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Centrafrique: FACE À CETTE CRISE L’ÉTAT ET MÊME LES ÉGLISES, LES MOSQUÉES ONT ÉCHOUÉ.

Centrafrique: FACE À CETTE CRISE L’ÉTAT ET MÊME LES ÉGLISES, LES MOSQUÉES ONT ÉCHOUÉ.

 

ENZA ROBERT lUSD-COMODE
Bangui, le 19 décembre 2016. 11:55′.
Par: Robert Enza. CNC.

Quel est donc ce pays qui depuis 50 ans, l’État n’arrive pas à marquer son territoire, et tout ce qui préside à sa destinée est aléatoire, éphémère et superflus ; un État caricatural, un refus d’auto-détermination en soi-même.
Les évènements qui ont caractérisé cette crise et qui n’en finissent pas, nous interroge. Pourquoi notre société n’a pas trouvé des ressources internes pour atténuer en grande partie le choc de la crise. Quand un mauvais vent comme celui-là qui a frappé notre pays, c’est de l’intérieur que la société devrait retrouver ses forces, pour s’organiser et résister.

Malheureusement, notre société n’a pas trouvé de forces centripètes. Elle est restée stéréotypée et pétrifiée. Mais d’où vient cette faiblesse qui a permis à cette tempête meurtrière de s’abattre sur le pays dont les eaux ont inondé le paysage et provoqué des immondices plus hautes que la colline de Bas-Oubangui, qu’il sera bien difficile de les nettoyer à fond.

Nous avions cru que la culture occidentale allait nous sauver de notre indigénat ; c’était une illusion ; elle n’a pas apporté de nouvelles valeurs morales, elle a déraciné notre société fixée sur nos traditions très influentes, gardiennes de la cohésion sociale et d’accueil de l’étranger ; en un mot le sens de l’humain.
Les gardiens de la société, c’étaient les Chefs traditionnels et leurs condisciples qui avaient de vrais pouvoirs sur la société traditionnelle, un gouvernement social établi sans contrainte mais sur la base de la morale. Rien ne se passait dans la société sans leur regard.

Aujourd’hui le rôle de gardien de la société est joué par l’État, les églises et les mosquées. Les actions de l’Église, de la mosquée et de l’État nous ont influencé, certes, mais sans grands rapports moraux ; leurs actions sont restées, sommes toutes, insuffisantes et peu pénétrantes ; à l’église comme à la mosquée, les rites répétés par les adeptes, ils ne se les appliquent pas. Les églises et les mosquées paraissent être des lieux de rencontres joyeuses que de pratique de la foi véritable avec ses principes doctrinaires. Dire qu’on est chrétien ou musulman, c’est juste une couleur, c’est comme le cheval blanc, or ce qui dénote de la couleur ne dénote pas de la forme, le cheval blanc peut ne être pas un cheval blanc, il peut être un cheval noir.

L’église et la mosquée, elles ont la mission sociale, assurer la paix sociale entre les Hommes, le sens de l’humain. Mais comment, en est-on arrivé à plonger dans ce désastre inhumain où plus de 7 000 personnes, des innocentes pour la plupart ont perdu leur vie dans une atrocité inouïe et que les églises et les mosquées n’ont pas pu voir venir ce drame.
Et dire que ce sont des croyants qui s’entretuent, sans aucune cause de rivalité religieuse, c’est hallucinant. Les églises et les mosquées sont faibles, surtout quand des individus armés utilisent le nom de leur ministère pour agir à leurs propres comptes ; et à tord on a accusé cette crise, de crise inter-communauté religieuse et aussi c’est à tord quand on dit que la population représente 90% de chrétiens et 10% d’islamisés, c’est faux. En réalité, il y a 80% d’athées, 15% de chrétiens et 5% d’islamisés.
Et en temps normal 95% des centrafricains confondus, poussés par le désarroi social et à la recherche du réconfort social dans les religions vivent entre l’athéisme et la religion sans aucune véritable conviction spirituelle. De ce que nous constatons, l’action de l’église et de la mosquée doit porter plus dans la pénétration spirituelle.

