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Le Ministre de l‘économie Dr Filakota et le péché  par omission, par l’ancien député Jean-Pierre Mara

Le Ministre de l‘économie Dr Filakota et le péché  par omission.

 

Le ministre Richard Filakota assis à une table de conférence avec des drapeaux en arrière-plan
Le ministre de l’économie et du plan, Richard Filakota . Crédit photo : radio Guira FM.

 

La parution  du 6 Août 2024 d’une rubrique dans Corbeaunews me donne l’opportunité de parler de l’école, du déficit en capital humain et de l’absurdité y relative qui se reflètent dans la qualité des textes administratifs qui circulent de façon permanente sur les réseaux sociaux. Sans vouloir défendre le Ministre, le post me permet de dire que ce dernier a péché par omission en voulant agir par solidarité gouvernementale. La gestion et l’organisation du capital humain n’est pas du ressort de son portefeuille. Il aurait été normal que le Ministre se serve de chiffres. Malheureusement il n’y a ni chiffres ni statistiques pertinentes, alors  c’est compréhensible qu’il ne les connaisse. Je crois que ce sujet relève des multiples secteurs en charge des questions relatives à l’enseignement, à la formation professionnelle à la recherche et à la politique du travail et de l’emploi.

 

(Source de l’article :

https://corbeaunews-centrafrique.org/centrafrique-le-ministre-richard-filakota-segare-dans-un-discours-sans-substance-sur-le-capital-humain/  )

 

L’école de la République Centrafricaine, une institution en réalité fictive, ne répond pas du tout aux besoins de développement du pays. Il n’y a pas où il manque cruellement de stratégie nationale en matière de développement du capital humain et les causes sont endogènes et exogènes. Les racines de cette carence de l’enseignement et de la formation  sont très profondes et les accusations ne peuvent viser un seul Ministre, de surcroît celui de l’économie. Il s’agit  clairement et directement d’une responsabilité collective de longue date, qu’on peut remonter jusqu’à ceux qui ont eu la charge du secteur au sortir de la colonisation.

 

L’école et le Savoir sont restés des mythes depuis l’indépendance.

 

L’école que nous connaissons sous la forme, l’organisation et la structuration actuelle a été introduite par la puissance coloniale, dans le but de la transformation et de l’acculturation du colonisé. Et depuis l’indépendance  à  nos  jours,  la  scolarisation  de  l’enfant Centrafricain  pose  problème,  et  pour  cause  la  sainte maxime de l’assimilation (Voir livre de Jean-Pierre Mara : Oser les Changements en Afrique, cas du Centrafrique, paru au éditions L’Harmattan en 2008)

En République Centrafricaine tout comme dans la plupart des pays africains, l’école ne reproduit pas des connaissances en lien avec le vécu de la population au sens stricte du terme. Si l’éducation est l’ensemble savoir- faire  et  savoir-être nécessaires  à l’intégration  dans une  société,  elle constitue l’ensemble des interventions concourant au développement et  à la  socialisation  de l’individu. Elle  concerne  en premier lieu la transmission  des  savoirs  fondamentaux,  l’apprentissage  de  la  vie sociale et de  la citoyenneté.

 

La formation constitue l’apprentissage par la transmission des connaissances techniques  qui permettront  à un  enfant  ou un  adulte d’acquérir   les   méthodes   de   travail   avant   d’entrer   dans   la   vie professionnelle.  Elle   se  distingue  de  l’instruction,  mais  dans  la pratique, on confond les deux notions. Par elle, on désigne l’ensemble des connaissances théoriques et pratiques qui ont été acquises dans un domaine   donné .   La   limite   entre   l’éducation,   l’instruction   et   la formation est diffuse, parfois floue, étant donné que le mode social d’aujourd’hui délègue les fonctions d’éducation aux écoles. Je parlerai donc  d’éducation  pour  ce  qui  est  du  rôle  de  la  famille  et  de l’enseignement pour ce qui relève de la responsabilité de l’Etat. Or en RCA, on va généralement à l’école pour obtenir des  diplômes  en vue  d’entrer dans la  fonction publique et devenir fonctionnaire.

