Sous la pression de la communauté internationale, le président Touadera ouvre un pré-dialogue avec le BRDC

Rédigé le 04 septembre 2025 .
Par : la rédaction de Corbeaunews-Centrafrique (CNC).
Après trois années de demandes incessantes du BRDC, le gouvernement centrafricain lance enfin un pré-dialogue avec l’opposition démocratique réunie au sein du BRDC.
Le 2 septembre 2025 marque un nouveau départ dans le dialogue politique avec l’opposition démocratique centrafricaine. Dans la salle de réunion de la Primature à Bangui, sur instruction du Chef de l’Etat Centrafricain, Pr Faustin Archange Touadéra alias Baba Kongoboro, les leaders du BRDC ont eu un échange direct avec le Premier ministre, Félix Moloua. Cette rencontre met fin à trois années de blocage politique et ouvre la voie à des négociations pour l’avenir démocratique du pays.
Après plusieurs mois de revendications du Bloc républicain pour la défense de la constitution (BRDC), qui conditionnait sa participation aux élections à l’ouverture d’un dialogue avec l’exécutif, le gouvernement a finalement répondu favorablement. Le BRDC, une coalition d’opposition dirigée par Maître Crépin Mboli-Goumba, avait multiplié les actions citoyennes depuis des mois : une marche pacifique le 4 avril, un giga-meeting prévu pour le 31 mai en défense de la Constitution de 2016, et des prises de position tranchées contre un éventuel troisième mandat du président.
Ont pris part à cette rencontre Me Crepin MBOLI GOUMBA, coordonnateur du BRDC, Me Nicolas TIANGUAYE, Martin Ziguelé, porte-parole du BRDC et autres, ainsi que les représentants de Sainte Edigio, facilitateur de ces négociations. La présence de la Communauté de Sant’Egidio comme facilitateur souligne la dimension internationale de ces pourparlers.
Ainsi, le premier axe de négociation véritable portera sur la Constitution adoptée le 30 août 2023, dont la légitimité est largement contestée par l’opposition démocratique et la société civile. La nouvelle constitution du régime remplace notamment le quinquennat présidentiel renouvelable une seule fois par un septennat renouvelable indéfiniment. Les binationaux se voient par ailleurs interdits de concourir à une élection présidentielle, dont les candidats doivent obligatoirement être “centrafricain d’origine”.
Cette Constitution controversée a été adoptée dans des conditions que l’opposition dénonce. Le pouvoir a mis à la retraite d’office en janvier 2023 la présidente de la Cour constitutionnelle, Danièle Darlan, principale artisane de l’invalidation d’un premier projet. La nouvelle Constitution est par conséquent approuvée à une écrasante majorité de plus de 95 % des suffrages exprimés, dans un contexte de boycott massif de l’opposition qui affirme qu’elle a en réalité été de l’ordre de 10 à 13 %, et que des bureaux de vote ne contenaient même pas de bulletins pour voter Non.
Le BRDC conteste particulièrement la clause d’origine exigeant des candidats qu’ils soient “Centrafricains d’origine et n’ayant que la seule nationalité centrafricaine”. Dans la version finale, il est dit : “Seuls les Centrafricains d’origine peuvent être candidats aux élections législatives, régionales et municipales”, créant une ambiguïté juridique sur l’élection présidentielle.
Le deuxième axe majeur concerne l’Autorité Nationale des Élections (ANE), critiquée pour ses dysfonctionnements. Un expert de l’ONU a averti que l’ANE “est confrontée à de sérieux obstacles opérationnels avant les élections législatives, présidentielles et locales de 2025”.
La situation est inquiétante : “Malgré l’appui multiforme apporté par les partenaires techniques et financiers à l’ANE, des dysfonctionnements internes persistants ont entravé son efficacité, ce qui compromet le respect du calendrier électoral”.
Néanmoins, l’Autorité Nationale des Élections (ANE) de la République centrafricaine a publié la liste électorale définitive en vue des élections prévues en décembre 2025. Le fichier compte 2.398.158 électeurs, dont 757.075 nouveaux inscrits en 2025. Cette publication récente répond partiellement aux préoccupations, mais les élections générales, y compris les élections présidentielles et locales, auront lieu le 28 décembre 2025, laissant peu de temps pour les préparatifs.
