CENTRAFRIQUE : BIEN ÉCOUTER, BIEN COMPRENDRE POUR MIEUX AJUSTER DIXIT CHRISTINE LAGARDE.
Bangui, le 29 janvier 2017. 8:51′.
Par : Bernard Selemby Doudou.
UNE PERSPECTIVE, UNE PROVIDENCE OU UNE MÉFIANCE ?
La posture post crise de la Centrafrique est tellement calamiteuse que des mesures urgentes d’accompagnement s’imposent pour retrouver l’équilibre macroéconomique et par voie de conséquence les attributs dignes d’un État du 21eme siècle. C’est la quintessence du périple africain de la Directrice générale du Fonds Monétaire International qui a commencé par notre chère patrie pour finir en Île Maurice en passant par l’Ouganda. De façon liminaire, on se pose légitimement la question de savoir si les États qui font l’objet du déplacement de Madame Lagarde ont des caractéristiques ou similitudes communes.
Cette interrogation d’importance relative ne nous détourne pas des objectifs du FMI. Ce dernier fait partie intégrante des institutions financières de Bretton Woods, qui consiste à prêter de l’argent en échange des conditions en attendant que le pays gagne la confiance des investisseurs privés afin de rétablir l’équilibre économique et financière. Par ailleurs, il faut noter que les institutions financières de Bretton Woods sont des gages, des garanties pour les partenaires et investisseurs privés mais cela passe nécessairement par le volet sécuritaire.
Ne perdons pas de vue que la Directrice du FMI était présente en compagnie du ministre français des finances au sommet extraordinaire des chefs d’Etat de la Communauté Économique et Monétaire de l’Afrique Centrale ( CEMAC ) à Yaoundé au Cameroun où la dévaluation du franc CFA a été évitée de justesse. A l’occasion, elle avait rappelé la fragilité des politiques économiques et financières des États de la sous région et plus particulièrement de la Centrafrique. Après de brillants et solides dossiers présentés par les ministres de l’économie et des finances en amont, et suite à la volonté du FMI de soutenir les efforts entrepris par la Centrafrique, la Directrice générale du FMI a entamé des pourparlers avec de riches échanges avec les autorités locales.
En dehors du politiquement correcte, les autorités centrafricaines ont-elles convaincu Madame Lagarde ? Les sons sont-ils accordés dans les différentes institutions de la République qui l’ont reçu ?
Nous estimons humblement nonobstant la réjouissance débordante des autorités locales que la Directrice du FMI s’est déplacée pour rappeler les engagements de la table ronde de Bruxelles, d’évaluer les progrès accomplis, d’évaluer les courbes de croissance et de définir les conditions, modalités de la mise en exécution de ces engagements. Ainsi, le passage de la Directrice du FMI en Centrafrique est-il une bonne nouvelle ? Est-ce une perspective ? Une providence ou une méfiance ?
Les médias nous présentent ce message comme une aubaine alors que normalement les autorités doivent s’inquiéter car les conditions du FMI sont souvent drastiques, intenables avec des effets systématiques sur le panier de la ménagère. Traditionnellement, le FMI en appuyant les États en crise utilise trois modes opératoires. D’abord le financement des programmes d’ajustement, ensuite une politique macroéconomique visant à resserrer la politique monétaire et enfin des réformes structurelles qui se concrétisent par des mesures pour remédier aux failles des finances, des mesures pour veiller à la diminution des conséquences sociales des réformes et surtout pour prévoir la reprise de la croissance. Il faut reconnaître que l’appui du FMI crée toujours des déséquilibres sociaux. Ainsi, le pouvoir est-il prêt pour faire face aux conditions du FMI ? La politique budgétaire et les efforts accomplis sont-ils adéquats ? Les ingrédients favorables à l’emploi des jeunes et la réduction de la pauvreté sont réunis ? En outre, compte tenu de la situation agonisante de notre pays qui a besoin d’une forte thérapie et en guise de contribution, nous proposons au pouvoir central qu’à défaut d’un plan Marshall, les autorités doivent prendre des mesures correctives au programme pour s’adapter aux exigences du FMI. Ces dites mesures ne doivent pas avoir des effets sur la hausse des prix à la consommation. Le gouvernement doit en outre veiller que les bases de nos finances et économies soient assainies pour prétendre à L’assistance technique des partenaires au développement. Cela passe nécessairement au renforcement de la lutte contre la corruption et les abus sociaux. Nous insistons par ailleurs auprès du gouvernement pour qu’il négocie l’allègement des conditions des programmes en cours d’exécution et enfin de négocier le taux des prêts à court, moyen et long terme. Mais attention, ne le dites à personne. Si on vous demande, ne dites pas que c’est moi.
Paris le 28 Janvier 2017