Touadera, regarde ton armée à Birao : panique et déroute avant même l’arrivée des rebelles

Par la rédaction de Corbeau News Centrafrique, CNC.
Dans la nuit de lundi à mardi, Birao a frôlé le chaos. Une alerte d’incursion rebelle soudanaise a poussé les FACA à abandonner leurs postes, laissant la MINUSCA seule pour sécuriser une ville paralysée par la peur.
Une alerte nocturne qui sème la panique
À 2 heures du matin, un appel urgent des autorités locales a brisé le silence de Birao, ville reculée du nord-est de la Centrafrique. Des guetteurs ont repéré un convoi d’hommes lourdement armés, à bord de motos et de pick-up, à environ 35 kilomètres de la ville, près de la frontière soudanaise. Identifiés comme des rebelles des Forces de soutien rapide (RSF), un groupe paramilitaire dirigé par le général soudanais Mohamed Hamdan Dagalo, alias Hemedti, ces assaillants semblaient se diriger vers Birao. L’information, relayée à la hâte, a déclenché une panique générale.
En quelques minutes, les rues de Birao se sont transformées en un théâtre d’angoisse. Des familles entières, portant des baluchons ou tenant leurs enfants par la main, ont couru vers la base de la MINUSCA, située à la périphérie de la ville. Des témoignages décrivent des scènes de désespoir : une femme a trébuché en tentant de protéger ses deux nourrissons, un vieillard a été soutenu par ses voisins pour rejoindre le camp. Près de 200 personnes en une nuit, selon une estimation des Casques bleus, se sont massées autour de la base, cherchant refuge derrière les barbelés.
Les FACA, une déroute sans combat
Alors que la population cherchait à se mettre à l’abri, les Forces armées centrafricaines (FACA), censées défendre Birao, ont offert un spectacle de désorganisation sidérant. À l’annonce de l’approche des rebelles, encore à des kilomètres, plusieurs soldats ont perdu tout sang-froid. Dans un poste de contrôle à l’entrée nord de la ville, un caporal a été vu jetant son fusil dans un buisson avant de s’enfuir en civil. Un autre, dans la précipitation, s’est accidentellement tiré une balle dans la paume, laissant une traînée de sang sur le sol. Des habitants rapportent avoir aperçu des uniformes abandonnés près de la base de l’armée nationale à Birao, comme si les militaires cherchaient à effacer leur identité avant l’arrivée même des ennemis.
Un sous-officier des FACA, interrogé sous anonymat, a admis que l’alerte avait pris l’unité par surprise. « On nous a dit que les rebelles étaient nombreux, avec des armes lourdes. Personne ne voulait mourir pour rien », a-t-il confié. Parmi ces soldats FACA, certains ont même tenté de se réfugier dans la base de la MINUSCA, frappant aux portes des Casques bleus pour être admis. Ce vent de panique, alors que les assaillants n’avaient pas encore atteint les abords de la ville, a révélé un manque criant de discipline et de préparation de notre armée nationale.
La MINUSCA, rempart face au chaos
Pendant que les FACA s’effilochaient, la MINUSCA a pris les commandes avec une efficacité déterminante. Dès 2 h 30, des véhicules blindés ont quitté la base pour patrouiller les axes principaux de Birao. Des casques bleus, équipés de lunettes de vision nocturne, ont établi des barrages à l’entrée est, là où les rebelles étaient attendus. Vers 4 heures du matin, les Casques bleus ont confirmé que le convoi rebelle, composé des véhicules et des motos, s’était arrêté à 25 kilomètres de Birao, avant de faire demi-tour vers le Soudan.
Cette retraite rapide des RSF reste entourée de questions. Certains observateurs estiment que la présence visible de la MINUSCA a dissuadé les assaillants, qui n’avaient peut-être pas prévu une résistance aussi organisée. D’autres suggèrent que l’objectif n’était pas d’occuper Birao, mais de lancer un avertissement. Quoi qu’il en soit, l’intervention des Casques bleus a permis d’éviter une confrontation directe et de ramener un semblant d’ordre. À l’aube, des patrouilles conjointes avec les Forces de sécurité intérieure (FSI) ont sillonné les quartiers, encourageant les habitants à reprendre leurs activités.
