Centrafrique : bientôt toutes les écoles vont fermer leurs portes dans les provinces

Rédigé le 11 novembre 2025 .
Par : la rédaction de Corbeaunews-Centrafrique (CNC).
Lundi 3 novembre. À Baboua, les élèves des écoles Centre 1 et Œuvre sont restés chez eux. Pas de grève, pas d’épidémie, pas de problème de sécurité. Leurs enseignants sont partis passer des tests sur tablette pour devenir agents recenseurs. Tous, sans exception. Les directeurs d’école compris. À Bouar, même scénario dans les écoles publiques et au lycée moderne. Les classes vides, les enfants livrés à eux-mêmes, les parents obligés de se débrouiller.
Pendant ce temps, dans ces mêmes villes de la Nana Mambéré, des centaines de jeunes diplômés cherchent du travail. Des gens disponibles, capables d’apprendre à utiliser une tablette, prêts à parcourir les quartiers pour compter les habitants. Mais non. L’Institut Centrafricain des Statistiques et des Etudes Économiques et Sociales a préféré mobiliser ceux qui ont déjà un emploi. Un emploi, en plus : former les enfants.
L’argument officiel ? Les enseignants ont le niveau requis pour ce travail technique. Admettons. Mais depuis quand les chômeurs centrafricains n’ont-ils pas de diplômes ? Des licenciés qui attendent une opportunité, il y en a dans chaque ville de province. Ce recensement, le quatrième du genre, aurait pu être l’occasion de leur donner un revenu temporaire. Au lieu de ça, on organise une redistribution bizarre : on retire les enseignants des écoles pour les transformer en recenseurs, on laisse les élèves à la maison, et on ignore les sans-emploi.
Les parents se demandent : qui a pensé ce système ? Qui a décidé qu’en pleine année scolaire, il était acceptable de vider les établissements de leurs enseignants ? Le RGPH4 est prévu pour octobre 2025. Les préparatifs traînent depuis des mois. Personne n’a jugé utile de programmer ces formations pendant les vacances ? Personne n’a considéré l’impact sur le calendrier scolaire ?
Dans un pays où le taux de scolarisation reste fragile, où beaucoup d’enfants abandonnent l’école en cours de route, chaque semaine de classe compte. Les enseignants le savent. Les parents aussi. Apparemment, pas ceux qui organisent le recensement. L’éducation attendra. Les statistiques démographiques, elles, ne peuvent pas patienter.
Certains parents à Bouar commencent à parler de fermeture prolongée des écoles si cette mobilisation continue. On n’en est pas encore là, mais l’inquiétude monte. Les évaluations de fin de trimestre approchent. Les programmes ne sont pas bouclés. Les enfants accumulent du retard. Et pour quoi ? Pour compter la population, alors qu’on aurait pu embaucher des gens qui ont besoin de ce travail.
Le comble, c’est que ce recensement est censé aider à planifier le développement du pays. Mais quel développement peut-on bâtir en négligeant l’éducation des générations futures ? Les données du RGPH4 vont servir à établir des politiques publiques, à allouer des ressources, à orienter les investissements. Très bien. Sauf qu’on sacrifie aujourd’hui ce qui devrait être la première des priorités : la formation de ceux qui porteront ces politiques demain.
L’ICASEES publiera bientôt les listes des candidats retenus comme agents recenseurs. On verra alors combien d’enseignants ont été sélectionnés, et combien de chômeurs. Les paris sont ouverts. En attendant, les écoles des villes de provinces comme Baboua et Bouar fonctionnent au ralenti. Les élèves perdent des jours d’apprentissage qu’ils ne rattraperont jamais vraiment. Les familles s’adaptent comme elles peuvent.
Ce qui se passe dans la Nana Mambéré n’est qu’un exemple. D’autres provinces vivent la même situation. Partout, le même choix incompréhensible : prendre ceux qui travaillent déjà plutôt que ceux qui cherchent du travail. Vider les services publics plutôt que de créer des emplois temporaires. Perturber l’année scolaire plutôt que d’attendre le bon moment.
Anselme Mbata….
Rejoignez notre communauté
Chaine officielle du CNC
Invitation à suivre la chaine du CNC
Note : les deux premiers groupes sont réservés uniquement aux publications officielles du CNC




