Chantage, intimidation et déni de droit : le calvaire d’un réfugié centrafricain au Tchad

Laurent Ragba Foutour , Un ancien cadre centrafricain devenu réfugié en détresse au Tchad sans assistance.
Rédigé le 07 août 2025 .
Par : la rédaction de Corbeaunews-Centrafrique (CNC).
Laurent Ragba Foutour, 69 ans, est un réfugié originaire de Centrafrique arrivé au Tchad en 2015 avec une famille nombreuse de 11 personnes. Ancien administrateur et cadre politique dans son pays natal, il a fui le conflit en République centrafricaine pour chercher protection au Tchad. Depuis près de six ans, cependant, son foyer survit sans aucune assistance humanitaire, dans une détresse grandissante. M. Laurent Ragba Foutour affirme que sa famille, comprenant sa fille veuve Noura (31 ans) et ses petits-enfants, est livrée à elle-même depuis janvier 2020 – plus d’aide alimentaire ni financière, pas de prise en charge médicale – malgré son statut légal de réfugié reconnu.
Cette situation émouvante est le fruit d’un conflit ouvert avec certains agents du Haut Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) au Tchad, que Laurent Ragba Foutour accuse de graves abus de pouvoir, d’intimidation et de corruption. Ses efforts répétés pour obtenir justice et rétablir ses droits l’ont conduit à dénoncer publiquement ces dérives. Appuyé par la récente diffusion de son témoignage par Corbeaunews-Centrafrique (CNC), il interpelle aujourd’hui les autorités tchadiennes et les instances internationales afin de mettre un terme à son calvaire et à celui d’autres réfugiés dans le pays.
Accusations de corruption : une assistance coupée après un pot-de-vin manqué
Le point de départ de l’affaire remonte au 8 janvier 2020. Ce jour-là, au guichet unique du HCR à N’Djamena, Laurent Ragba Foutour accompagne un compatriote réfugié (M. Eric A., d’origine libanaise mais naturalisé centrafricain) venu suivre son dossier. Ils y rencontrent deux agents du service Protection du HCR, identifiés comme M. Blaise et M. Barnabé. D’après M. Ragba Foutour, la discussion a dégénéré lorsque M. Blaise aurait reproché à son ami de ne lui avoir versé qu’un pot-de-vin de 50 000 francs CFA, au lieu des 3 000 000 FCFA qu’il escomptait, en échange de l’avancement de sa procédure de réinstallation vers un pays tiers.
Selon le témoignage de Laurent Ragba Foutour recueilli par la rédaction du CNC, l’agent du HCR, furieux, aurait proféré des menaces explicites à l’encontre du réfugié : « Regarde-moi bien. Pour seulement 50 000 F ? À cause de gens comme toi, mon père a giflé un Blanc à Bouar et on a dû rentrer au Tchad. C’est fini pour vous : vous n’aurez plus aucun service du HCR, excepté votre rapatriement dans votre pays d’origine. Si j’avais su que tu ne m’apporterais que 50 000 F, je n’aurais jamais donné mon accord pour qu’on te délivre ton titre de voyage. Maintenant, va récupérer ça là où tu as l’habitude de corrompre, c’est-à-dire à la CNARR ! » (la CNARR étant la Commission nationale d’accueil, de réinsertion des réfugiés et des rapatriés, l’organisme étatique tchadien en charge des réfugiés).
Ces paroles rapportées laissent entendre qu’un accord occulte de 3 millions de FCFA aurait été passé entre l’agent du HCR et le réfugié Eric A. pour faciliter sa réinstallation à l’étranger, accord que ce dernier n’aurait finalement pas honoré. La réaction de l’agent Blaise confirme une pratique de racket : il se serait senti “trompé” en ne recevant qu’une somme dérisoire de 50 000 FCFA, et aurait décidé en représailles de bloquer toute assistance future au réfugié. M. Ragba Foutour, choqué, affirme avoir constaté ce jour-là un échange révélateur : son ami lui a confié qu’ils s’étaient entendus avec l’agent sur un bakchich de 3 000 000 FCFA pour assurer le suivi du dossier jusqu’à la réinstallation. Le versement partiel de 50 000 FCFA a été perçu par l’agent comme une tromperie, déclenchant sa colère et les menaces.
