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RCA: La Ouaka entre violences et déchirement social, Alphonse Komoko président d’ARASDO appelle à une mobilisation pour la paix

Alphone Komoko
Alphone Komoko. Photo: Fred Krock /CNC

La Ouaka entre violences et déchirement social, Alphonse Komoko Président d’ARASDO appelle à une mobilisation pour la paix

Le conflit qui a suivi les traces de la Coalition Séléka depuis sa naissance le 12 décembre 2012 dans le Nord s’est focalisé aujourd’hui dans quelques localités du pays dont la préfecture de la Ouaka. Cette localité doit la persistance de sa crise par la cohabitation problématique de trois états-majors armés non-conventionnels, à savoir d’une part celui des anti-balaka, de l’autre l’état-major de Ali Darras et l’état-major de Joseph Zoundeiko. La population prise en étau et se confine dans les ‘’ledgers’’ d’autres dans la brousse et ceux au grand dam des forces internationales présentes sur place, notamment Sangaris et MINUSCA. Une mission de l’Association des ressortissants, amis et sympathisants pour le développement de la Ouaka (ARASDO), conduite par son président Alphonse Blacka Komoko a séjourné dans la Ouaka, notamment dans les villes sous-préfectures de Bambari et de Grimari jugées faciles d’accès, en vue de s’enquérir de la situation sur place et esquisser des pistes d’un retour à la paix, à la cohésion sociale. Alphonse Komoko fait le point dans cette interview exclusive, avant d’annoncer la tenue prochaine de la première Assemblée générale ordinaire d’ARASDO à Bangui.

Corbeau news Centrafrique (CNC) : Alphonse Blacka Komoko, bonjour !

Alphonse Blacka Komoko (ABK) : Bonjour !

CNC : Vous êtes président de l’Association des ressortissants, amis et sympathisants pour le développement de la Ouaka (ARASDO). Que peut-on retenir de votre association en termes de création, d’objectifs et de missions à une période où la préfecture de la Ouaka vit particulièrement au rythme de violences et de déchirement social ?

ABK : De la seule volonté des filles et fils de la Ouaka présents à Bangui est créée ARASDO en date du 26 octobre 2013. Nous sommes partis du constat qu’il y a eu une disparité d’actions dans la Ouaka, à savoir qu’il y a beaucoup d’associations qui mènent des actions qui ne sont pas en cohérence avec elles-mêmes. Et ARASDO s’est voulu une plateforme de concertation entre ces différentes initiatives pour le développement de la Ouaka. Elle rassemble de cet fait toutes les filles et tous les fils de la Ouaka, présents dans le terroir ou à l’extérieur, tous les amis qui ont eu à séjourner dans la Ouaka, ceux qui ont eu à se marier avec les filles et fils de la Ouaka, ceux qui ont étudié ou mené des activités professionnelles dans la Ouaka, sans oublier tous les investisseurs qui veulent intervenir dans la Ouaka. L’objectif de l’association est d’appuyer le gouvernement dans la mise en œuvre de sa politique de développement, à savoir appuyer les communautés de base dans leur structuration, dans leurs projets communaux et préfectoraux ou sous-préfectoraux, dans la vision qu’elles ont du développement de la Ouaka et partant du développement de toute la RCA.

CNC : Quelle est la lecture d’ARASDO sur la situation actuelle dans la Ouaka, notamment en ce qui concerne la sécurité, la cohésion sociale et la reprise des activités socioéconmiques, étant donné justement que vous venez de rentrer d’une mission d’ARASDO dans cette localité, précisément à Bambari et à Grimari ?

ABK : Il faut savoir qu’à un moment donné, la population de la Ouaka s’est tournée vers ARASDO qui est son porte-parole afin d’alerter l’opinion nationale et internationale sur tout ce qui se passe dans la localité. En effet, ce qui se passe dans la Ouaka est dramatique, il y a eu des assassinats, des crimes, des viols et des villages qui sont brûlés, toute la population a fui pour se réfugier en brousse pour les villages ou regroupé dans les sites de déplacés pour les villes. Il n’y a pas de possibilité de développer la Ouaka. C’est justement pour cela qu’après avoir fait un travail d’information et d’alerte de l’opinion nationale et internationale sur la situation qui prévaut dans là-bas, nous, responsables d’ARASDO avons pris la décision de nous rendre dans la localité, notamment à Bambari et à Grimari qui sont un peu facile d’accès pour constater de visu l’état des lieux.

Sur place, nous avons pris notre temps d’abord pour dialoguer avec la population, afin d’inculquer les éléments de base pour un désarmement mental pour favoriser le vivre ensemble. Ensuite, il a été question d’implanter les structures de base d’ARASDO dans les différentes sous-préfectures de la Ouaka – les quelles structures devront relayer nos activités et mettre en œuvre nos projets de développement.

Cependant, le constat fait sur place est amer. Bambari par exemple est divisé en trois parties : d’un côté, la rive droite de la rivière Ouaka occupée exclusivement par des autochtones non-musulmans, d’un autre côté, le centre-ville occupé par Ali Darras avec sa troupe, et un peu plus à l’Est vers la route d’Ippy, le quartier Elevage et la sortie vers Alindao occupé par Joseph Zoundeiko et ses hommes. Même dès notre arrivée, nous avons vécu des événements très tristes qui nous ont très marqués : d’abord, nous avons remarqué que la population de Bambari vit exclusivement dans les sites des déplacés appelé couramment les « ledgers ». Il y a trois ledgers, à savoir celui de l’église Notre Dame des Victoires, celui de la gendarmerie et celui de la base des Sangaris.

