Russes, FACA et exactions : le Haut-Mbomou sous le joug d’une alliance incontrôlée

Par la rédaction de Corbeau News Centrafrique, CNC.
Dans le Haut-Mbomou, préfecture du sud-est de la République centrafricaine (RCA), les villes d’Obo, Zémio, Mboki et Bambouti sont durement touchées par une insécurité persistante.
Lors de l’émission Patara sur la radio Ndékè Luka, Armando Yanguendji a animé un débat avec Marcel Dimassé, ministre résident du Haut-Mbomou, Dieudonné Ngoumbango, président de la plateforme des partis centristes, et Michel Kombo-Yéki, ancien porte-parole du groupe Azandé Ani Kpi Gbé, pour discuter des affrontements entre les FACA, appuyées par leurs alliés russes, et les miliciens Azandé Ani Kpi Gbé. Ces tensions, amplifiées par une tentative de désarmement au village de Koumboli, situé à 3 kilomètres de Zemio, ont entraîné plusieurs morts, des blessés et des milliers de déplacés.
Des incidents violents attribués aux Russes et aux FACA
Les violences dans le Haut-Mbomou impliquent des opérations menées par les FACA et les forces russes, accusées d’actes graves par les intervenants. À Mboki, un habitant a rapporté que, lors d’un accrochage survenu deux jours avant l’émission, une vingtaine de maisons ont été incendiées par des individus non identifiés. Un civil et un ex-milicien ont été tués, ce dernier enterré à Obo. À Zémio, un chef de village du secteur Faisan, situé à 10 km de la ville, a été abattu le matin de l’émission par des soldats FACA appuyés par des Russes. Selon des sources locales, l’homme a été interpellé à son domicile et a tenté de fuir avant d’être tué par balle.
Michel Kombo-Yéki a également évoqué une intervention russe dans une église, où deux éléments ont été extraits et tués, un acte qu’il a décrit comme ayant eu lieu « au vu et au su de tout le monde ». Ces incidents ont contribué à la fuite d’une grande partie de la population de Zémio vers la République démocratique du Congo (RDC) ou vers l’église catholique de la ville. À Obo, Kombo-Yéki a rapporté que la ville s’est vidée de ses habitants en raison de l’arrivée imminente d’un convoi russe, perçue comme une menace par la population.
Une perte de contrôle dénoncée par les acteurs
Les intervenants de l’émission ont pointé du doigt l’autonomie des forces russes dans leurs opérations. Kombo-Yéki a déclaré : « Les Russes font ce qu’ils veulent », ajoutant que, même en présence d’autorités de la République, les Russes agissent sans contrainte. Il a accusé le gouvernement de les avoir « laissés à la portée des Russes », ce qui, selon lui, aggrave l’insécurité. Dieudonné Ngoumbango a renforcé cette critique, affirmant : « Le gouvernement n’a pas de contrôle sur les Russes ». Il a cité l’exemple des exactions russes comme une cause majeure de la fuite des populations, notamment vers la RDC, en raison de la peur provoqué par ces interventions.
Le ministre Dimassé, interrogé sur les exactions rapportées à Obo et Bambouti, a nié leur existence, déclarant : « Non », à deux reprises. Il a soutenu que les opérations militaires, concentrées à Zémio et Mboki, visent à neutraliser les éléments armés ayant fui dans la brousse. Cependant, il a reconnu des « cas de confusion » lors des affrontements, notamment dans l’identification des civils et des combattants. À propos de l’incident de Faisan, il a expliqué que, dans un contexte de conflit, une personne qui fuit après un ordre d’arrêt peut être perçue comme une menace, justifiant ainsi l’action des forces déployées.
Une stratégie militaire contestée
Les opérations de ratissage menées par les FACA et les Russes ont été au centre des débats. Kombo-Yéki a rapporté que les Russes, accompagnés de FACA, ont attaqué une base d’autodéfenses à Koumboli, distincte de celle des 200 miliciens formés et intégrés dans les FACA. Selon lui, ces autodéfenses, non formées, sont les principales cibles des combats actuels, et non les miliciens officiels, qui se sont repliés à Obo. Il a dénoncé une confusion dans les accusations portées contre son groupe, affirmant : « Les gens qui ont été formés n’étaient pas sur le lieu de l’attaque ».
Ngoumbango a critiqué la stratégie du gouvernement, soulignant que les Russes ont pris des policiers et des gendarmes stationnés en ville pour les engager dans des combats contre les autodéfenses dans la brousse, à Zémio. Cette décision, selon lui, a brouillé les lignes entre forces de l’ordre et combattants, redoublant les tensions. Kombo-Yéki a ajouté que des FACA étaient déjà déployées dans la région avant l’arrivée des renforts actuels, mais que leur rôle était limité à la sécurisation des villes, et non à des opérations offensives.
Une population sous tension
Les conséquences des actions des FACA et des Russes sont visibles dans la vie quotidienne des habitants. À Zémio, les activités restent paralysées, malgré un calme relatif rapporté par l’émission. Les autorités locales et les responsables militaires russes ont appelé les déplacés à rentrer chez eux, mais la peur persiste, alimentée par des incidents comme l’assassinat du chef de village. À Mboki, bien que le calme soit revenu, la tension demeure palpable, avec seulement la moitié des magasins rouverts. À Obo, les services publics, les écoles et le marché ont repris leurs activités, mais la panique causée par les rumeurs d’un désarmement forcé par les Russes a poussé les habitants à se retirer temporairement.
À Bambouti, la population continue ses occupations malgré la tension. Une réunion entre les FACA, le contingent rwandais de la MINUSCA et les habitants a eu lieu pour rassurer la communauté, mais aucun détail sur les résultats de cette rencontre n’a été fourni. L’émission a également signalé la mort de cinq éléments des forces de l’ordre (un policier, deux FACA, deux gendarmes) lors d’une embuscade, ainsi que l’assassinat de deux présidents successifs de la Commission Paix, illustrant la violence qui frappe la région.
Une crise alimentée par des incompréhensions
Le débat a révélé des divergences sur la responsabilité des violences. Kombo-Yéki a accusé le gouvernement d’alimenter l’insécurité en s’appuyant sur des Russes incontrôlés et en ciblant à tort les miliciens formés. Ngoumbango a qualifié la gestion de la crise d’« échec », pointant du doigt l’absence de dialogue préalable et la confusion entre les différents groupes armés. Dimassé, de son côté, a insisté sur la nécessité de redéployer l’autorité de l’État, tout en niant les exactions et en attribuant les violences à des éléments armés ayant fui dans la brousse. Ces divergences, couplées aux opérations militaires en cours, maintiennent le Haut-Mbomou dans un état de crise aiguë….
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