmer que les vocables « révision », « modification » ou « changement » de constitution ne vise exclusivement que l’article sur le nombre et la durée du mandat comme si c’est seulement cet article qui est à l’origine de l’inadaptation ou de l’incohérence de la loi fondamentale. Mais attention, ne le dites à personne.

Si on vous demande, ne dites surtout pas que c’est moi.

 

Paris le 16 avril 2022.

Bernard SELEMBY DOUDOU.

Juriste, Administrateur des élections.

Tel : 0666830062.

 

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