Sous l’étau de Wagner : crise de commandement et dérive de l’armée centrafricaine
Bangui, 05 janvier 2024 (CNC) – La crise qui secoue en silence l’armée centrafricaine révèle une réalité sombre et complexe, marquée par l’influence grandissante du groupe Wagner. Promesse d’une réforme ambitieuse sous la présidence de Touadera, l’armée se trouve aujourd’hui dans une position de vulnérabilité et de soumission anonymes. L’intrusion de Wagner dans les affaires militaires centrafricaines a non seulement redessiné les lignes de commandement, mais a également érodé le moral et l’efficacité des éléments des Forces Armées Centrafricaines (FACA).
La répression et l’humiliation des officiers:
Le tableau de la dérive de l’armée centrafricaine se dessine à travers les histoires de répression et d’humiliation subies par ses officiers. Des cas comme celui du Colonel Moussa Kitoko, ancien commandant de la zone militaire du nord-Est, illustrent cette descente aux enfers. Mais il n’est pas l’alpha et l’oméga non plus.
- Le commandant Kanga-Ketté, ancien chef du détachement militaire à Gordile,
- le commandant Samba Simon, chef du détachement militaire de l’armée nationale à Bria,
- le commandant Yakoro, le capitaine Selemane, tous deux chefs militaires à Kaga-Bandoro,
- le lieutenant-colonel Rodongo arrêté à Berberati,
- le capitaine Gonda , chef du détachement militaire à Béloko, agression du commissaire de Baboua, et tout récemment
- la Colonel Modoua, commandant de zone militaire du nord-ouest.
Ils ont tous été victimes de traitements dégradants et d’arrestations arbitraires aux mains des mercenaires de Wagner. Ces incidents reflètent une tendance alarmante à l’égard de l’autorité militaire nationale, sapant le respect et la confiance envers l’armée.
L’emprise du groupe Wagner sur l’armée :
L’armée centrafricaine, autrefois symbole de souveraineté et de fierté nationale, se trouve aujourd’hui éclipsée par la présence oppressante du groupe Wagner. Cette force de mercenaires russes, agissant sous le couvert d’assistants militaires, a progressivement infiltré les structures de commandement et les opérations des Forces Armées Centrafricaines (FACA). Cette section se concentre sur l’étendue et les conséquences de cette ingérence étrangère, qui remet en question l’indépendance et l’efficacité de l’armée nationale.
L’influence de Wagner s’étend bien au-delà d’un simple rôle consultatif, s’immisçant dans les stratégies militaires, les affectations de personnel et les décisions tactiques. Des témoignages de soldats et d’officiers révèlent un sentiment croissant de dépossession et de frustration face à cette mainmise étrangère. Les récits d’arrestations et de maltraitances d’officiers par des mercenaires de Wagner, tels que décrits précédemment, ne sont que la partie visible de cette emprise.
L’impact de cette dépendance ne se limite pas aux rangs militaires. Elle pose un défi majeur à la souveraineté nationale de la République centrafricaine, en plaçant des décisions cruciales de sécurité et de défense entre les mains d’une entité étrangère.
Des experts en sécurité et en politique africaine ont été consultés par la rédaction du CNC pour analyser les implications géopolitiques de cette ingérence. Ils soulignent les risques liés à cette dépendance, notamment la perte de contrôle sur les opérations militaires et la vulnérabilité face aux influences extérieures. En outre, ils examinent comment cette situation affecte les relations de la République centrafricaine avec d’autres nations et organismes internationaux.
Le rôle controversé du Chef d’État-Major :
Le Général Zéphirin Mamadou, chef d’État-major des Forces Armées Centrafricaines, est au cœur d’une controverse qui secoue l’armée nationale. Accusé de corruption, de népotisme et de conduite inappropriée, son règne a été marqué par une série de décisions contestées et une gestion discutable. Sous sa direction, l’armée centrafricaine a vu son image et son efficacité sérieusement érodées.
Le comportement du général Mamadou, souvent décrit comme négligeant et excessivement indulgent envers l’alcool, a miné le respect et la confiance au sein des rangs militaires. Sa tendance à traiter les affaires de l’armée comme une entreprise personnelle plutôt qu’une institution nationale a contribué à un climat de désorganisation et de démoralisation.
Plus préoccupante encore est la relation permissive du général Mamadou avec le groupe Wagner. Cette complicité apparente a permis aux mercenaires russes de renforcer leur emprise sur l’armée, sapant l’autorité et l’autonomie des commandants centrafricains. Les actions du général ont ainsi ouvert la voie à une influence étrangère croissante, remettant en question l’intégrité de l’armée et la souveraineté de la nation.