Dans les semaines qui ont suivi cet incident, Laurent Ragba Foutour et sa famille en ont subi les conséquences directes. Toutes les aides qu’ils percevaient du HCR ont été brutalement suspendues à partir de janvier 2020. Il s’agissait notamment d’une modeste allocation mensuelle (environ 30 000 FCFA par personne), indispensable pour payer le loyer et nourrir les enfants. Du jour au lendemain, cette famille déjà vulnérable s’est retrouvée sans aucune ressource. D’après M. Laurent Ragba Foutour, cette suspension despotique a été instrumentée par le même agent Blaise et son équipe, en représailles à l’altercation. Il parle d’une “décision de haine”, visant à le punir lui et sa fille Noura (également réfugiée enregistrée) pour avoir été témoins et victimes collatérales de l’incident de corruption manquée.
Les conséquences humanitaires n’ont pas tardé à se faire sentir : incapacité de payer le loyer pendant plusieurs mois, menaces d’expulsion du logement, et surtout privation de soins médicaux et d’alimentation adéquate pour les enfants en bas âge. Tragiquement, la plus jeune fille de Laurent Ragba Foutour, Awa Goumi, âgée de 6 ans, est décédée le 7 mars 2024. Le père endeuillé attribue ce décès au défaut de prise en charge médicale : « Ma fille est morte faute de soins, alors que le HCR et la CNARR le savaient », écrit-il amèrement. Selon lui, cette mort démontre clairement le drame silencieux que vivent les réfugiés “sanctionnés” par ceux-là mêmes censés les protéger.

“Vide juridique” ou mauvaise foi ? Une loi d’asile ignorée pendant des années
Pour se défendre et faire valoir ses droits, Laurent Ragba Foutour s’est tourné vers la législation nationale tchadienne. En effet, le Tchad s’est doté récemment d’un cadre juridique protecteur pour les réfugiés : la loi n° 027/PR/2020 du 31 décembre 2020 portant asile en République du Tchad, promulguée par le président Idriss Déby Itno (décédé en avril 2021). Cette loi, conforme aux conventions internationales (Convention de 1951 sur les réfugiés et Convention de l’OUA de 1969), consacre de nombreux droits pour les réfugiés et demandeurs d’asile : droit au séjour régulier, à la liberté de circulation, droit à l’éducation, à la santé, à l’assistance publique, à l’exercice d’une activité professionnelle, au regroupement familial, etc. Elle garantit également le principe de non-refoulement (pas d’expulsion vers un pays où la vie ou la liberté du réfugié serait menacée) et prévoit la délivrance de documents officiels (attestation, carte d’identité de réfugié, titre de voyage). En somme, sur le papier, les réfugiés au Tchad doivent être traités « aussi favorablement que les nationaux » dans l’accès aux droits fondamentaux et aux services de base.
Toutefois, pendant plus de deux ans, cette loi est restée lettre morte faute de mesures d’application concrètes. Ce n’est que le 25 avril 2023 qu’un décret d’application (n° 0648/PT/PM/MATDBG/2023) a été pris par le gouvernement de transition (présidé par Mahamat Idriss Déby, fils du défunt chef de l’État) pour préciser les modalités de mise en œuvre de la loi d’asile. Ce décret détaille les procédures d’accueil, d’enregistrement, de détermination du statut de réfugié, ainsi que les conditions d’assistance et les devoirs des institutions nationales comme la CNARR dans la protection des réfugiés.
Or, ni la loi de 2020 ni le décret de 2023 n’ont été réellement suivis d’effet sur le terrain, selon Laurent Ragba Foutour. Lorsque celui-ci a commencé à invoquer la loi 027/PR/2020 pour réclamer ses droits (notamment le rétablissement de l’assistance humanitaire suspendue), il s’est heurté à une fin de non-recevoir de la part de certains responsables. En particulier, il dénonce l’attitude du chargé de la Protection à la CNARR, un certain M. Hamid, présent lors d’une réunion tripartite sur son cas.
Lors d’une rencontre tenue au Ministère de l’Action sociale et des Affaires humanitaires, en présence de représentants du HCR, de la CNARR, de Laurent Ragba Foutour et de sa fille, le représentant de la CNARR a catégoriquement contesté l’applicabilité de la loi d’asile. D’après M. Ragba Foutour, « devant tout le monde, le chargé de protection de la CNARR a soutenu que la loi n° 027/PR/2020 était vide de tout fondement juridique et inapplicable faute de décret d’application ». Il aurait même ajouté : « L’assistance aux réfugiés n’est pas une obligation. Même devant le chef de l’État, je le maintiendrai ». Puis, pour appuyer ses dires, le fonctionnaire aurait distribué sa carte de visite aux participants – un geste perçu par M. Ragba Foutour comme de la provocation, sinon de l’arrogance.
