LE CAMEROUN AU CŒUR D’UN DILEMME JURIDIQUE DANS L’AFFAIRE DU COLONEL SAYO

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LE CAMEROUN AU CŒUR D’UN DILEMME JURIDIQUE DANS L’AFFAIRE DU COLONEL SAYO

 

LE CAMEROUN AU CŒUR D'UN DILEMME JURIDIQUE DANS L'AFFAIRE DU COLONEL SAYO
Colonel Armel Sayo, ancien ministre, patron de la nouvelle coalition des groupes armés en Centrafrique, la CMSPR

 

Par la rédaction de Corbeau News Centrafrique, CNC.

 La notice rouge d’Interpol qui a conduit à l’arrestation du colonel Sayo à l’aéroport de Douala vendredi dernier place le Cameroun dans une position délicate. L’ancien ministre centrafricain, interpellé par la police camerounaise, se trouve au centre d’une procédure où la présence du groupe Wagner en République centrafricaine altère profondément le fonctionnement des institutions judiciaires, obligeant Yaoundé à naviguer entre obligations internationales et pressions régionales.

 

Les documents d’accusation, dont nous avons obtenu copie, dévoilent les contours d’une affaire complexe. Le colonel Sayo est accusé d’avoir dirigé une opération militaire à Markounda, localité de l’Ouham-Pendé située à 605 kilomètres de Bangui. Les rapports d’organisations humanitaires présentes dans la région attestent que cette zone était alors sous le contrôle des mercenaires russes du groupe Wagner ainsi que des soldats FACA, impliqués dans de nombreuses exactions  et pillages.

 

Toutefois, le dossier transmis à Interpol présente une version différente des événements. Les autorités centrafricaines qualifient l’opération des hommes de Sayo contre les mercenaires russes comme une attaque contre les forces de défense et de sécurité intérieure, occultant la présence des mercenaires russes. “La justice centrafricaine transforme systématiquement les actions contre Wagner en crimes contre l’État centrafricain “, analyse un activiste de société civile centrafricaine   qui requiert l’anonymat pour des raisons de sécurité.

 

Cette requalification des faits place la justice camerounaise dans une position complexe. La Convention des Nations Unies contre la torture, ratifiée par le Cameroun, encadre strictement les conditions d’extradition. Un juriste du barreau de Yaoundé explique : “Notre pays ne peut légalement extrader une personne vers un État où elle risquerait des traitements inhumains ou un procès inéquitable“.

 

En outre, les statistiques de l’ONU renforcent ces inquiétudes. En 2023, les observateurs internationaux ont documenté 147 cas d’intimidation judiciaire en République centrafricaine. Ces procédures visent particulièrement les opposants politiques et les leaders communautaires critiques envers les activités du groupe Wagner.

 

Le droit international offre plusieurs options au Cameroun. L’État peut refuser l’extradition vers Bangui et privilégier un transfert vers une juridiction internationale comme la Cour Pénale Internationale. Cette alternative garantirait un procès équitable, éloigné des pressions exercées sur le système judiciaire centrafricain.

 

Selon nos informations, la défense du colonel Sayo s’apprête à déposer une demande de libération sous caution auprès des autorités camerounaises. “Le dossier présente des incohérences majeures qui méritent un examen approfondi”, indique une source proche du conseil du colonel Sayo. La demande souligne notamment l’absence de preuves directes impliquant leur client dans les événements de Markounda, et plusieurs d’autres raisons.

 

L’affaire dépasse le cadre d’une simple procédure d’extradition. Elle démontre les défis auxquels les États africains sont exposés quand la justice devient un instrument politique. Un diplomate ouest-africain en poste à Yaoundé note : “Le Cameroun doit équilibrer ses obligations internationales avec la nécessité de maintenir des relations stables dans la sous-région”.

 

La chambre d’accusation de la Cour d’appel de Yaoundé, qui examine actuellement le dossier, pourrait créer un précédent juridique important. Sa décision définira les limites de la coopération judiciaire quand l’indépendance de la justice du pays demandeur est compromise par des influences étrangères.

 

Des organisations de défense des droits humains suivent l’affaire avec attention. Elles rappellent que certains opposants centrafricains extradés vers Bangui, comme le cas de monsieur Nourd Gregaza,  ont subi des traitements dégradants. Ces précédents renforcent l’importance d’une décision respectueuse des conventions internationales.

 

La présence du groupe Wagner en République centrafricaine a transformé le paysage judiciaire du pays. Un ancien magistrat centrafricain, aujourd’hui à la retraite, témoigne : “Les décisions de justice suivent désormais une logique politique plutôt que juridique. Les droits de la défense sont régulièrement bafoués“.

 

Les prochains jours seront décisifs. La justice camerounaise doit se prononcer sur la demande de libération provisoire, première étape d’une procédure qui pourrait durer plusieurs mois. Cette décision enverra un signal fort sur l’engagement du Cameroun envers les principes du droit international et la protection des droits humains.

 

En attendant, le colonel Sayo reste détenu à Yaoundé, symbole involontaire des tensions entre justice nationale, obligations internationales et influences étrangères qui traversent la République centrafricaine. Sa situation rappelle que l’indépendance de la justice constitue un pilier essentiel de l’État de droit, particulièrement quand des puissances étrangères tentent d’instrumentaliser les institutions judiciaires à des fins politiques.​​​​​​​​​​​​​​​​

 

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