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LA Centrafrique : UN ÉTAT PHÉNOMÉNOLOGIQUE

LA Centrafrique : UN ÉTAT PHÉNOMÉNOLOGIQUE

 

 

Monsieur Robert Enza, l’auteur de l’article. Photo d’archives du CNC.

 

 

 

Bangui, le 10 mai 2018.

Par : Robert Enza, CNC.

 

Quelle société représente-t-elle la RCA aujourd’hui ?

 

Plus d’une cinquantaine d’année ont vu se succéder des présidents de notre pays qui n’ont pas œuvré pour la culture de base qui caractérise et créé une société organisée et moderne, et un peuple.

Des présidents qui n’ont été que présidents et ils n’ont pas été à mesure d’établir un Etat et nous sommes restés un pays aux frontières toujours inconnues. Tous les jours, c’est les bouts de notre territoire qui sont mâchonnés et violés par nos voisins.

Des présidents qui n’ont pas eu de vision ni de la volonté éclairée de gouverner le pays dans un esprit d’une expression de communauté de destin commun, une nation.

Des présidents qui ont laissé les greniers ancestraux se vider de nos valeurs familiales et culturelles avec leurs effets sur le plan politique. Dans l’arrière-pays les chefferies détentrices de pouvoir réel sur les communautés sont toutes détruites.

 

 

Les centrafricains vivent chez eux comme émigrés sans structures sociales de base.

 

Des présidents de la «  bourgeoisie administrative » contemplant leur pouvoir comme étant un mérite personnel.

La bourgeoisie administrative, cette nouvelle idéologie a gagné toute la fonction publique.

La bourgeoisie administrative a poussé d’autres à la création de partis politiques et d’associations civiles, pour toile de fond la « pauvreté », tous indiscutablement nomades, c’est la stratégie d’être politiquement correct.

Des présidents qui n’ont eu pour préférence, leur pouvoir et leurs intérêts personnels. Des présidents qui ont coulé la gestion de la République et de ses frontières censées protéger les droits d’un peuple et lui permettre une meilleure reconnaissance juridique et respect vis à vis des autres territoires, d’autres peuples.

Cinquante ans d’incapacité et de d’incompétence, une double déficience intellectuelle à la gestion d’un Etat.

De leurs gouvernements, il n’ont pas mis sous contrôle et ni sous surveillance : l’administration, la justice, l’éducation, la santé, la sécurité et la défense, la vie publique et économique, le bien-vivre de la population, aux conséquences aujourd’hui désastreuses.

Des présidents qui ont plongé davantage le pays dans la pauvreté, le désespoir, et la déréliction d’un peuple réduit à vivre à l’état d’indigénat.

Le 24 mars 2013 a été la grande fracture sociale et le drame d’un Etat débilité par les irresponsabilités et les distractions de ses présidents.

La RCA, une société explosée, saccagée, dispersée, et errant. Une société « butin » et « martyr » des groupes armés qui peine à poser la problématique d’un rassemblement et de la mise à nouveau en commun des intérêts.

Une société qui n’a plus de repères, elle ne reçoit plus, ni des politiques, ni des religieux, ni des éducateurs, ni des familles.

Une société où les acteurs vérifiés et les acteurs non vérifiés de cette guerre qui tue, agissent de connivence dans leurs intérêts ; ils ont réduit et rendu l’Etat impuissant voire artificiel.

Cette guerre est indiscutablement le produit d’une théorie de complot, une guerre qui vit sur le corps des centrafricains où un nombre qu’on ne peut plus calculer de femmes, d’enfants et surtout des innocents, y ont laissées leurs vies.

La RCA, ce petit pays, de par sa position, est stratégique pour les grandes puissances et son sol riche est un terrain de tous les enjeux économiques étrangers.

Une société qui vit désormais dans une espèce d’incohésion idéologique et religieuse, corrélée par une médiocrité intellectuelle telle qu’elle a porté des déficiences à tout son système éducatif et productif.

Une société où le poids de l’analphabétisme et de l’illettrisme est beaucoup trop lourd rendant ses habitants plus que jamais pauvres et difficile à l’ouverture d’esprit.

Comme toute guerre, elle profite à un petit nombre d’individus tous dégoutants: groupes armés, groupes trafiquants, groupes politiques et mafieux, groupes religieux, groupes commerçants, groupes d’intelligence stratégico-économique, etc…

Une société où l’amour de l’argent éclairerait l’incapacité des élites centrafricaines à s’interroger sur les dégâts de cette « guerre rentable » dont les tenants et les aboutissants se moquent de la souffrance de nos populations.

Il suffit de fixer les yeux sur le chômage, la mortalité, le libertinage, la déscolarisation des enfants et des jeunes et la destruction des villages dans l’arrière-pays pour comprendre la souffrance quotidienne du peuple Centrafricain et l’ampleur de cette tragédie qui se joue sur des apparences de ce moment : le stoïcisme d’un peuple en tout cas.

Une société réduite à l’état de consommation. Une société des « gens qui ne cherchent qu’à manger » plutôt, pour ne pas dire « des gens qui ne sont rien »  si cher à  Macron.

Les jeunes ne voient plus d’issues. Les éducations et les idéologies politiques ne les intéressent plus. Ils expriment leur préférence pour la matière et non pour les idées qui stimuleraient le potentiel de créativité et de l’innovation qui somnolent en eux.

La RCA, une société qui n’a plus l’analyse de son écosystème. Notre pays est dans une espèce de situation phénoménologique.

 Le phénomène tel que, nous le décrivons est même constatable dans les administrations publiques et comme dans les entreprises privées.

Dans le secteur privé, les entreprises ne produisent plus rien par défaut de créativité et d’innovation ou par manque de pouvoir d’achat des centrafricains.

Les résultats déficitaires de leurs activités qui s’accumulent, les désactivent de la catégorie d’agents économiques, y compris les sociétés d’état en crise de critères de gouvernance ; elles même qui gèrent une part importante de la propriété de l’État.

Dans le secteur public, l’activité de l’État qui se déroule dans des institutions entièrement dépassées souffre inopportunément d’insuffisance de mécanisme de contrôle, de surveillance et de bonne gouvernance.

Ainsi, les actifs publics mis à la disposition des administrations sont dilapidés dans des activités peu évidentes voire insignifiantes ; pendant ce temps les activités publiques à valeur sociale, fondamentale comme l’éducation et la santé sont quasiment à l’abandon.

La corruption, la rétribution, la cooptation, l’incompétence, l’injustice, l’indélicatesse et les arrangements de tout bord, tout cela constitue un système qui tue l’État.

L’État ne se redressera jamais tant qu’on n’aura pas mis en place une grande reforme de l’État et instituer une gestion publique participative et d’inclusion sociale, un moyen pouvant garantir l’efficacité de l’action publique et asseoir un État-nation.

Le moment est venu de prendre conscience des errements du passé, de s’engager et agir.

 

Robert ENZA, la route de la dignité.

 

 

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