Prisca Mamadou, l’épouse du chef d’état-major, ex-protégée du père Kamach, s’enrichit avec le carburant volé

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Prisca Mamadou, l’épouse du chef d’état-major, ex-protégée du père Kamach, s’enrichit avec le carburant volé

 

Prisca Mamadou, l’épouse du chef d’état-major, ex-protégée du père Kamach, s’enrichit avec le carburant volé
Le chef d’État-major de l’armée centrafricaine, le général d’armées Zéphirin Mamadou. CopyrightDR

 

Rédigé le 25 novembre 2025 .

Par : la rédaction de Corbeaunews-Centrafrique (CNC). 

 En juin 2024, le ministre de l’Énergie Arthur Bertrand Piri signe deux lettres de réquisition qui transforment dix stations-service en distributeurs automatiques de billets pour l’élite militaire et politique centrafricaine. Quatre stations TAMOIL à Bangui passent sous le contrôle de Prisca Rosaline Mamadou. Son nom ne dit peut-être rien au commun des Centrafricains qui font la queue pendant des heures pour obtenir quelques litres d’essence à prix d’or. Mais Prisca Mamadou n’est pas n’importe qui : elle est l’épouse du général Zéphirin Mamadou, chef d’état-major des Forces armées centrafricaines.

 

 

Le général Mamadou ne se contente pas de diriger l’armée. Il est identifié comme l’un des principaux bailleurs de fonds du Mouvement Cœurs Unis, le parti du président Touadéra. L’argent qui finance les campagnes électorales et entretient la machine politique du régime provient directement du carburant vendu dans les stations confisquées à TAMOIL. Le dispositif est d’une simplicité brutale : l’État vole les stations-service d’un opérateur privé et les confie à l’épouse d’un général pour qu’elle les transforme en pompes à fric.

 

Prisca Mamadou n’est pas tombée du ciel dans le secteur du carburant. Ancienne directrice du budget à la gendarmerie sous la direction du général Djadder, et ex-directrice financière au ministère de la Sécurité publique, elle connaît parfaitement les rouages de l’administration et sait comment détourner l’argent public sans laisser de traces. Sa carrière dans les services de sécurité lui a permis de tisser un réseau de complicités indispensables pour gérer des stations-service qui opèrent en violation des règles les plus élémentaires.

 

Les quatre stations confiées à Prisca Mamadou sont les plus rentables de la capitale. Chaque camion-citerne de 35 000 litres revendu dans ces stations rapporte 14 millions de francs CFA, soit 25 000 dollars américains de profit pur. Cette marge pharaonique s’explique par un système de fraude à plusieurs étages. Le carburant arrive via Neptune Oil qui applique des prix gonflés artificiellement. À ces prix déjà excessifs s’ajoutent les taxes et droits d’importation que Neptune Oil ne paie pas grâce aux exonérations frauduleuses accordées avec la complicité des douaniers camerounais et centrafricains.

 

Le carburant exonéré de taxes est ensuite revendu au prix plein à la pompe. Les Centrafricains paient 2,17 dollars le litre de gazole pendant que Prisca Mamadou empoche la différence entre le prix d’achat frauduleux et le prix de vente officiel. Si la moitié des importations de Neptune Oil en 2024, soit environ 1 200 camions-citernes, a transité par les stations confisquées, les bénéfices excédentaires dépassent 30 millions de dollars américains. Une partie de cet argent va directement dans les caisses du MCU pour financer les activités du parti au pouvoir.

 

Le ministre Piri justifie la confiscation des stations TAMOIL par des dettes impayées et une mauvaise gestion. Cette excuse ne trompe personne. TAMOIL a rapidement été écartée du marché après que Neptune Oil a prétendument retardé ou limité ses livraisons, perturbant ainsi les opérations de la société. Le ministre Piriimpute ces difficultés au fait que TAMOIL aurait hérité des dettes impayées de TotalEnergies, mais cette version arrange surtout ceux qui ont orchestré l’éviction de l’entreprise française pour mieux piller le secteur.