Ces déclarations ont profondément indigné le réfugié, d’autant plus qu’elles sont intervenues alors même que le fameux décret d’application existait depuis des mois. En clair, l’argument du “vide juridique” avancé par le responsable de la CNARR était infondé – soit par ignorance, soit par volonté délibérée de couvrir les agissements du HCR. Laurent Ragba Foutour y voit une trahison de la part d’un représentant de l’État tchadien censé « orienter la politique de l’État en matière d’asile » mais qui prend fait et cause pour le HCR contre les intérêts des réfugiés.
Cette négation de la loi par un cadre national a aussi des relents d’irrespect envers les plus hautes autorités, souligne-t-il. « J’ai considéré les propos tenus par le chargé de protection de la CNARR et par le personnel du HCR comme une insulte et une moquerie à l’intelligence et à la mémoire des dignitaires du pays qui ont adopté et promulgué la loi n°027/PR/2020 », écrit Laurent Ragba Foutour dans une correspondance officielle. En effet, cette loi avait été signée par le Maréchal Idriss Déby Itno quelques mois avant sa mort, puis le décret par son successeur. Ignorer ces textes revient à piétiner la volonté de l’État tchadien lui-même, fait-il remarquer.
Démarches auprès du gouvernement : l’effet d’un article de presse
Face à l’impasse avec le HCR et la CNARR, Laurent Ragba Foutour a multiplié les recours administratifs. Dès 2021 et 2022, il a adressé plusieurs plaintes et doléances au Premier Ministre, au Ministère de l’Administration du territoire (dont dépend la CNARR), ainsi qu’au Ministère de l’Action sociale et Affaires humanitaires (tutelle des questions de réfugiés). Il y exposait sa situation, réclamant la rétrocession de ses droits légaux : la reprise de l’assistance due depuis janvier 2020 (soit un arriéré cumulé de 1 980 000 FCFA à fin juin 2025, correspondant à 66 mois d’allocation à 30 000 FCFA) et la réactivation de la procédure de réinstallation pour lui et sa famille, qu’il estime injustement bloquée.
Pendant longtemps, ces requêtes sont restées sans suite concrète. Mais un tournant s’est produit début 2025, lorsque Corbeaunews-Centrafrique (CNC), média d’information en ligne, s’est emparé de l’affaire. Le 26 février 2025, CNC a publié une première information sur le cas de Laurent Ragba Foutour, révélant publiquement les problèmes auxquels il faisait face et le blocage de la loi d’asile. Cette médiatisation a eu un effet retentissant au sein de l’administration tchadienne : alerté par l’article, le Ministère de l’Action sociale s’est empressé de rechercher le décret d’application manquant et en a retrouvé une copie. La hiérarchie du ministère, semble-t-il, n’était même pas informée que le décret 0648/PT/PM/MATDBG/2023 avait été signé l’année précédente. La diffusion de l’information par CNC a ainsi levé toute ambiguïté juridique : désormais, plus personne ne pouvait prétendre que la loi n°027 n’avait pas force exécutoire.
Dans la foulée, Laurent Ragba Foutour a été reçu au Ministère pour examiner son cas. Toutefois, les changements de personnels compliquent le suivi : « J’ai vu le nouveau Directeur Général du ministère, il vient d’arriver après un remaniement qui a relevé l’ancienne équipe. Il ne maîtrisait pas bien mon problème », raconte le réfugié. Il a dû tout réexpliquer : la genèse de l’affaire, l’attitude du HCR, le *mode de vie précaire qu’il mène en louant une maison sans revenus. M. Ragba Foutour a insisté pour que le Directeur Général prenne attache avec le Directeur de Cabinet du ministre, mieux au fait du dossier car présent lors de la fameuse réunion tripartite.
Effectivement, c’est le Directeur de Cabinet qui va lui proposer une démarche concrète : « Il m’a dit : “Vous avez beaucoup souffert dans vos démarches, il serait souhaitable que vous me présentiez, pour le ministre, une fiche récapitulative de tous vos problèmes. Cela me permettra d’en discuter personnellement avec le ministre afin de vous trouver rapidement une solution.” » Aussitôt, Laurent Ragba Foutour s’est attelé à rédiger cette note circonstanciée, qu’il a déposée officiellement au Ministère et à la CNARR le 9 juillet 2025. Il en a également transmis copie au journaliste de CNC comme pièce justificative.
