Bangui (République centrafricaine) – Bien que créé depuis 2009, ce n’est qu’en mai 2022 que l’Union africaine (UA) a décidé de mettre en service le comité des sanctions du Conseil de Paix et de Sécurité (CPS). En effet, ce comité est l’instrument tout indiqué pour endiguer les coups d’État et les changements anticonstitutionnels de gouvernement susceptibles de prolonger les mandats des dirigeants en exercice.
Rédigé par Fari Tahéruka Shabazz
Publié par Corbeaunews Centrafrique (CNC), le mercredi 2 novembre 2022
LE BRDC, L’UA, L’ONU ET L’OBLIGATION HISTORIQUES DES SANCTIONS
Dans l’arsenal juridique dont dispose l’UA trois cas bien spécifiques donnent lieu à des sanctions :
💠 Le défaut de paiement des frais de contributions d’un État membre;
💠 Le changement anticonstitutionnel de gouvernement;
💠 Le non-respect des décisions et des politiques de l’UA.
Or, pour les cas de changements anticonstitutionnels de gouvernements, notamment les coups d’État militaires, l’UA s’est toujours montrée offensive et constante dans l’application des sanctions malgré la non-opérationnalité de ce comité. Du moins, en République centrafricaine où à deux reprises -entre 2003 et 2005 et entre 2013 et 2016-, la main de l’organisation continentale n’a pas tremblé.
À l’échelle de la région, cette fermeté a permis la réduction manifeste des coups d’État militaires. Rappelons qu’entre 1960 et 1989, notre continent affichait un désastreux ratio annuel de 2,2 coups d’État, pour tomber dans les années 1990 à 1,6 par an. Entre 2000 et 2019, avec la doctrine de l’impunité zéro contre tout changement militaire anticonstitutionnel de gouvernement, ce ratio n’est plus que de 0,8 par an.
C’est dire l’efficacité des sanctions de l’UA pour éradiquer ou du moins réduire significativement le phénomène des coups d’État militaires. Il faut, par ailleurs souligner que la démarche coercitive de l’organisation multilatérale continentale s’accompagne systématiquement de la mise en place d’un processus de médiation, alliant ainsi sanctions et recherche de solutions.
Aussi, avec l’évolution de la notion de coup d’Etat qui englobe désormais le phénomène dit du “3ème mandat”, il devient vital pour l’UA d’appliquer avec la même sévérité des sanctions ciblées donc intelligentes contre leurs auteurs afin de mettre fin à ces dérives autoritaires et antidémocratiques dans l’écosystème politique africain.
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Quelle panoplie de mesures répressives dont dispose l’UA?
La panoplie de ces sanctions est assez étendue pour être efficace : gel des avoirs financiers, des fonds et autres ressources économiques, interdictions de déplacements à l’étranger, embargo sur les armes, etc.
Et comme le rappellent Thomas Biersteker, Sue Eckert et Marcos Tourinho dans l’ouvrage collectif “Targeted Sanctions. The Impacts and Effectiveness of United Nations Action“, l’objectif des sanctions est de “forcer un gouvernement à changer ou à inverser des politiques existantes ; contraindre le pays ciblé ou ses dirigeants à ne pas engager certaines actions futures ; signaler une insatisfaction à l’égard de certaines politiques, à destination de pays cibles étrangers ou d’audiences domestiques“.
L’ancien Secrétaire Général égyptien des Nation Unies, Boutros Boutros-Ghali, dans la préface qu’il signe pour le livre Orients Stratégiques précise, et ce en relation avec la résolution de l’Assemblée générale des Nations unies du 16 décembre 2009 (A/RES/64/115), que les sanctions “doivent être soigneusement ciblées sur des objectifs précis et légitimes, et appliquées de manière à respecter l’équilibre entre efficacité de la réalisation de ces objectifs et les conséquences néfastes qu’elles peuvent avoir pour les populations et les États tiers, notamment sur le plan socio-économique et humanitaire“.
Ainsi, il semble évident que le BRDC historiquement s’inscrit dans la dynamique de l’UA et l’ONU quand, dans sa conférence de presse du 28 Octobre 2022, cette plateforme de l’opposition démocratique demande des sanctions ciblées contre le régime de Bangui qui manœuvre pour permettre à Faustin Archange Touadéra de se maintenir coûte que coûte au pouvoir en faisant sauter les verrous constitutionnels limitant le mandat présidentiel. Les sanctions intelligentes contre Bangui plus qu’une nécessité sont dès lors une obligation morale et historique que doivent défendre en toute cohérence l’UA, la CEEAC, l’ONU, l’UE et les partenaires techniques et financiers de République centrafricaine.
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