 

Les six autres stations confisquées ont été attribuées à Souleymane Bassou, un ressortissant malien entretenant depuis des décennies des liens étroits avec les élites politiques et économiques de Bangui. Bassou est propriétaire d’Inter-Oil Centrafrique, une société qui ne dispose même pas de licence de commercialisation valide selon le registre du commerce centrafricain. Cette anomalie administrative n’empêche nullement ses stations de fonctionner à plein régime et de vendre du carburant au prix fort. Personne ne viendra jamais fermer ces stations pour défaut de licence, car Bassou bénéficie de protections au plus haut niveau.

 

Le rapport de la Global Initiative Against Transnational Organized Crime confirme que ces stations confisquées vendent du carburant provenant d’importateurs non agréés, en violation directe des directives gouvernementales. Le ministère de l’Énergie interdit explicitement l’intégration de ce carburant au réseau officiel de distribution, mais cette règle ne s’applique pas aux protégés du régime. Prisca Mamadou et Souleymane Bassou peuvent s’approvisionner auprès de n’importe quel trafiquant sans craindre le moindre contrôle.

 

Le système de bons d’essence ajoute une couche supplémentaire de corruption à ce dispositif déjà bien établi. Des agences publiques liées au ministère de l’Énergie délivrent ces bons officiels, soi-disant destinés aux besoins opérationnels des forces de sécurité. Les militaires et policiers qui reçoivent ces bons les échangent ensuite contre de l’argent liquide dans les stations confisquées. Les stations versent les espèces aux détenteurs de bons, puis se font rembourser par l’État. Mais entre-temps, une partie de l’argent est prélevée et redistribuée à de hauts fonctionnaires, dont de nombreux membres du MCU.

 

Ce mécanisme transforme les stations-service en bureaux de change où les forces de sécurité convertissent les bons d’essence en liquidités. L’État paie deux fois : une première fois en délivrant les bons, une seconde fois en remboursant les stations. Entre les deux, Prisca Mamadou et ses associés prélèvent leur commission. Les militaires reçoivent leur part pour garantir leur loyauté envers un régime qui les enrichit. Le carburant devient un outil de patronage politique qui permet d’acheter les fidélités et de maintenir le pouvoir par la corruption systématique.

 

La nomination de Prisca Mamadou à la tête des stations les plus rentables de Bangui montre la fusion totale des sphères politique, militaire et économique sous le régime Touadéra. La femme d’un général contrôle des infrastructures stratégiques qui devraient normalement appartenir au secteur privé ou à l’État. Mais dans la République centrafricaine de Touadéra, la distinction entre patrimoine privé et bien public a disparu. Les stations-service confisquées ne servent plus à approvisionner la population en carburant à des prix abordables, mais à enrichir un cercle restreint de privilégiés qui pillent le pays en toute impunité.

 

Le général Zéphirin Mamadou n’apparaît nulle part dans les documents officiels concernant les stations-service. Son épouse est nominalement aux commandes. Cette séparation formelle ne change rien à la réalité : c’est le chef d’état-major des Forces armées centrafricaines qui contrôle quatre stations-service à Bangui et qui empoche les profits générés par la vente de carburant frauduleux. Son ascension au sein de l’appareil militaire s’accompagne d’une mainmise économique qui lie étroitement pouvoir des armes et intérêts financiers.

 

Les Centrafricains qui font la queue sous le soleil pendant des heures au croisement des martyrs pour obtenir du carburant ne savent probablement pas que l’argent qu’ils dépensent à la pompe finit dans les poches de l’épouse du chef d’état-major et dans les caisses du parti au pouvoir. Ils paient 2,17 dollars le litre de gazole, un prix inabordable dans un pays où 70% de la population vit avec moins de 1,90 dollar par jour. Cette situation ne résulte pas d’une simple défaillance du marché, mais d’un système délibérément conçu pour appauvrir le peuple et enrichir l’élite militaire et politique.

