Centrafrique : Suite du débat public sur les dysfonctionnements constatés à la Mairie de Bangui.
Bangui, le 6 février 2018.
Par : Thierry Simbi, CNC.
Dans un communiqué paru le 2 février intitulé « droit de réponse de la municipalité de Bangui aux allégations alimentées par des agents indélicats de la Mairie de Bangui actuellement traduits en Justice et distillés par le Journal Corbeau News Centrafrique (CNC) », la mairie de Bangui conteste les points avancés dans l’article paru dans le Journal CNC du 30 janvier 2018 (« Quand la gestion de la Mairie de Bangui par Émile-Gros Raymond Nakombo pose question »).
Cet article de CNC avait initialement pour but d’ouvrir le débat sur un certain nombre de dossiers de la délégation spéciale de la ville de Bangui, plus d’un an et demi après la nomination d’Emile-Gros Raymond Nakombo, en mai 2016. Cet article faisait aussi écho à la récente mission de l’inspection d’Etat (certains inspecteurs avaient d’ailleurs été menacés de mort lors de leur mission) et du rapport d’audit remis au chef de l’Etat sur la gestion actuelle de la mairie.
Nous rappelons que les habitants de Bangui veulent simplement une ville propre, fonctionnelle sans tracasseries, dans des conditions de dignité minimales et déplorons être obligé de traiter ces dossiers d’affairisme pour lesquels nous tenons néanmoins à apporter éclairages et précisions.
Existence de caisses parallèles à la caisse publique municipale.
Le 26 Janvier 2018, s’est tenu un procès mettant en cause 11 personnels de la Mairie de Bangui pour détournement de fonds. Nous maintenons bien le fait qu’il a été question lors des audiences de l’existence d’une seconde caisse au cabinet sur instruction du Maire parallèlement à la caisse municipale et que la défense a demandé la mise sous mandat de dépôt de cette caisse noire. Nous attendons fermement le verdict du Tribunal attendu pour le 8 février 2018 pour que lumière soit faite dans ce dossier pour lequel la Mairie a eu bien du mal à se justifier lors de l’audience préliminaire.
Détournements de biens ou fonds publics à des fins privées.
Nous maintenons que Mesdames Stella Yalissou, secrétaire particulière et Noëlla Malingou, aide de camp du maire de Bangui ont bien procédé à des décaissements pour l’achat de deux motos d’une valeur pièce de 680.000 FCFA le 21 Juin 2017. Nous nous interrogeons : est-ce que ces motos sont aujourd’hui utilisées par la mairie de Bangui afin de répondre aux besoins des administrés ? Nous maintenons aussi que le 17 Juillet 2017, un décaissement de 2.500.000 FCFA a été effectué pour couvrir certaines dépenses liées du deuil d’un dignitaire du régime. Nous dénonçons et condamnons par la présente tout détournons de fonds publics à des fins privées.
Société HYSACA Centrafrique.
S’agissant de la Société HYSACA, la Mairie de Bangui indique que « cette Société a été installée dans une partie de l’enceinte de l’annexe municipale des Castors ». Plusieurs questions se posent suite à cet aveu. Qui sont les actionnaires de cette société ? Est-ce qu’un appel d’offre public a été organisé pour que la société HYSACA Centrafrique remporte ce marché ? Est-il normal que cette Société ait été installée dans une partie de l’enceinte de l’annexe municipale des Castors alors que le personnel de la Mairie s’entasse à l’Hôtel de Ville ? Est-ce qu’un loyer est payé par cette société au titre de la location de cette annexe municipale ? Si oui, est-ce ce loyer est reversé dans la caisse municipale ? Nous remercions par avance la mairie de répondre précisément à ces questions.
Recouvrement en marchandises ou en espèces de taxes locales à des fins privées.
Nous maintenons que le système de taxation municipal varie « à la tête du client » et que certains opérateurs économiques locaux se retrouvent étouffés par des nouvelles taxes inventés de toutes pièces la Mairie de Bangui. Nous maintenons que Monsieur Cyril Kockongbandi, chef du service informatique est personnellement chargé à la mairie de Bangui du recouvrement pour le compte du maire Émile-Gros Raymond Nakombo. Nous maintenons qu’en Décembre 2016, un recouvrement d’un million chez RAYAN s’est ainsi transformé en marchandises pour le domicile du Maire qui de la même manière récupère des matériaux de construction auprès des commerçants libanais en échange d’abbatement de taxes locales…. C’est d’ailleurs ainsi que les travaux de réaménagement de l’hôtel de ville ont été effectués… Il est aujourd’hui nécessaire qu’un système de taxation juste et équitable propre à la Mairie de Bangui dans des conditions tarifaires accessibles aux administrés soit connu de tous et que ce genre d’abus cesse.
Voyages intempestifs sur fonds publics.