 

Depuis que la RCA est un pays indépendant et donc souverain, la politique de préparation de la ressource humaine à travers une   formation   scolaire ou universitaire   n’est pratiquée conformément à une politique de développement culturel. Ce qui veut dire que l’enseignement général en RCA n’est pas dispensé pour élever le niveau  de  la  société. S’agissant  alors  de  la  formation  professionnelle, elle n’ est pas organisée  et  dispensée  pour  permettre  au  citoyen    d’acquérir  des connaissances ou des compétences en fonction de la demande locales. Sa structuration vise des domaines de compétences bien spécifiques en conformité avec la puissance coloniale et non pour le développement de la société Centrafricaine. L’enfant centrafricain de la classe de 3eme voir Terminale est-il en mesure de décrire la composition chimique de l’eau en langue nationale le Sango ? Sait-il construire une phrase complexe en français , la langue de son enseignement ?  Peut-il vous dire quelles vitamines sont contenues dans la mangue ? dans les Gougou(champignons) ou dans la farine d’igname ? Append-t-il quelque chose sur la marantassé à l’école ?

Avoir une un capital humain implique que les formations doivent être préparées et conduites par rapport  à  une  politique  définie  à  l’avance dans le but d’améliorer sa production locale afin de la vendre aux autres pays.  Elle doit  aussi  suivre une procédure de prévoyance qui aide à la gestion des ressources humaines nécessaires pour garantir la pérennité et la réussite de la politique de développement préconisée.

Il est urgent de se mettre d’accord sur le fait que l’éducation de l’enfant commence d’abord dans sa famille où il apprend les règles de vie en société. La formation, elle, doit   avoir   lieu   dans   une   structure   d’enseignement   suivant   un programme établi par un organe gouvernemental.

Or en RCA, nous observons que chacun fait ce qui lui passe dans la tête sur le sujet de l’école.  Les partenaires de développement de la RCA organisent des renforcements de capacités dans les domaines qui intéressent leur secteurs d’influence tandis que les ONG instaurent des écoles où elles enseignent ce qu’elles veulent, dans la langue qu’elles veulent, ce que j’appelle pesanteurs exogènes. D’un point de vue endogènes, les programmes des écoles n’ont aucun lien avec un programme de développement précis. Les écoles publiques dispensent les cours sur 4 mois, les écoles privées sur 6 mois, les deux n’ayant pas la même durée d’enseignement ni les mêmes contenus de programmes.

L’inadéquation du modèle scolaire et éducatif se manifeste non seulement par le contenu de l’enseignement mais aussi par les types de filières proposés par les différents cursus.

Dans la recherche de ce qu’il faut oser changer pour adapter l’école à notre société, une question s’impose et   s’articule de façon simple à savoir ‘‘L’école c’est quoi, l’école sert à quoi et finalement que comprenons nous par l’acronyme École ?’’

Si l’école est le lieu d’apprentissage, elle a un outil primaire qui est la langue d’apprentissage. Mais elle a aussi un but ultime qui est  la finalité de ce qu’on y apprend. Dans l’espace qui nous intéresse et qui fait l’objet de cette envie de vouloir oser un changement, l’école telle que nous la connaissons a été introduite à l’époque coloniale, quand les colons avaient une idée bien précise de sa finalité.

Le savoir du guérisseur (médecin) qui transmettait ses secrets non à tous ses enfants mais à celui qui était choisi sur des critères propres au métier n’est plus d’actualité.  Il en est ainsi encore aujourd’hui de tous les métiers d’artisanats et autres. La colonisation dans son élan d’assimilation, a, de façon subtile, graduellement détruit ce système en introduisant son modèle de fonctionnement et suivant ses Intérets.

Retenons que les Centrafricains n’ont pas encore intériorisé le fait que l’individu va à l’école pour apprendre les techniques d’amélioration de sa condition de vie ou bien pour parfaire ce qu’il sais faire.

Il y a quand même une curiosité qu’il faut relever. Toute l’Afrique noire du Nigéria au Congo RDC en passant par le Cameroun, le Gabon ou le Congo pour ne citer que ces pays ont le pétrole et d’autres richesses minières ou forestières. Comment expliquer que ces pays produisent depuis des années du pétrole sans construire une école qui enseignent n’importe quelle discipline en rapport avec l’extraction de ce produit. Il en est de même pour le bois, le diamant et l’or. La RCA vend ses matières premières à l’état brute, sans volonté de les transformer sur place, démarche qui équivaut à création de l’emploi.