Face à cette situation, l’urgence d’un changement de leadership au sein de l’armée est indéniable. Un tel changement est crucial pour restaurer l’ordre, le respect et l’efficacité au sein de l’armée centrafricaine, et pour assurer la sécurité et la stabilité de la République centrafricaine dans un environnement régional et international complexe.
La timidité de l’État-Major et la soumission de l’armée nationale :
L’état-major de l’armée centrafricaine, autrefois respecté pour sa fermeté et son indépendance, est désormais perçu comme timoré et inefficace. La soumission de l’armée nationale, tant face à l’influence du groupe Wagner que vis-à-vis de ses propres leaders, est devenue une source majeure de préoccupation. Cette passivité a entraîné une perte d’autonomie, où les décisions clés sont désormais influencées, sinon dictées, par des forces extérieures.
La dégradation morale et le déclin de la discipline au sein de l’armée sont palpables. Les soldats, témoins de l’humiliation de leurs officiers et de l’indifférence des hauts commandants, ressentent un profond désenchantement. Leur engagement et leur esprit de corps, autrefois solides, s’érodent face à une hiérarchie qui semble abandonner son rôle de guide et de protecteur.
Cette situation pose un défi critique pour l’avenir de l’armée et, par extension, pour la sécurité et la stabilité de la République centrafricaine. Restaurer l’autorité, le respect et l’efficacité au sein de l’armée est impératif pour maintenir la confiance de la nation en ses forces armées et pour garantir une défense nationale solide et indépendante.
Conséquences et implications pour la République centrafricaine :
La crise au sein de l’armée centrafricaine a des implications profondes pour la sécurité et la stabilité du pays. La présence du groupe Wagner et la défaillance du commandement militaire affectent gravement la capacité de l’armée à assurer la défense nationale. Cette situation met en péril non seulement la sécurité intérieure, mais aussi la souveraineté du pays.
La perte de confiance envers l’armée parmi la population centrafricaine représente un autre aspect critique de cette crise. Le lien traditionnel de respect et de confiance entre les citoyens et leurs forces armées s’effrite, créant un fossé préoccupant dans la société.
Sur le plan politique, l’impact de cette crise militaire est également considérable. La dynamique complexe entre le gouvernement, l’armée et des acteurs externes comme le groupe Wagner influence directement la gouvernance et la souveraineté de la République centrafricaine. Cette situation pose des défis majeurs pour le maintien de la démocratie et de l’état de droit dans le pays.
Face à ces enjeux, la nécessité d’une réponse coordonnée et efficace, tant au niveau national qu’international, est essentielle pour redresser la situation et assurer un avenir plus stable et sécurisé pour la République centrafricaine.
Réflexions sur l’avenir de l’armée centrafricaine :
L’avenir de l’armée centrafricaine est à un tournant décisif. Une réforme profonde est nécessaire pour redresser et revitaliser cette institution. La restructuration des commandements, la mise en œuvre de programmes de formation rigoureux et l’acquisition d’équipements modernes sont essentiels. Il est impératif de renforcer la discipline et le moral au sein des troupes pour rétablir l’intégrité et la confiance en l’armée.
La création d’une force de défense professionnelle et autonome est cruciale. Cette force doit être capable de protéger efficacement la souveraineté et la sécurité nationales, indépendamment des influences étrangères. Le leadership de l’armée doit être revu pour garantir une gouvernance solide et une prise de décision cohérente.
Le soutien international, sous forme d’assistance technique, de formation et de fourniture d’équipement, jouera un rôle clé dans ce processus de transformation. La priorité doit être donnée à la construction d’une armée respectée, bien équipée et pleinement engagée dans la défense des intérêts de la République centrafricaine.
En définitif, la crise au sein de l’armée centrafricaine et son impact sur la société et la politique nationales soulignent la nécessité urgente de réformes profondes et de changements significatifs. L’influence du groupe Wagner, la gestion problématique du commandement militaire, et la dégradation du moral des troupes ont créé une situation précaire qui nécessite une attention immédiate.
Il est essentiel de rétablir l’autonomie, la dignité et l’efficacité de l’armée centrafricaine. Pour cela, une réforme globale, incluant le renforcement de la structure de commandement, la promotion de la discipline et l’intégrité, et le soutien international, est cruciale. Ces mesures redonneront à l’armée la capacité de défendre la souveraineté nationale et de jouer son rôle dans la sécurité et la stabilité de la République centrafricaine.
La situation actuelle de l’armée centrafricaine est un appel à l’action. Elle exige non seulement un engagement national, mais aussi un soutien international, pour assurer un avenir où l’armée peut efficacement protéger et servir son pays. La voie vers la reprise est complexe, mais avec des efforts concertés, il est possible de reconstruire une force militaire respectée et efficace.
Par Alain Nzilo
Directeur de publications
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