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CENTRAFRIQUE : APRÈS LE DEAL SUICIDAIRE AVEC LES GROUPES ARMÉS, LE POUVOIR ANÉANTIT LES EFFETS JURIDIQUES D’UN MANDAT D’ARRÊT POURTANT EXÉCUTOIRE.

Monsieur Bernard Selembi Doudou, l’auteur de l’article. Photo de courtoisie.

 

 

Bangui (République centrafricaine) – Depuis le retour clandestin, sans honneur et inexpliqué du président du parti KNK sur la terre de ses ancêtres, le paysage politique centrafricain a changé de configuration avec l’errement d’une tension électrostatique teintée de rumeurs de l’éminence d’un coup d’état militaire contre les autorités établies.

 

Le général déserteur a multiplié des sorties médiatiques et des rencontres inopinées sous le regard muet et méprisant du pouvoir. Parallèlement à cette occupation politique du terrain et le mutisme inquiétant du pouvoir, le général avait demandé une d’audience avec son ancien premier ministre devenu par la force des choses président de la république mais assortie de conditions préalables et non négociables (réception à l’assemblée nationale en présence des diplomates accrédités en Centrafrique et un impressionnant dispositif de sécurité) qui s’apparentent à une réhabilitation dans ses droits, une forme de légitimité nonobstant l’existence d’un mandat d’arrêt international pour crimes de guerre, crimes contre l’humanité et incitation à la haine.

Il est important de rappeler que le pouvoir de Bangui n’a pas cédé à ses conditions capricieuses et a reçu les autres anciens chefs d’état qui pourtant ont fait leur demande d’audience postérieurement. Il a fallu la médiation sur fond de pression de l’Union Africaine (UA), de la CEEAC et de la communauté internationale pour décrisper l’atmosphère et faciliter la rencontre entre les deux “vrais-faux” amis qui a finalement eu lieu le mardi 21 janvier 2020.

Non reçu dans le bureau présidentiel avec des images qui renvoient des messages à décrypter, le citoyen lambda s’interroge :

Quel est le but recherché par le général à travers cette rencontre avec le président de la république ? Qu’est-ce qu’on peut attendre de cette rencontre surtout qu’elle a été faite sous la pression de la communauté internationale ?  Quel est l’agenda caché de la communauté internationale derrière cette entrevue ? A qui profite véritablement cette rencontre ? Cette rencontre a t-elle été facilitée par souci de promouvoir la paix et l’accord de Khartoum qui est au point mort ? La paix tant recherché par les autorités centrafricaines doit-elle se construire durablement sur les ruines de la haine et de l’impunité ?  Ce tête à tête entre le président de la république et son “faiseur de roi” a t-elle sensiblement baissé les tensions politiques et la psychose de coup d’état ? L’audience tant attendue avec le président de la république a t-elle significativement apaisé le général de ses craintes sur son avenir judiciaire ? La session criminelle en cours statue actuellement sur les crimes commis par les groupes d’autodéfense, pourquoi les auteurs intellectuels ou instigateurs de ces crimes ne sont pas à la barre ? La volonté politique du président de la république peut-elle empêcher l’exécution d’un mandat d’arrêt international ?

Au delà de ce qui précède, pourquoi les grandes décisions du pouvoir centrafricain sont-elles toujours aiguillées par la communauté internationale ? Cette communauté internationale qui n’a jamais de visage n’est-elle pas lassée de notre immaturité politique ?

Déduction faite de ces différentes interrogations, nous comprenons que la non exécution du mandat d’arrêt international contre le général déserteur est animée par le souci de sauver l’année électorale. En dehors de sauver l’année électorale, le président de la république se protège lui aussi car ils sont tous les deux sources du malheur des centrafricains parce que l’un était chef de l’état et l’autre premier ministre. La paix et le mandat d’arrêt international sont loin d’être les préoccupations du général car ce dernier est beaucoup plus hanté par les dispositions du code électoral qui impose la présence effective et physique du candidat à la présidentielle sur le territoire national au moins un an avant le scrutin. L’opinion nationale s’attendait beaucoup plus à une déclaration de retraite politique du général déserteur…hélas.

Pour finir, nous rappelons que selon les dispositions de l’article 33 alinéa 12 de la constitution, le président de la république est le garant du bon fonctionnement des institutions judiciaires. Empêcher ces institutions d’assumer sereinement leur mission est constitutif de haute trahison pouvant déboucher sur une procédure de destitution selon les procédures prévues à l’article 125 de la constitution.

Pour l’instant, nous n’en sommes pas encore à ce stade mais attention, ne le dites à personne. Si on vous demande, ne dites pas que c’est moi.

 

Paris le 24 janvier 2020.

Bernard SELEMBY DOUDOU.

Juriste, Administrateur des élections.

Tel : 0666830062.

 

 

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