En Centrafrique, beaucoup de personnes mange le manioc ou le maïs. Pourtant, on ne trouve aucune école dédiée à l’enseignement des variétés de manioc, là où il serait possible d’apprendre la meilleur façon de planter, de croiser, de traiter les plantes ou tout simplement apprendre la composition des tubercules du manioc et la façon de transformer celles-ci en farine.

Dans la contrée d’origine d’un de mes collègues de lycée, le poisson est abondant dans les cours d’eau. Son père, tout comme tout autre homme ici  est pêcheur. Pourtant il m’a rapporté que ses parents l’ont envoyé à l’école avec un seul espoir; le voir devenir fonctionnaire pour échapper à la vie de pêcheur.  Le père avait peut-être raison. Mais en réalité, c’est le nouveau décideur qui a remplacé le colon qui est le premier responsable de l’Erreur. Si l’école de pèche et de conditionnement existait en RCA, mon ami fils de pécheur serait entrepreneur en conditionnement  et distributeur de poissons séchés, fumés, mis en boite etc..

Ceux des Noirs qui avaient pris le pouvoir au départ du colon n’avaient pas compris comment donner un sens à la notion d’école. Aujourd’hui ces privilégiés qui gouvernent continuent dans l’erreur.

Il nous faut revoir le contenu de l’enseignement de l’école primaire au secondaire et  reprendre l’orientation et les matières enseignées à l’Université de Bangui. Il suffit de lister les thèses de doctorat de cette université pour se rendre à l’évidence que les responsables de cette institution n’ont pas encore saisi le sens profond de l’école et ensuite de  l’enseignement supérieur. Cette remise en cause du sens de l’école mais surtout de l’inadaptation de l’école  aux besoins de développement social de la RCA est le sujet de mon prochain livre a paraître.

En toute humilité et en responsable politique membre d’un parti, je veux exprimer que nous sommes défenderesse d’une nouvelle politique en RCA pour la protection sociale finançable par les assurés avec une garantie de la Retraite pas seulement pour une classe mais pout tout le monde, Bouba Nguéré , Waligara et paysans compris. Notre parti milite pour l’appropriation et la maîtrise d’un savoir-faire qui permettent la transformation de nos produits sur place, suivi d’une démarche marketing et commercial à l’extérieur ; régional et international. Pour ce faire nous remettons en cause le contenu et la qualité actuelle de l’enseignement. Il faut mettre fin à cette irresponsabilité politique et économique du gouvernement qui manque de conscience nationale. La société Centrafricaine a besoin de vision pour la formation des jeunes dans des métiers générateurs de richesses. Ne former les jeunes qu’aux seules métiers Militaire, Police et Douane n’est pas une fin en soi. Nous pensons que c’est une politique qui ne peut pas se financer par des donations  ou avec des partenaires obscures sans volonté d’améliorer les capacités locales.

Pour nous, tout développement du capital humain centrafricain doit s’organiser en partant d’une ambition politique, ou le gouvernement formule clairement des programmes structurés, chiffrés et basés sur la transformation sur place de nos ressources naturelles.   Cela n’est possible que par la réorganisation de la filiaire de l’enseignement technique et professionnel, l’adaptation du contenu des formations et des filières avec des débouchés sur  des emplois générateurs de revenus. Une telle politique est la condition du plein emploi, ce qui a pour effet, une ‘’jeunesse sans chomage’’ donc un avenir meilleur et un développement humain certain.

Nous appelons les jeunes à prendre conscience de cet enjeux et à tourner le dos aux prédateurs, à la politique de manipulation sans vision et sans stratégie de développement du capital humain. Avec la politique actuelle aux visées éternalistes, il n’y a aucun avenir.

Jean-Pierre Mara

Ancien député,

PS :Auteur de :

1-Oser les changements en Afrique, cas du Centrafrique, 2008, l’harmattan

2-Racines croisées :je suis venu, j’ai vu, j’ai vécu 2023, Éditions Baudelaire

3-A paraître Oser les changements en centrafrique : oui nous pouvons

 

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