Centrafrique : plus de 350 jeunes Centrafricains escroqués dans une vaste fraude au DDR  à Bangui. Environ 60 millions emportés par les escrocs

0
77

Plus de 350 jeunes Centrafricains escroqués dans une vaste fraude au DDR  à Bangui. Environ 60 millions emportés par les escrocs

 

Centrafrique : plus de 350 jeunes Centrafricains escroqués dans une vaste fraude au DDR à Bangui. Environ 60 millions emportés par les escrocs

 

Rédigé le 06 novembre 2025 .

Par : la rédaction de Corbeaunews-Centrafrique (CNC). 

Une véritable arnaque aux allures de trafic mafieux a été démantelée par la gendarmerie dans le quatrième arrondissement de Bangui. Plus de 350 hommes, la tête rasée, ont été retrouvés entassés dans une concession, victimes d’un système de fraude promettant leur intégration dans les Forces armées centrafricaines en échange de 200 000 francs CFA. L’affaire implique un ancien cadre de la milice anti-balaka et des mercenaires russes, démontrant une fois de plus l’ampleur de la corruption qui gangrène les institutions du pays.

 

 

La découverte a eu lieu ce mercredi 5 novembre 2025 dans la concession de M. Ange, située derrière le quartier Kagamoungoulou, à la sortie nord de la capitale. Cet homme n’est pas un inconnu des milieux des groupes armés : ancien coordinateur sous-préfectoral de la milice anti-balaka de Kouango, il entretient des relations privilégiées avec les mercenaires russes qui fréquentent régulièrement son domicile, y prennent leurs repas et mènent avec lui des activités dont la nature exacte reste à éclaircir.

 

C’est dans cette propriété que des centaines d’hommes, tous le crâne rasé, se trouvaient regroupés dans des conditions de promiscuité extrême. La concession débordait littéralement de monde, certains attendant à l’intérieur, d’autres patientant dehors faute d’espace. Chacun de ces hommes avait versé la somme de 200 000 francs CFA, convaincus qu’ils allaient bénéficier du programme de Désarmement, Démobilisation et Réintégration et être intégrés dans l’armée nationale.

 

En effet, l’affaire a éclaté grâce à la vigilance du coordinateur national de la milice anti-balaka. Alerté par la situation inhabituelle dans le quartier Kagamoungoulou, il a immédiatement contacté l’unité DDR pour s’enquérir de cette opération d’envergure. La réponse des responsables du DDR a été sans équivoque : ils n’étaient au courant de rien. Aucune opération officielle d’intégration n’était en cours dans cette zone.

 

Joint au téléphone, le chargé des relations avec les quatorze groupes armés a ordonné l’envoi immédiat d’une équipe de gendarmes sur place pour vérifier les informations. Les forces de l’ordre sont arrivées au moment où l’opération frauduleuse battait son plein. Une partie des victimes se trouvait encore dans la concession de M. Ange, tandis que d’autres étaient déjà en cours de transport vers Nzila, destination prévue dans l’enceinte de la Jeunesse Pionnière Nationale.

 

Le cynisme des organisateurs de cette fraude ne s’arrêtait pas au versement initial des 200 000 francs CFA. Le colonel des FACA chargé de transporter les victimes vers leur destination finale a exigé un paiement supplémentaire de 1000 francs CFA par personne, prétextant l’achat de carburant. C’est précisément lors de cette collecte additionnelle que les gendarmes ont fait irruption, surprenant les escrocs en pleine opération.

 

Les forces de l’ordre ont procédé à plusieurs arrestations. L’épouse de M. Ange, présente sur les lieux, a été interpellée. Le colonel complice a également été arrêté. Quant à M. Ange lui-même, il a pris la fuite.

 

Les révélations les plus inquiétantes concernent l’étendue du réseau impliqué dans cette fraude. Selon les informations recueillies par la rédaction du CNC, des officiers de l’état-major des FACA sont directement impliqués dans le montage de cette arnaque. Plus inquiétant encore, des mercenaires russes ont participé à la manipulation de ces hommes désespérés.

 

Les liens étroits entre M. Ange et les mercenaires russes ne sont un secret pour personne dans les milieux informés de Bangui. Toutefois, cette affaire montre que même au sein de la force russe présente en Centrafrique, il existe des divisions. Certains éléments auraient soutenu l’opération frauduleuse, tandis que d’autres s’y seraient opposés, créant des tensions internes dont l’ampleur reste difficile à évaluer.

 

Cette affaire prend une dimension encore plus scandaleuse quand on la replace dans le contexte général du programme DDR en République centrafricaine. Des centaines d’anciens combattants des groupes armés ont légalement déposé leurs armes et dissous leurs mouvements, conformément aux accords de paix. Ces hommes attendent depuis des années leur intégration dans les forces armées nationales, une promesse formelle qui leur a été faite et qui n’a jamais été tenue jusqu’à ce jour.

 

Le président de la République aurait même donné l’ordre à l’état-major de procéder à l’incorporation de ces ex-combattants, mais jusqu’à ce jour, rien ne s’est concrétisé. Ces officiers et sous-officiers des groupes armés qui ont respecté leur engagement restent dans un vide juridique et professionnel, abandonnés par un État qui refuse d’honorer sa parole.

 

Pendant ce temps, dans une confusion totale, d’autres personnes sont bel et bien intégrées ou envoyées en formation. Quarante éléments du 3R et de l’UPC ont été acheminés vers le Maroc pour y recevoir une formation militaire. Comment expliquer cette sélectivité ? Sur quels critères se base-t-on pour choisir qui sera intégré et qui restera en marge ? Ces questions, personne ne semble en mesure d’y répondre.

 

Cette affaire de fraude massive n’est que la manifestation visible d’un dysfonctionnement profond des institutions centrafricaines. Le vol, les détournements de fonds et les réseaux mafieux prolifèrent dans une impunité totale. Chaque jour apporte son lot de scandales, et pourtant, aucune sanction réelle n’est jamais appliquée. Les responsables, qu’ils soient civils ou militaires, continuent leurs activités en toute liberté.

 

Ainsi, la République centrafricaine s’enfonce jour après jour dans un gouffre où règnent l’anarchie, la corruption et l’impunité. Cette nouvelle affaire, aussi grave soit-elle, risque de connaître le même sort que les précédentes : quelques jours d’émoi, puis l’oubli, sans qu’aucun responsable ne soit véritablement inquiété. Jusqu’à quand le pays pourra-t-il supporter ce délitement de ses institutions et cette prédation généralisée ?​​​​​​​​​​​​​​​​

 

Anselme Mbata