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Que deviendrait la dette de l’UMP si le parti disparaissait ?

1. Le contexte : et si l’UMP disparaissait ?

Le jour des comptes est arrivé. Mardi 8 juillet à 18 heures, les cadres du parti dévoilaient lors d’un bureau politique les résultats de l’audit financier sur la dette de l’UMP – 76 millions d’euros pour l’exercice 2013. Cela représente 20 millions de moins qu’en 2012, année de tous les records et de toutes les interrogations. Mais le déficit est toujours colossal pour un parti dont les rentrées d’argent sont évaluées à environ 46 millions d’euros en 2013.

 

Alors que les dirigeants devront donner des gages aux banquiers dans la journée (et peut-être placer en garantie les subventions futures de l’Etat, le siège du parti étant déjà hypothéqué), des voix se sont élevées pour des changements plus radicaux. Certains, comme Christian Estrosi, député-maire de Nice interrogé par Le Parisien, plaident pour un changement de nom :

« Nous ne pouvons pas faire autrement que de changer de nom. Ce n’est pas une restructuration avec un congrès a minima qu’il faut, mais une véritable révolution ! »

D’autres espèrent même faire disparaître l’UMP fondée en 2002. Ainsi, Xavier Bertrand, député-maire de Saint-Quentin et secrétaire général du parti entre 2008 et 2010, interviewé sur France Info :

« Je pense qu’il faut définitivement tourner la page de toutes ces pratiques du passé, beaucoup d’argent circule en politique, beaucoup, mais sans aucune transparence, sans aucun contrôle. Pour cette nouvelle UMP que je souhaite : il faut une nouvelle formation politique. »

Ces déclarations visent avant tout à redynamiser politiquement un parti sapé par ses conflits et ses affaires. Mais que deviendrait la dette de l’UMP si cette dernière disparaissait ?

2. Qui est responsable juridiquement de la dette de l’UMP ?

Au cœur de la complexité des affaires de l’UMP, cette question est une des plus épineuses.

Dans la loi, tout paraît pourtant simple. Comme tous les autres partis politiques en France, l’UMP est une association loi 1901. Elle est donc soumise à la même législation que toutes les associations. « Selon les statuts de l’UMP, le président représente le parti dans tous les actes de la vie civile, ce qui inclut nécessairement la signature de contrats, le règlement de factures et implique également d’en assumer les conséquences, à moins qu’il n’y ait eu délégation de pouvoirs », explique Jean-Christophe Ménard, avocat et spécialiste du droit des partis politiques. Elu par les adhérents, il est donc responsable de la dette devant les créanciers.

 

Responsable mais pas forcément coupable. En déposant plainte en son nom (ou alors après le dépôt d’une plainte par un adhérent ou par un créancier comme une banque) et lors d’un procès pénal, le président d’une association peut éventuellement mettre en cause la gestion de ses prédécesseurs ou de la personne à qui il avait délégué son pouvoir de décision. C’est d’ailleurs la défense de Jean-François Copé lorsqu’il a affirmé le 26 mai sur BFM-TV qu’il n’était pas impliqué dans la gestion quotidienne des finances du parti. Lors d’un procès, la justice peut également conclure que le parti a subi une escroquerie ou un abus de confiance (par un candidat par exemple ou par une entreprise) qui a amené le parti à dépenser plus que de raison. Le président peut alors être exonéré de ses responsabilités. Mais c’est à la justice d’en décider après une enquête.

 

Mais qui préside l’UMP et est donc responsable de la dette ? Depuis le bureau politique du 10 juin et l’éviction de Jean-François Copé, l’UMP n’a plus de président et s’est donné six mois pour en élire un nouveau. Le triumvirat des anciens premiers ministres, François Fillon, Alain Juppé et Jean-Pierre Raffarin, a pris les manettes sans avoir le statut de président, et Luc Chatel n’est que secrétaire général par intérim. A l’UMP, on est d’ailleurs pour le moment bien incapable de dire qui a la responsabilité juridique de ce passif. Le nouveau président élu à l’automne héritera en tout cas de la dette de ses prédécesseurs.

3. Le changement de nom ? Une décision du parti qui ne change rien

Que deviendrait la dette de l’UMP si le parti était rebaptisé ?  « Le changement de nom est une décision du parti qui ne change strictement rien aux créances dues par l’UMP et aux responsabilités éventuellement encourues », analyse Jean-Christophe Ménard.

 

Si politiquement le changement de nom a un sens, puisqu’il permet d’effacer un acronyme jugé trop pesant, il ne règlerait rien au problème financier : la dette continuerait donc à plomber les finances de l’ancien UMP dont les ex-dirigeants seraient toujours responsables.

4. La création d’un nouveau parti ? Une dissolution de l’association, pas des créanciers

Et si l’UMP disparaissait pour laisser sa place à une nouvelle entité ? Cette éventualité passerait par une dissolution de l’association.

Deux voies seraient possibles. La première est celle d’une dissolution volontaire. Les statuts de l’UMP prévoient que la dissolution du parti est votée par les adhérents réunis en congrès, sur proposition du bureau politique. « Les opérations nécessaires à la liquidation du parti (évaluation et vente des biens, paiement des créanciers, actions éventuelles en justice, etc.) seront ensuite effectuées soit par les dirigeants du parti soit par un liquidateur désigné par l’UMP. Si le parti est dans l’incapacité de prendre une telle décision, un curateur pourrait alors être désigné par le juge », détaille Me Ménard. La vente du siège du parti, évalué entre 40 et 50 millions d’euros, serait alors inévitable.

 

L’autre hypothèse est celle d’une dissolution judiciaire. Une voie imposée si un créancier saisit un tribunal pour recouvrir une partie de la somme qui lui est due et que le parti est incapable de payer. Dans ce cas-là, la procédure est plus contraignante pour le parti, puisque le juge nomme de lui-même un liquidateur judiciaire chargé de faire l’inventaire des actifs et des passifs. Mais les responsables de l’UMP ne seraient pas exonérés. « Pendant toute la période de liquidation, le parti et ses organes conservent leur personnalité juridique et leur responsabilité peut toujours être engagée », poursuit Jean-Christophe Ménard. La dette risque donc de poursuivre longtemps les dirigeants de l’UMP.

  • Matthieu Goar
    Journaliste au Monde

 

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