En effet, nos rites et nos traditions étaient des lois qui contraignent, éduquent et corrigent les comportements ; malheureusement nos Doyens traditionnels qui avaient le devoir de les enseigner, ont disparus de notre société, que les églises, les mosquées et l’État n’arrivent pas à les suppléer.

L’église nous a éconduit à détruire les totems et abandonner les rites. Or ces choses là étaient d’une grande importance dans notre société traditionnelle. L’ensemble des rites et de ces pratiques ressemblerait aujourd’hui à ce que nous appelions la constitution.

Ceux qui enseignaient et faisant répéter les rites de la tradition, détenaient un réel pouvoir sur la société et étaient considérés comme des maîtres, des Chefs. Ils étaient respectés et écoutés. Ils vivent dans la société et leurs comportements étaient irréprochables car ils sont des exemples et des modèles à suivre. Ils sont le symbole même de la valeur.

A plus de 50 ans en arrière, il n’ y avait ni vols, ni viols, ni violences, ni corruption ; les gens agissaient avec honnêteté et responsabilité, c’est grâce aux enseignements traditionnels.
Ce qu’on a appris des parents constitue notre culture. Ce qu’on a appris de l’église, de la mosquée et de l’école est nécessaire pour notre développement social.

Et l’église a introduit l’argent comme monnaie de culte, objet d’offrande en lieu et place des vivres alimentaires qu’on offrait et déposait aux pieds de nos totems représentant Dieu. La demande de l’argent est très expansive dans l’église, qu’il a ainsi créé le matérialisme et l’individualisme, nouveau comportement tourné vers l’extérieur et à l’intérêt personnel.

Les enseignements venant de nos parents, de nos ancêtres paraissent être les nôtres. Si nous connaissons et que nous les suivons fidèlement, alors nos sentiments retrouvent la paix. Si nous répétons les rites comme ce que dit le doyen qui les détient, nos connaissances égalent les siennes.
Les rites et les enseignements sont ceux par quoi, on se corrige. Ils évoquent des règles de conduites sociales.
Celui qui ne respecte pas les rites de la tradition se voit viré de la société. Et par contre celui détient les rites ancestraux est considéré comme celui qui détient les valeurs de la société.

Donc l’église et la mosquée doivent faire une revisite de leur rôle et apporter plus de valeurs morales et d’éducation dans notre société. De part leur rôle, elles sont à la base de notre société matérialiste actuelle.
L’État est le principal fossoyeur, naufrageur de notre société. Les villages et les quartiers, là où doit commencer la gestion sociale, les gestionnaires communautaires sont sans pouvoirs. Ils sont de simples piquets délimitant les agglomérations d’habitations.
Comment peuvent-ils agir en amont, avant que l’État n’intervienne. Comment peuvent-ils avoir les pouvoirs que jadis avaient les Chefs traditionnels.
Il faut renforcer leurs capacités et leur donner plus de pouvoirs dès au départ. Leur rôle serait plutôt préventif que curatif absolument.

Notre population à 80% est à dominante rurale et vit dans l’illettrisme ; dans ce cas les Chefs de villages ont un rôle clé à jouer. Il faut repartir à la base pour reconstruire notre société sur des bases plus solides où des pouvoirs seront reconnus aux gestionnaires communautaires. Et derrière, un État fort qui rassure et qui assume ses responsabilités.

Nous plaidons pour une stratification et une ramification sociale à la base dont seront responsables les gestionnaires communautaires appelés Chefs de groupes avec des pouvoirs réels. La gestion sociale doit commencer par le bas et non par le haut vers le bas, cette dernière méthode a échoué.

Ce que nous disons ici doit faire penser à la nouvelle société née des cendres de cette crise et d’avoir une vision d’organisation la plus dynamique possible afin de bâtir une société plus humaine basée sur l’obligation des droits et des devoirs, et les administrations la charge d’assurer la sécurité et la protection à tous.
Robert ENZA

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