Le troisième point de friction porte sur la réforme du Conseil constitutionnel, qui a remplacé l’ancienne Cour constitutionnelle. Auparavant composée de 9 membres nommés dont un respectivement par le président de la République, le président de l’Assemblée nationale et celui du Sénat, et six par les corporations juridiques, la Cour est désormais composée de 11 membres, dont 3 nommés par le président de la République, 3 par l’Assemblée nationale, et 5 par les corporations juridiques.
Cette réforme renforce mécaniquement l’influence de l’exécutif et de sa majorité parlementaire sur l’institution chargée de l’arbitrage électoral, ce que dénonce vigorusement le BRDC qui réclame une composition plus équilibrée et des garanties d’indépendance.
L’ouverture de ce pré dialogue ne doit rien au hasard. Elle résulte directement de la pression exercée par les bailleurs de fonds internationaux qui conditionnent leur soutien financier à un processus inclusif. Le 18 juin 2024, la MINUSCA et le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) ont signé un accord de financement d’un montant dépassant un million de dollars américains pour soutenir les préparatifs électoraux.
L’Union européenne contribuera à hauteur de 14.75 millions d’euros au Fonds Commun multi-bailleurs géré par le PNUD, en devenant ainsi le premier contributeur aux élections. Ce financement international est capital car “le budget électoral actuel, qui ne couvre que les élections locales à six mois des scrutins présidentiel et législatif, doit être réévalué d’urgence pour refléter les réalités opérationnelles”.
Par ailleurs, la République centrafricaine ne dispose pas des fonds nécessaires pour organiser seule ces scrutins groupés. Le président de l’ANE, maître Mathias Morouba, se veut rassurant : “Les élections groupées sont une solution politique que les autorités du pays ont trouvée pour éviter qu’il y ait des élections disparates, sachant que nous avons des difficultés financières”.
La MINUSCA salue ledit processus qui selon elle, est crucial pour la bonne tenue des élections, selon Florence Marchal, porte-parole de la mission. Cette surveillance internationale témoigne des enjeux considérables de ces négociations pour la stabilité régionale.
Pourtant, le climat reste tendu. Les propos récents du porte-parole du gouvernement, l’ex-détenu Maxime Balalou, qualifiant les revendications du BRDC d’“inepties politiques”, ont jeté un froid sur la sincérité du dialogue. De son côté, le Ministre Conseiller Spécial du Président Touadéra, monsieur Fidèle Gouandjika, a vivement critiqué ces opposants qu’il qualifie d’“inaptes”, accusant les leaders du BRDC de “demander un dialogue pour défendre les intérêts des puissances coloniales”.
Les élections de décembre 2025 constituent un défi logistique majeur. L’ANE annonce la tenue d’un scrutin commun le 28 décembre dans le cadre du premier tour des élections présidentielles et législatives, combiné aux élections régionales et municipales. Cette approche vise à optimiser les coûts mais complique l’organisation.
La communauté internationale, notamment le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), joue un rôle déterminant à travers le Projet d’Appui au Processus Électoral en Centrafrique (PAPEC). Ce programme vise à renforcer les compétences techniques de l’ANE et à accompagner la sensibilisation des citoyens.
La situation sécuritaire reste inquiétante malgré les accords de paix.
Ce pré-dialogue représente un test pour la démocratie centrafricaine. “L’achèvement du prochain cycle électoral 2025-2026 est primordial pour renforcer la stabilité institutionnelle”, selon la Représentante spéciale du Secrétaire général de l’ONU.
Les élections locales revêtent une importance particulière car les Centrafricains pourront élire leurs représentants locaux pour la première fois après presque 40 ans. Ces élections locales représentent une “opportunité sans précédent” à saisir pour renforcer la gouvernance et accélérer la réforme du secteur de la sécurité dans le pays.
La réussite de ce dialogue conditionne la participation du BRDC aux scrutins de décembre. Si des garanties écrites sont obtenues sur la Constitution, l’ANE et le Conseil constitutionnel, la coalition acceptera de participer. À défaut, elle maintiendra sa ligne de boycott, risquant de décrédibiliser l’ensemble du processus électoral aux yeux de la communauté internationale.
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