A partir de ce constat, nous avons eu à discuter et échanger avec la population qui attendait même notre arrivée, à partir des travaux qui ont été déjà faits au préalable par nos points focaux. C’était une fierté pour la population de voir leurs frères venir de Bangui, malgré la situation sécuritaire encore préoccupante. Nous avons profité pour passer un message de paix et de réconciliation à la population, il ne reste qu’à chercher à approfondir la démarche, puisque la population peulh nous attendait aussi, alors que notre agenda ne nous a pas permis, ce qui a fait que nous n’avons pas pu les rencontrer. Donc, il s’agira de trouver un cadre de concertation pour que chacun puisse dire ce qu’il a dans le cœur, de se vider, afin de nous conduire véritablement à une entente.

CNC : Entre temps, la Présidente de la transition Mme Catherine Samba Panza avait envoyé une mission à Bambari dans l’optique de la délocalisation de l’état-major de la Séléka de Bambari et plus récemment le Président du CNT qui a effectué une mission parlementaire dans la localité a réitéré le vœu de voir cet état-major militaire délocalisé. Quelle est donc la position d’ARASDO qui a également effectué un déplacement à Bambari, afin de constater de visu la situation, et ceci au regard des résolutions du Conseil de sécurité qui prévoient le désarmement forcé des forces armées non-conventionnelles, sans oublier que les forces internationales brandissent les mesures de confiances pour contourner ce désarmement forcé ?

ABK : Il faut tout d’abord dire que la RCA est une et indivisible. Cela veut dire qu’il est inconcevable qu’il ait un autre état-major parallèle sur le territoire, et de ce point de vue, nous sommes entièrement d’accord avec la Cheffe de l’Etat et le président du CNT. A Bambari, l’on sent une division dans un pays où les gens ont toujours vécu ensemble et en harmonie, je fais ainsi allusion à la cohabitation pacifique qui prévalait entre les éleveurs et agriculteurs, les peulhs et non-peulhs, les musulmans et non-musulmans. Aujourd’hui, cette population jadis brassée se confine chacune dans son petit coin avec cette idée de partition qui n’a pas sa raison d’être.

Face à cette situation, nous pensons que les Zoundeiko et autres qui sont centrafricains cessent ce qu’ils sont en train de faire et qu’ils se disent qu’ils sont en train de détruire leur pays. Si Barthelemy Boganda est mort pour l’Unité de ce pays, ce n’est pas nous qui allons le diviser aujourd’hui. D’ailleurs, notre déplacement de Bambari, comme le dit la devise d’ARASDO « Solidarité-Paix-Développement », c’est d’abord de témoigner notre solidarité à la population sans exclusive, parce que nous ne pouvons pas rester indifférents à ce qui se passe dans la Ouaka. Nous allons continuer dans ce sens jusqu’à ce que nos frères des deux camps puissent s’entendre et cesser ce qu’ils sont en train de faire et de s’orienter résolument vers la paix. Nous croyons que lorsque la paix sera là, des investisseurs nous envahiront dans la Ouaka et que chacun aura pour son compte, à travers les projets que nous allons mettre en œuvre.

CNC : Monsieur le Président, ARASDO projette pour bientôt sa toute première Assemblée générale ordinaire à Bangui. Quel est l’enjeu de ces assises ?

ABK : Depuis la création d’ARASDO, le 26 octobre 2013, il est prévu la tenue d’une Assemblée général ordinaire chaque année selon nos Statuts et règlement intérieur, afin de faire le bilan du chemin parcouru. L’année 2013 a été marquée par beaucoup d’événements qui ont fait qu’ARASDO a fonctionné en dents de scie. Mais, il y a eu des percées quand même et des obstacles aussi dont certains ont pu être surmontés d’autres non. Cette Assemblée générale ordinaire sera le moment indiqué pour qu’on puisse s’asseoir et échanger par rapport aux nouvelles donnes, puisqu’aujourd’hui il y a ce problème de partition qui n’a pas sa raison d’être, il y a le Forum de Brazzaville, le Forum de Bangui encours de préparation, autant d’activités qui doivent permettre à la RCA de retrouver sa voie pour aller vers le développement. Donc, nous allons évaluer ce que nous avons déjà fait et ce qui reste à faire, et aussi de déterminer la nouvelle orientation à donner à nos actions.

Il faut se dire que la Ouaka présente plusieurs enjeux qu’ARASDO se propose de mettre en valeur. Parce que la Ouaka, forte de ses cinq Sous-préfectures dont celle de Bakala que les géotechniciens ont trouvé que c’est le centre de l’Afrique. Donc, la préfecture de la Ouaka en tant que centre de l’Afrique centrale est le centre de la RCA. Et c’est le sens que nous avons donné à ARASDO, c’est-à-dire que notre vision ne se limite pas seulement à la Ouaka, car tout ce que nous faisons dans la Ouaka va avoir de répercussions sur le développement de l’ensemble de la RCA et partant dans toute l’Afrique.

CNC : Et si vous aviez un dernier mot…

ABK : Mon dernier mot est de demander à tous ceux amis et sympathisants pour le développement de la Ouaka, et donc du développement de la RCA de s’entendre, mais aussi de venir massivement à l’Assemblée générale ordinaire qui sera convoquée très bientôt. Leur présence va exprimer leur sensibilité aux problèmes du moment, une motivation profonde pour nous autres qui avons lutté jour et nuit pour la cause de la RCA. Les débats à cette occasion, nous l’espérons, doivent être d’un haut niveau, afin que nous trouvions des véritables solutions pour sortir de cette crise.

Propos receuillis par Fred Krock

Corbeau News Centrafrique.

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