 

La confiscation des stations TAMOIL en juin et juillet 2024 marque l’aboutissement d’une stratégie plus large visant à évincer les opérateurs étrangers établis de longue date pour les remplacer par des prête-noms locaux contrôlés par le régime. TotalEnergies, principal fournisseur de carburant du pays depuis 2001, a quitté la République centrafricaine en 2023 après des mois de campagnes de désinformation et d’incidents orchestrés. Ses actifs ont été transférés à TAMOIL, une société britannique contrôlée par le banquier français Enguerrand Rochefort. Moins d’un an plus tard, TAMOIL se fait confisquer ses dix stations par le gouvernement.

 

Le ministre Piri et le président Touadéra ont présenté cette restructuration du secteur comme une réponse à la crise du carburant provoquée par l’invasion russe de l’Ukraine. La réalité montre que cette crise a surtout servi de prétexte pour mettre en place un système de captation des ressources au profit d’un cercle restreint d’acteurs politiquement connectés. Le secteur du carburant a été délibérément restructuré pour maximiser les profits d’intérêts privés tout en appauvrissant l’État et en maintenant des prix exorbitants pour la population.

 

Prisca Mamadou gère ses quatre stations avec l’appui logistique de Neptune Oil qui lui fournit du carburant à des conditions privilégiées. L’accord commercial entre Neptune Oil et les stations confisquées reste secret, mais les initiés du secteur affirment que les exploitants des stations bénéficient de marges exceptionnelles qui leur permettent de s’enrichir rapidement. Neptune Oil facture son carburant à des prix gonflés, mais une partie de ces surprix revient ensuite aux exploitants des stations sous forme de ristournes ou de commissions occultes.

 

Les stations confisquées opèrent en dehors de tout cadre réglementaire normal. Elles ne publient aucun compte, ne paient aucun impôt sur leurs bénéfices réels, et ne sont soumises à aucun contrôle de l’administration fiscale. Le ministère de l’Énergie, qui devrait normalement superviser le secteur, ferme les yeux sur toutes les irrégularités parce que le ministre Piriest lui-même partie prenante du système. En tant que secrétaire exécutif adjoint du MCU, il veille à ce que les profits du carburant continuent d’alimenter les caisses du parti au pouvoir.

 

L’impunité dont bénéficient Prisca Mamadou et Souleymane Bassou démontre que la justice centrafricaine ne poursuivra jamais les profiteurs du système. Les tribunaux sont aux ordres du pouvoir exécutif, les procureurs reçoivent leurs instructions du sommet de l’État, et les juges qui oseraient enquêter sur ces affaires se retrouveraient rapidement écartés ou menacés. Le pillage du secteur du carburant se déroule en plein jour, documenté par les enquêteurs internationaux, mais aucune autorité centrafricaine ne bougera pour y mettre fin.

 

Les dix stations confisquées représentent environ la moitié de l’infrastructure nationale de vente au détail de carburant en République centrafricaine. Leur contrôle par deux individus étroitement liés au sommet de l’État crée un quasi-monopole de la distribution qui étrangle les opérateurs privés restants et empêche toute concurrence. Les rares distributeurs qui tentent de maintenir leurs activités sont confrontés à des difficultés d’approvisionnement orchestrées par Neptune Oil, qui privilégie systématiquement les stations confisquées.

 

Prisca Mamadou incarne parfaitement la prédation d’un régime qui transforme les fonctions publiques en sources d’enrichissement personnel. De la gendarmerie au ministère de la Sécurité publique, puis aux stations-service confisquées, son parcours illustre la trajectoire typique des profiteurs du système Touadéra : occuper des postes stratégiques dans l’administration pour tisser des réseaux de complicité, puis basculer dans le secteur privé pour monétiser ces connexions.​​​​​​​​​​​​​​​​

 

Par Alain Nzilo….

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