Ce document, intitulé « Fiche de persécution, de la terreur et de l’intimidation faite aux réfugiés par le HCR (le personnel national) », retrace point par point l’historique de son calvaire. On y retrouve son identité, le détail des événements du 8 janvier 2020 (avec les propos injurieux attribués à M. Blaise), les démarches entreprises auprès des autorités, le verbatim de la réunion au ministère où la loi d’asile a été qualifiée de “vide juridique”, ainsi qu’un résumé cinglant de la situation : « Les propos notoires du chargé de protection de la CNARR et du personnel du HCR prouvent à suffisance la moquerie, l’insubordination et l’insulte à la mémoire des hautes autorités du pays qui ont promulgué la loi 027/PR/2020… Pourquoi des êtres humains persécutés chez eux, venus chercher asile au Tchad au nom du droit international humanitaire, se retrouvent-ils une seconde fois persécutés et intimidés au nom d’un Chef d’État du pays d’accueil ? » interroge-t-il, scandalisé, dans cette note adressée à la Ministre de l’Action sociale.
En un mot, Laurent Ragba Foutour supplie la Ministre d’intervenir auprès du Représentant du HCR au Tchad pour :
- Obtenir le remboursement des arriérés d’assistance qui lui ont été indûment supprimés (1 980 000 FCFA au total de 2020 à mi-2025).
- Appuyer la réinstallation de sa famille dans un pays tiers, de préférence le Canada, estimant que leur sécurité au Tchad n’est plus garantie du fait des menaces et représailles exercées par le personnel local du HCR. « Ma famille et moi sommes sous la grande menace du personnel HCR », écrit-il, redoutant manifestement des représailles physiques ou d’autres types d’abus s’il continue à dénoncer publiquement.
Une famille vulnérable et des réfugiés oubliés : l’appel à l’aide
Alors que cette pétition écrite a été transmise, Laurent Ragba Foutour poursuit ses démarches au jour le jour. « Je m’apprête à retourner au cabinet du ministre pour suivre mon dossier », disait-il encore récemment, déterminé mais anxieux. Chaque jour qui passe aggrave la situation de sa famille : quatre mois de loyer impayés s’étaient accumulés au début de l’été, exposant le foyer au risque d’être expulsé de son modeste logement du quartier Walia à N’Djamena. Sa santé personnelle s’est détériorée, au point qu’il n’a pu consulter ses messages pendant plusieurs jours. La précarité est extrême : « Cela fait presque six ans que ma famille de 11 personnes souffre des griffes du HCR sans aucune assistance alimentaire ni kits de survie », témoigne-t-il, « On nous prive de tout… L’assistance se fait de manière sélective, surtout en faveur des apatrides, tandis que nous, réfugiés centrafricains ayant légalement fui notre pays depuis 2014, sommes laissés pour compte parce que nous n’avons pas les moyens. »
Les Ragba Foutour ne sont malheureusement pas un cas isolé, à l’en croire. D’autres réfugiés au Tchad croupissent dans l’oubli, faute d’argent pour “huiler” les rouages. « Il y a des réfugiés arrivés avant nous qui ne sont toujours pas réinstallés aujourd’hui, faute de moyens. Pendant ce temps, on réinstalle des réfugiés fictifs… » avance-t-il, suggérant que des passe-droits profiteraient à certains (des personnes pas forcément de nationalité centrafricaine, d’où le terme “apatrides”, ou bien des faux réfugiés) au détriment des vrais demandeurs en situation de vulnérabilité. Ce système de favoritisme par l’argent crée une profonde injustice au sein de la communauté réfugiée.
À bout de souffle, Laurent Ragba Foutour en vient à exprimer une détresse existentielle : « Malgré les difficultés en Centrafrique, nous n’avons pas les moyens de repartir au village. Quitte à mourir, autant mourir chez soi que de mourir à l’étranger dans de pareilles conditions », lance-t-il, amer. Ces mots traduisent la perte d’espoir qui le gagne face à l’inaction prolongée des organismes censés le protéger.