La mairie conteste que le maire ait effectué un très grands nombre de déplacements à l’étranger depuis sa prise de fonctions. Qualifiant cette accusation « d’affabulation démoniaque » et avançant seulement « une quinzaine de missions effectuées pour l’exercice 2017 ». Le motif avancé est encore et toujours la recherche de partenaires étrangers pour aider la Mairie. Le problème reste pourtant entier car les dépenses engendrées par ces déplacements ne sont pas connues ni justifiées comptablement dans un budget présenté au citoyen banguissois. Comment savoir si ces déplacements ne sont pas en réalité des voyages de villégiature et d’affaires privées sans qu’ils n’apportent précisément quelque chose à la mairie de Bangui et ses administrés ? La seule manière de répondre à cette question est de publier le nombre exact de déplacement à l’étranger effectué par le Maire en 2017 avec les dates, le motif, le budget associé et qui a supporté ce budget. Nous demandons à la Mairie de porter la connaissance de tous les Banguissois un tel document dans un souci de transparence.
Dotation de carburant réservée aux proches collaborateurs du maire uniquement.
Le fait que la dotation en carburant anciennement accordée aux Directeurs et Chef de service permettaient pour se rendre directement au contact des populations dans le cadre de leurs missions ait été supprimée n’est pas contesté par la mairie. La mairie indique que « le Chargé de mission, la Directrice des Services Financiers, le Coordonnateur de Projets etc., n’ont chacun, bénéficié depuis le mois d’octobre 2017 à ce jour que d’une allocation dérisoire d’environ 40.000 F.CFA » Nous maintenons donc que seulement quelques personnes sélectionnées bénéficient de cette dotation et dénonçons la centralisation de ces dotations qui risque d’amener la Mairie à la paralysie…
Hausse de la masse salariale et nominations de proches à la mairie.
La mairie réfute les allégations de hausse de la masse salariale et nominations de proches à la mairie. Nous demandons alors à la mairie de nous éclairer sur le cas de Monsieur Alain Damas Simbo, qui a été nommé à un poste clé des finances à la Mairie de Bangui. Nous rappelons que cet ex-caissier du trésor de Berbérati a détourné plus d’un milliard de francs CFA avant de prendre pris la fuite vers le Cameroun. En deux ans, cet individu a pu construire avec cet argent détourné un motel moderne à Gamboula, une villa à Kenzo au Cameroun, une villa à Berbérati juste derrière le stade ainsi qu’une villa à Bangui rue maman Ndoyo à Galabadja. Nous déplorons que cet individu ait été nommé à la Mairie de Bangui… Nous dénonçons aussi la création de lignes budgétaires portant octroi d’indemnités financières allant de 250.000 à 1.500 000 FCFA dont les bénéficiaires sont Monsieur le Maire de Bangui, la Directrice financière à la mairie de Bangui Madame Elsa-Michaëlle Serdouma, le Receveur Principal Municipal, Monsieur Alain Andjingbo Ndjanga, le Contrôleur Financier, responsable du Budget et de la Comptabilité à la Mairie de Bangui Monsieur Adrien Ouamalandji-Ouonembi ainsi que la caissière Madame Cécile Yanga… Nous appelons la mairie à faire toute transparence sur les cas énoncés.
Bilan du Dossier Cités Unies France et autres conventions signées par la mairie.
La mairie rappelle que la gestion de ce financement est assurée par 3 entités dont CUF à hauteur de 35%, ACTED à hauteur de 30% et la Mairie de Bangui à hauteur de 30% avec un compte bancaire a été ouvert à la CBCA, géré par la Mairie de Bangui pour le pourcentage représentant sa part « correspondant à 142.242 euros, soit un montant de 93.304.635,594 F.CFA » et que « 50% de ce montant ont déjà été consommés ». Comment ce montant a-t-il été consommé ? Quelles ont été les réalisations effectuées avec un tel montant ?
Nous avons par ailleurs appris que le chef de l’Etat avait octroyé 252.000.000 FCFA à la mairie de Bangui pour traiter le sujet de l’assainissement et demandons instamment à la Mairie de Bangui de nous indiquer comment cet argent a été utilisé.
Plus largement, nous demandons solennellement aux membres du Conseil Municipal de la Mairie de Bangui, d’organiser un séminaire d’évaluation sur les conventions et autres accords signés depuis mai 2016 par le Président de la délégation de la Ville de Bangui telle que la Convention signée entre la Mairie de Bangui et avec la société de transport urbain BENAFRIQUE par exemple.
Mise en vente ou location de biens ou terrain publics à des fins privées.