Une vengeance transfrontalière à l’origine de l’alerte
L’incursion avortée trouve ses racines dans un incident survenu quelques jours plus tôt. Selon des sources locales, des mercenaires russes du groupe Wagner, actifs dans le pays pour sécuriser des intérêts miniers, auraient abattu un combattant des RSF lors d’une escarmouche près de la frontière. Les détails restent flous : certains parlent d’un affrontement accidentel, d’autres d’une exécution ciblée. Quoi qu’il en soit, cet événement aurait poussé les RSF à planifier une opération punitive en territoire centrafricain, visant Birao comme cible symbolique.
Les Forces de soutien rapide, nées dans le contexte du conflit au Darfour, sont réputées pour leur mobilité et leur armement lourd, incluant des mitrailleuses montées sur des pick-up Toyota. Leur chef, Hemedti, a consolidé son influence au Soudan, mais ses ambitions régionales inquiètent les pays voisins. La tentative d’incursion à Birao, bien que limitée, rappelle la fragilité de la frontière centrafricaine, longue de 400 kilomètres et quasi impossible à surveiller. Les contrebandiers, les groupes armés et les éleveurs transhumants traversent régulièrement cette zone poreuse, rendant la région vulnérable aux débordements du conflit soudanais.
Une ville sous tension, un retour fragile au calme
Mardi matin, Birao a retrouvé une apparence de normalité, mais la peur reste ancrée. Vers 9 heures, les premiers commerçants ont rouvert leurs étals au marché central, sous le regard de patrouilles de la MINUSCA. Les enfants, privés d’école pour la journée, jouaient timidement dans les ruelles. Pourtant, les conversations tournaient toutes autour de l’alerte nocturne. « Si les rebelles étaient entrés, qui nous aurait protégés ? », s’interrogeait un chauffeur de moto-taxi, pointant du doigt l’absence des FACA.
Les autorités locales, en lien avec la MINUSCA, ont multiplié les messages d’apaisement. Un adjoint au chef de quartier, a sillonné les rues pour appeler au calme. Mais la confiance envers l’armée nationale est au plus bas. « On paie des impôts pour une armée qui fuit », affirme une vendeuse, résumant un sentiment partagé. La MINUSCA, consciente de cette défiance, a promis de maintenir ses patrouilles renforcées pendant plusieurs jours, le temps que la situation se stabilise.
Des questions pour Touadera
Cet incident met à nu les faiblesses des FACA, pourtant au cœur du discours de redressement national porté par le président Faustin-Archange Touadera. Depuis son arrivée au pouvoir, des millions de dollars ont été investis dans la formation et l’équipement de l’armée, avec l’appui de partenaires comme l’Union européenne. Mais à Birao, ces efforts semblent vains. Comment expliquer qu’une simple alerte, sans un seul coup de feu tiré, ait provoqué une telle débandade ? Pourquoi les soldats, censés protéger la population, ont-ils fui avant même de voir l’ennemi ?
Des enquêtes internes sont en cours pour évaluer la conduite des FACA. Un haut gradé de Bangui, contacté par téléphone, a promis des sanctions pour « abandon de poste ». Mais au-delà des punitions, c’est toute la chaîne de commandement qui interroge. Les soldats de Birao, souvent mal payés et déployés dans des conditions précaires, manquent de moyens logistiques. Leurs rations alimentaires sont irrégulières, et ils n’ont pas de véhicule, ni même de motos pour la fuite. Ces réalités, bien connues des habitants, alimentent un fossé grandissant entre l’armée et la population.
Un défi régional et national
Birao, carrefour stratégique près du Soudan et du Tchad, n’en est pas à sa première alerte. La ville a déjà été secouée par des violences impliquant des groupes armés centrafricains, comme le Front populaire pour la renaissance de la Centrafrique (FPRC), ou des tensions liées à la présence de Wagner. L’incursion des RSF ajoute une dimension transfrontalière à ce tableau complexe. Les autorités centrafricaines ont annoncé des pourparlers avec Khartoum pour clarifier l’incident et renforcer la surveillance de la frontière. Mais sans une présence militaire crédible, ces efforts risquent de rester lettre morte.
Pour Touadera, l’épisode de Birao est un avertissement. Une armée incapable de tenir ses positions fragilise non seulement la sécurité nationale, mais aussi la légitimité de l’État. La MINUSCA, bien que précieuse, ne peut pas pallier indéfiniment les carences des FACA. Alors que les habitants de Birao scrutent l’horizon, redoutant un retour des rebelles, une question résonne : quand l’armée centrafricaine sera-t-elle à la hauteur de ses responsabilités ?
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