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Sans transition ni serment : La nouvelle Constitution centrafricaine défie  les normes légales

Sans transition ni serment : La nouvelle Constitution centrafricaine défie  les normes légales

 

Remise du projet de la nouvelle constitution par le Président Touadera à son directeur national de campagne Évariste Ngamana dans l'hémicycle de l'assemblée
Remise du projet de la nouvelle constitution par le Président Touadera à son directeur national de campagne Évariste Ngamana dans l’hémicycle de l’assemblée

 

 

Bangui, 18  janvier 2024 (CNC) – La République centrafricaine, un pays souvent éclipsé sur la scène internationale, se trouve à nouveau à un carrefour politique crucial sans issue. L’homme au cœur de cette tourmente, Faustin-Archange Touadéra, dont les actions récentes en matière de réforme constitutionnelle ont suscité une vague de controverses et de critiques. Élu en mars 2016, le président Touadéra a prêté serment sur la constitution de la même année, un document qui semblait à l’époque être un symbole d’espoir et de renouveau démocratique. Cependant, la trajectoire politique de la nation a pris un tournant inattendu avec l’introduction et l’adoption précipitée d’une nouvelle constitution en 2023, un processus marqué par un manque de transparence et de pratiques autoritaires. 

 

Cette nouvelle constitution, loin d’être un consensus national, ont été imposée par les Russes du groupe Wagner au peuple centrafricain sans suivre les normes démocratiques essentielles et la procédure définie en la matière dans la constitution. Très vite, après sa validation par la Cour constitutionnelle tenue par son neveu, le président Touadéra l’a promulgué et dans la foulée, exigé sa mise en application immédiate, sans pour autant qu’il puisse lui-même s’organiser pour y prêter comme l’exige sa loi fondamentale. 

 

Cette approche, perçue par beaucoup comme une manœuvre batelée et dictatoriale, soulève des questions fondamentales sur la légitimité de son administration et l’avenir de la démocratie en République centrafricaine. Cet article se propose de déchiffrer les enjeux de cette situation complexe, en explorant les ramifications politiques, juridiques et sociales. 

  

La nouvelle Constitution : processus et problématiques 

  

En 2023, le peuple centrafricain et la communauté internationale ont été témoins d’un événement politique majeur en République centrafricaine : la proposition et l’adoption d’une nouvelle constitution par le président Faustin-Archange Touadéra. Ce processus, loin d’être un modèle de délibération démocratique, a été entaché de controverses dès ses débuts. Le processus de la rédaction de cette nouvelle constitution, effectuée dans une clandestinité absolue et une relative opacité, a soulevé des inquiétudes quant à son contenu et aux motivations sous-jacentes. 

 

La manière dont la nouvelle constitution a été introduite est révélatrice. Au lieu d’un débat ouvert et participatif, caractéristique des démocraties en bonne santé, le processus a été perçu comme précipité et exclusif. Le texte a été élaboré sans une consultation publique adéquate, écartant de facto des voix importantes de l’opposition et de la société civile. Cette approche a créé un fossé entre le gouvernement et une partie significative de la population, qui se sentait dépossédée de son droit à participer à la vie politique du pays. 

 

L’adoption de la nouvelle constitution a également été marquée par une absence de débat constructif au sein de l’Assemblée nationale. Des critiques ont émergé, le processus parlementaire a été manipulé pour assurer une adoption rapide, sans un examen approfondi des implications de la nouvelle charte. Cette précipitation a renforcé les soupçons d’une tentative de consolidation du pouvoir par le président Touadéra, plutôt que d’une réelle volonté de réformer le système politique pour le bien commun. 

 

La situation a été davantage compliquée par le manque de transparence autour du contenu de cette Constitution. Des questions demeurent sur la manière dont les nouvelles dispositions affectent les droits fondamentaux, l’équilibre des pouvoirs, et la capacité des institutions à fonctionner indépendamment. Cette absence de clarté a alimenté la méfiance et l’incertitude, non seulement au sein de la population centrafricaine, mais aussi parmi les observateurs internationaux. 

 

En somme, le processus d’introduction et d’adoption de la nouvelle constitution en République centrafricaine soulève des doutes sérieux sur son équité et sa légitimité. Cette section a mis en lumière les problématiques entourant ce processus, un prélude aux implications plus larges pour la gouvernance et la stabilité du pays, qui seront examinées dans les sections suivantes. 

  

Non-conformité aux procédures démocratiques : Le manque d’une Transition appropriée 

  

Dans toute démocratie, l’adoption d’une nouvelle constitution devrait s’accompagner d’une transition ordonnée et respectueuse des principes juridiques. Cette transition implique généralement un nouveau serment du président sur la nouvelle constitution et l’adaptation des institutions à ce nouveau cadre légal. Cependant, en République centrafricaine, le président Faustin-Archange Touadéra a marqué une rupture avec cette pratique en omettant d’établir une transition nécessaire après l’adoption de la nouvelle constitution de 2023. 

