CENTRAFRIQUE : TENTATIVE DE LÉGALISATION D’UN TROISIÈME MANDAT PRÉSIDENTIEL ANTICONSTITUTIONNEL PAR VOIE RÉFÉRENDAIRE.
Bangui, 04 juin 2023 (CNC) — La conspiration cyclique et épisodique du pouvoir de Bangui a atteint son apogée par la matérialisation du décret N* 23.0134 du 30 mai 2023 portant convocation du corps électoral pour le référendum constitutionnel.
En effet, le président de la république a apposé sa célèbre signature au bas d’un décret invitant ses concitoyens à se prononcer le 30 juillet 2023 par voie référendaire sur un projet de révision constitutionnelle.
À titre de rappel, le président de la république, chef de l’état a prêté serment par deux fois sur la même constitution au cours desquelles il a promis de respecter scrupuleusement la loi fondamentale.
La gourmandise du pouvoir, le tapis rouge et le rythme cadencé des sirènes a étouffé la solennelle promesse démocratique au profit d’une monarchie déguisée qui appartient au siècle d’antan.
L’exposé des motifs qui justifie le décret portant convocation du corps électoral viole de façon ostentatoire les exigences constitutionnelles de l’article 90 de la constitution qui impose en plus de la consultation du président de l’assemblée nationale et de la cour constitutionnelle mais également la consultation du président du sénat qui n’existe pas actuellement.
Certains pervers du droit vont s’aventurer à opposer à tort les dispositions de l’article 156 de la constitution qui dispose que : « en attendant la mise en place du sénat, l’assemblée nationale exerce la totalité du pouvoir législatif ».
En outre, les dispositions de l’article 6 de la loi N* 23.003 du 23 janvier 2023 fixant les procédures du référendum en Centrafrique impose que le projet ou la proposition de la loi soumise au référendum soit annexée au décret portant convocation du corps électoral…ce qui n’a pas été le cas.
Il apparaît important de noter que tous les signaux c’est à dire les violations de textes à desseins passibles de crimes de haute trahison prévue par l’article 124 de la constitution, concourent à une troisième candidature anticonstitutionnelle et illégitime à la magistrature suprême même rien n’est formel.
Au regard de ce qui précède, le citoyen lambda s’interroge :
Quelle sera la plus- value de la nouvelle constitution sur le quotidien du peuple ?
Les raisons qui ont justifié le report sine die des élections locales ne sont-elles pas valables pour le référendum ?
Pourquoi le référendum est-il prioritaire alors que les élections locales fondent le développement d’un pays ?
Le peuple fabriqué par les billets de banque du pouvoir de Bangui est-il au dessus de la loi au point de remettre en cause le principe juridique qui veut que la loi s’impose à tous sans exception ?
En l’absence de la mission onusienne à Bangui conformément à la résolution 26-59 du conseil de sécurité de l’ONU, la sécurisation du territoire national est-elle suffisante pour faciliter la transparence d’une élection référendaire ?
Au moment où la légitimité de la cour constitutionnelle et de l’Autorité Nationale des élections est contestée, ce projet funeste et mortifère ne va t-elle pas réveiller les cellules dormantes du mal ?
Enfin, quelles seront les conséquences de cette trahison de trop sur le processus de paix et de réconciliation nationale ?
En tout état de cause, cette énième provocation constitue le point de départ d’une crise aux conséquences imprévisibles alors que dans sa décision du 23 septembre 2022 statuant en premier et dernier ressort, la cour constitutionnelle avait déclaré inconstitutionnel ce projet.
Au demeurant, le pouvoir de Bangui a franchi le rubicon…en conséquence, nous appelons à la résistance et à la désobéissance civile pour contraindre les autorités de Bangui à apprendre à quitter le pouvoir avant que ce dernier ne les quitte.
Avant d’en arriver au seuil du non-retour, nous invitons humblement le pouvoir de Bangui de ne pas écouter les chants de sirènes car au dernier jour, il sera le seul comptable devant le peuple souverain.
N’oublions surtout pas qu’on ne récolte que ce qu’on a semé et que les mêmes causes produisent toujours les mêmes effets…malheur à ceux ou celles qui s’attendent paradoxalement à un résultat contraire.
Mais attention ne le dites à personne. Si on vous demande, ne dites surtout pas que c’est moi.
Paris le 03 juin 2023.
Bernard SELEMBY DOUDOU.
Juriste, Administrateur des élections.
Tel : 0666830062.