Nous maintenons le fait que la cession du terrain au TERMINUS NORD en face de la Cathédrale Notre Dame à la société Camerounaise TRADEX dans le cadre d’un bail emphytéotique de 99 ans en contrepartie d’une enveloppe de 400 millions FCFA. Pour cela, le maire a voulu expulser tous les contribuables qui ont des kiosques dans la gare. Nous posons à nouveau à la Mairie cette question restée sans réponse : la somme de 400 millions FCFA a-t-elle été versé dans la caisse du publique de la mairie ? De sources dignes de foi, nous savons que cette somme a été partagée dans les poches de certaines personnalités privées à la mairie… Nous signalons par ailleurs une nouvelle fois le cas du terrain à proximité d’UCATEX à TOTAL vendu par le maire alors qu’il appartient à un particulier… TOTAL a dû payer une deuxième fois au vrai propriétaire…
Nouveau système de gestion de la régie publicitaire institué à la Mairie de Bangui. société A3 Group Centrafrique SARL.
Le Maire de la Ville indique envisager réformer le domaine de la régie publicitaire qui « vient d’être confié à un professionnel qui non seulement tirera des profits de ce secteur mais également procédera à de gros investissements pour moderniser le secteur, créer des emplois et embellir la ville de Bangui ». Quel est ce professionnel qui vient de récupérer la régie publicitaire ? A-t-il a été mandaté à la suite d’un appel d’offre public ? Est-ce que la mesure a été décidée en conseil municipal ? Est-ce la société A3 Group Centrafrique SARL dont les PV sont joints à cet article ? Si, oui qui sont les actionnaires et les gestionnaires de cette société ? Quelles sont ses compétences en matière de régie publicitaire. Nous demandons à la mairie de faire la lumière sur cette attribution de marché public.
Le précédent de la CETAC.
Nous rappelons que Monsieur le Maire Emile Gros Raymond Nakombo fut administrateur gérant de la Compagnie d’Exploitation des Tabacs de Centrafrique-Cameroun (CETAC) basée à Gamboula dont la gestion financière fut controversée à cause de l’existence de caisses parallèles, de factures gonflées, de recrutements des proches parents qui n’avaient pas les compétences requises avec des salaires grossiers. Nous rappelons que cette société est tombée en faillite affectant le tissu économique des localités de Gamboula, Sosso Nakombo, Amada-Gaza, Berbérati durement affectées par cette faillite. Il faut d’ailleurs noter que d’anciens cadres de cette société ont été ramenés à la mairie de Bangui. On peut citer par exemple Dieudonné Ayangadoma, ex directeur à de la production à la CETAC ramené à la gestion de la mairie de Bangui.
Dysfonctionnements dans le mode gestion normal de la mairie.
Lors des conseils municipaux, nous déplorons le fait qu’il a souvent trucage aux procès-verbaux de séances. La méthode est la suivante :
- Les membres du conseil municipal arrivent en séance plénière et signent une feuille de présence.
- Une fois la séance plénière terminée, les sujets importants sont débattus en comités restreints, ce qui permet de prendre certaines décisions controversées plus facilement.
- La feuille de présence de la séance plénière est ensuite jointe au procès-verbal arrêté en séance restreinte afin de faire croire que les décisions sont prises après délibération de la totalité des membres du conseil municipal, ce qui dans les faits est faux.
Nous maintenons le fait que le maire a attribué une indemnité mensuelle de 150 000 FCFA le Chef de service du Budget et de la Comptabilité Monsieur Adrien Ouamalandji pour le remercier d’avoir maquillé les chiffres comptables de la Mairie. Nous dénonçons aussi le fait qu’une formation fictive ait été octroyée à Adrien Ouamalandji et Anne-Marie Sankagui (chef de service fiscaliste) d’un montant de 1.000 000 FCFA chacun et demandons à la Mairie toute la lumière sur ce dossier.
Nous nous interrogeons enfin sur le cas précis de ces deux factures adressées à la société MOOV Centrafrique dont le montant initial passe de 14,46 millions à 4,23 millions de FCFA, soit une ristourne de plus de 70%. Nous dénonçons un pot de vin versé par la société MOOV à Monsieur le Maire de Bangui et la Directrice financière à la mairie de Bangui Madame Elsa-Michaëlle Serdouma qui étrangement se trouve être un ancien cadre de la société MOOV Centrafrique.
Nous déplorons qu’à aucun moment, la mairie n’ait rappelé dans sa réponse ses missions principales soit l’assainissement et gestion des déchets, voiries, marchés, maternités, crèches, l’accès à l’eau potable (fontaines publiques), l’état-civil, les pompes funèbres, etc. ni mentionné le souci d’améliorer le quotidien des populations banguissoises administrées…
Nous rappelons que le Maire de Bangui en qualité d’ordonnateur doit rendre compte de sa gestion au Conseil Municipal mais aussi au citoyen Banguissois. Nous attendons beaucoup plus de transparence dans la gestion de la Mairie et souhaitons au plus tôt que lumière soit faite sur ces différents dossiers.