 

Cette absence de transition pose des questions cruciales sur la légitimité de la gouvernance sous la nouvelle constitution. Le président Touadéra, ayant prêté serment sur l’ancienne constitution de 2016, n’a pas renouvelé son serment sous la nouvelle, créant ainsi un vide juridique et symbolique et surtout, une absence d’obligation de son respect. Cette omission est loin d’être anodine ; elle remet en question la légitimité de son autorité sous le nouveau cadre constitutionnel et sa dévotion aux principes qu’elle énonce. 

 

En outre, le gouvernement et l’Assemblée nationale continuent de fonctionner sans s’être pleinement adaptés aux dispositions de la nouvelle constitution. “ Que les Institutions actuelles doivent rester en place jusqu’à la fin de leur mandat “, une disposition transitoire qui ne cadre pas et ne doit exister. A fait savoir un avocat contacté par la Rédaction.  

 

Cette situation crée un déséquilibre institutionnel et une confusion dans l’administration du pays. Les institutions, qui devraient incarner les principes démocratiques et l’état de droit, se retrouvent en porte-à-faux, opérant sans directives claires adaptées au nouveau contexte constitutionnel. 

 

L’écart par rapport aux normes démocratiques dans l’application de la nouvelle constitution n’est pas seulement un défi juridique, mais porte également des implications politiques significatives. Il génère un climat de méfiance et de scepticisme au sein de la population, et sape la crédibilité du gouvernement tant sur le plan national qu’international. Les actions perçues comme unilatérales et autoritaires du président Touadéra pourraient mener à des tensions politiques et à une instabilité croissante. 

 

Cette non-conformité aux principes démocratiques fondamentaux dans le processus de changement constitutionnel risque de nuire à la confiance des citoyens dans les institutions démocratiques et d’éroder les bases même de la gouvernance démocratique en République centrafricaine. 

  

Réactions et résistances : Opposition face à une Constitution discriminatoire 

  

L’adoption de la nouvelle constitution par le président Faustin-Archange Touadera a déclenché une vive opposition en République centrafricaine, menée notamment par le Bloc Républicain pour la Défense de la Constitution (BRDC) et d’autres groupes de la société civile. Ces entités dénoncent ce qu’elles considèrent comme un coup d’État constitutionnel et une dérive autoritaire. D’emblée, le président Touadera devient un putschiste. Leur critique principale est que la nouvelle constitution, loin d’unifier la nation, contient des dispositions discriminatoires qui marginalisent certaines parties de la population. 

 

L’opposition et la société civile rejettent en bloc cette constitution, la qualifiant de dictature déguisée. Elles argumentent que le texte constitutionnel, en plus de son processus d’adoption controversé, porte en lui des éléments qui sapent les fondements d’une société équitable et inclusive. Ces dispositions discriminatoires sont perçues comme une menace directe à la cohésion sociale et à la stabilité du pays. 

 

La société civile, aux côtés de l’opposition politique, s’élève contre cette approche, affirmant que la nouvelle constitution ne reflète pas la volonté ni les intérêts du peuple centrafricain. Leur résistance est ancrée dans une profonde préoccupation pour la démocratie et les droits humains, soulignant que toute constitution devrait être le produit d’un consensus national et non d’une imposition unilatérale. 

 

Malgré ces critiques et cette résistance généralisée, le régime de Touadéra continue d’appliquer la nouvelle constitution comme si de rien n’était. Cette persistance suggère non seulement un mépris pour le peuple centrafricain, mais aussi un potentiel de conflit accru, menaçant ainsi la paix et la stabilité du pays. 

  

Vers une dictature sous couvert de changement constitutionnel en République centrafricaine. 

  

La situation en République centrafricaine, avec l’adoption et l’application controversées de la nouvelle constitution du 30 août 2023 par le président Faustin-Archange Touadéra, marque un tournant dramatique loin des principes démocratiques. Ce qui est présenté comme une réforme constitutionnelle apparaît de plus en plus comme un coup d’état constitutionnel, une étape vers une dictature déguisée. L’absence de transition démocratique adéquate et de son serment sur cette Constitution d’une part et d’autre part, l’application d’une constitution discriminatoire signalent un abandon de la gouvernance démocratique au profit d’un contrôle autoritaire. 

 

La résistance forte de l’opposition et de la société civile à cette nouvelle constitution est un cri d’alarme contre ce glissement vers une gouvernance dictatoriale. Leur lutte met en lumière les dangers de la marginalisation et de la violation des droits fondamentaux, rappelant que la légitimité d’un gouvernement dérive de son engagement envers la justice, l’égalité et le respect des droits de l’homme. 

 

Dans ce contexte, l’avenir politique de la République centrafricaine apparaît incertain et potentiellement tumultueux. Le régime actuel, en s’éloignant des principes démocratiques et en imposant unilatéralement sa volonté, risque de plonger le pays dans une instabilité accrue. La communauté internationale, les organisations de défense des droits de l’homme et les acteurs démocratiques au sein du pays sont confrontés à un défi majeur : comment réagir efficacement à cette crise et soutenir un retour à une gouvernance respectueuse des droits et des libertés de tous les Centrafricains. 

 

Par Alain Nzilo

Directeur de publications

 

Corbeaunews Centrafrique

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