Pourtant, il refuse d’abandonner le combat. Constatant qu’au Tchad les démarches judiciaires risqueraient d’être vaines – « Nous ne pouvons pas saisir la justice tchadienne car elle pourrait subir le droit de veto du HCR », pense-t-il – il envisage de porter l’affaire sur la scène internationale. Il a déjà contacté l’Inspecteur général du HCR à Genève par le passé, sans résultat, celui-ci ayant renvoyé la balle vers les autorités du pays d’asile. Si le ministère tchadien n’apporte pas de solution satisfaisante, M. Ragba Foutour se dit prêt à saisir des juridictions internationales compétentes en matière de droits des réfugiés ou de transparence humanitaire.
En parallèle, il mise sur la pression médiatique et diplomatique. Dans un récent message audio, il insistait pour que son témoignage diffusé par CNC parvienne jusqu’au gouvernement tchadien et au Représentant du HCR lui-même. Mieux, il souhaiterait que l’Ambassade du Canada au Tchad, voire le gouvernement canadien, soient informés de sa situation. Car c’est vers le Canada que ses yeux se tournent : il rêve que ce pays, traditionnellement accueillant pour les réfugiés, accepte sa réinstallation afin de donner à sa famille un nouveau départ loin de l’environnement hostile qu’ils subissent actuellement. « Si vous pouvez faire quelque chose pour nous, ce serait merveilleux », implore-t-il à l’adresse des journalistes de CNC et, à travers eux, des décideurs.
Vers la fin du silence ?
L’histoire de Laurent Ragba Foutour met en lumière des dysfonctionnements graves dans la protection des réfugiés au Tchad. Les allégations de corruption, de détournement d’aide et de pressions exercées par certains agents nationaux du HCR, si elles sont avérées, révèlent une fragilité de la gouvernance humanitaire dans le pays d’accueil. Le fait qu’un cadre de la CNARR ait pu déclarer une loi de la République “inapplicable” interroge également sur la coordination entre les autorités nationales et les agences onusiennes.
Il convient de rappeler que le Tchad accueille plus d’un demi-million de réfugiés de diverses nationalités (Soudan, Centrafrique, Nigeria, etc.), et que les besoins humanitaires y sont immenses. Le cas individuel de M. Ragba Foutour et de sa famille vient rappeler que derrière les chiffres, il y a des vies humaines en péril, et que la corruption ou la négligence peuvent tuer tout aussi sûrement que la guerre qu’ils ont fuie. Dans un contexte régional tendu, le Tchad s’honorerait à faire respecter scrupuleusement sa loi d’asile nouvellement adoptée et à punir les éventuels abus commis en son nom ou en celui de partenaires humanitaires.
D’autres pays ont récemment sévi contre les dérives dans l’aide aux réfugiés : Laurent Ragba Foutour cite en exemple le Burkina Faso, où des travailleurs humanitaires nationaux ont été arrêtés pour malversations financières dans la gestion de l’aide aux déplacés. Il en appelle à une prise de conscience similaire au Tchad, afin que nul ne se sente “au-dessus des lois”. « Si ici les humanitaires nationaux pensent qu’ils sont au-dessus de la loi… » dit-il, laissant entendre que le gouvernement devrait agir de la même manière qu’au Burkina en cas de fraude avérée.
En attendant, son sort reste en suspens, suspendu aux décisions à venir du Ministère de l’Action sociale et du HCR. La fiche détaillée qu’il a soumise début juillet 2025 sera-t-elle suivie d’effets ? Le gouvernement tchadien usera-t-il de son influence pour obtenir la levée des sanctions informelles qui frappent cette famille ? Le Représentant du HCR au Tchad donnera-t-il suite à ces accusations graves visant son personnel ? Et surtout, une solution de réinstallation humanitaire sera-t-elle enfin proposée à Laurent Ragba Foutour, pour que ses enfants et petits-enfants puissent retrouver une vie digne et sûre ?
La balle est désormais dans le camp des autorités. Laurent Ragba Foutour, lui, a décidé de ne plus se taire. En brisant le silence, il espère non seulement sauver sa propre famille, mais aussi faire bouger les lignes pour l’ensemble des réfugiés oubliés du Tchad. « On ne nourrit pas le peuple avec des paroles », rappelle-t-il en citant ironiquement l’ancien président centrafricain Jean-Bedel Bokassa. À l’heure où le Tchad dispose enfin d’une loi moderne garantissant les droits des réfugiés, son cas est un test de crédibilité pour les engagements humanitaires du pays. Les prochains jours diront si cet appel désespéré sera entendu.
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