Centrafrique : mise sous tutelle ou anarchie ?
Bangui, le 23 novembre 2017.
Par: Joseph AKOUISSONNE
UN DÉSORDRE INSUPPORTABLE
Bangui : retour à la case départ du chaos sanglant. Des nervis islamistes viennent de signer un lâche attentat à la grenade offensive, lors d’une fête pour la paix et la réconciliation nationale organisée par de jeunes chrétiens et musulmans. C’était un symbole fort de la quête de la paix.
Des tueries à la grenade, à l’aveuglette et sans discernement, sont rarissimes à Bangui. En procédant ainsi, les auteurs de cet acte criminel ne voulaient laisser aucun doute sur leur appartenance à la nébuleuse islamiste.
On aura pourtant tout essayé pour les amener à la raison et les convier aux négociations de paix. Plusieurs de ces criminels, lestés d’un mandat d’arrêt de l’ONU, ont été nommés ministres et conseillers à la Présidence de la République. Rien n’y a fait. Les ex-Sélékas et les autres bandes armées s’arcboutent sur leurs prétentions démesurées. Se sentant proches du pouvoir, ils multiplient les oukases, allant jusqu’à défier le gouvernement légitime en s’opposant à l’installation des Préfets et des Sous-préfets dans les provinces qu’ils devraient occuper et gérer ! Empêcher le déploiement des représentants de l’Etat dans les provinces équivaut à une mise en cause gravissime de l’existence même de la République Centrafricaine.
Cette désorganisation intolérable se fait au nez et à la barbe d’un pouvoir effacé et sans réaction – à telle enseigne qu’on se demande si le pays est encore gouverné. Le plongeon de la République Centrafricaine dans les abîmes de la dislocation paraît inéluctable. Tout se passe dans l’indifférence de la communauté mondiale. Un pays agonise, se meurt, livré aux appétits des séditieux et des prédateurs. Un pays souverain, membre de l’ONU, est tombé dans les griffes de séparatistes, qui agissent au nom de leur religion et ne reculeront devant rien, pas même un bain de sang, pour parvenir au pouvoir à Bangui.
A moins que les forces internationales et les Casques Bleus ne passent à l’action et ne demandent des comptes à ces bandes armées, composées de mercenaires venus du Tchad, du Soudan, du Darfour et du Niger. C’est la crédibilité et la conscience de la communauté internationale qui sont défiées. Les menaces verbales de la MINUSCA, ses gesticulations dans les provinces, l’augmentation du nombre des Casques Bleus – 900 soldats supplémentaires – risquent de ne pas suffire. On ne voit plus, à l’heure actuelle, comment désarmer les rebelles et les amener à la table des négociations.
CONFÉRENCE INTERNATIONALE ET MISE SOUS TUTELLE ?
Il faudra peut-être en passer par là, le cœur serré.
Le chaos sanglant, récurrent et pernicieux, qui s’est abattu sur le pays, n’est pas près de trouver une issue. Au rythme où montent les périls que rien ne semble freiner, devant l’incapacité des forces internationales, malgré leur armada sur place, à ramener la paix, face à un gouvernement qui ne joue pas son rôle protecteur, que faire ? La situation semble inextricable.
Les populations sont abandonnées à leur triste sort. 80% du pays sont envahis et occupés par les rebelles et les mercenaires. Tout laisse présager une dislocation de la République Centrafricaine. Il faudrait que ceux qui gouvernent se ressaisissent et adoptent une autre attitude face aux exigences des rebelles. Mais croire, comme le pense le Premier ministre Sarandji, qu’il suffit de faire les yeux doux aux terroristes et les faire entrer au gouvernement pour avoir la paix, c’est une illusion regrettable. Les ex-Sélékas veulent le pouvoir et bénéficier ainsi de l’impunité – ce qui est totalement inacceptable pour les Centrafricains, qui exigent que la justice passe, et avec rigueur.
Dans l’état actuel catastrophique du pays, seules une conférence internationale et une mise sous tutelle du pays permettront un désarmement effectif des rebelles et un retour de l’autorité de l’État sur tout le territoire.
Déléguer la gestion d’un pays souverain à une entité internationale, constitue, pour des Centrafricains patriotes, une décision douloureuse. Mais s’il faut en passer par là pour sauver la République Centrafricaine, il faut le faire.
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