Mort du djihadiste Abou Walid al-Sahraoui… et après ?
Bangui ( République centrafricaine ) – L’annonce de la mort du leader du groupe “Etat islamique dans le grand Sahara” est considéré comme un coup dur pour son mouvement. Mais, elle ne met pas fin aux attaques djihadistes.
Adnan Abou Walid al-Sahraoui, qui était la cible “prioritaire” de la France et de ses alliés au Sahel, aurait trouvé la mort entre Ménaka, dans l’est du Mali, et l’autre côté de la frontière avec le Niger, dans la zone dite des trois frontières (Mali-Burkina, Niger).”C’est le leader, le seul vraiment connu de cette organisation (Etat islamique au Grand Sahara-EIGS). Donc c’est un coup dur”, affirme Nicolas Normand, ancien ambassadeur de France au Mali, (auteur de plusieurs ouvrages, dont le dernier, “Le Grand livre de l’Afrique” paru aux éditions Eyrolles en 2020), au sujet de l’annonce de la mort d’Adnan Abou Walid al-Sahraoui.Son optimisme est toutefois tempéré par Aly Tounkara, maître de conférences à la faculté de lettres et de sciences humaines de l’Université de Bamako et directeur du Centre des études sécuritaires et stratégiques au Sahel.”Rappelons quand même que l’Etat islamique reste un groupe terroriste très bien ancré dans le Sahel. De plus en plus de Maliens, de Burkinabè et de Nigériens sont membres de ce groupe terroriste. Donc un tel assassinat, au-delà de sa dimension symbolique, pourrait impacter négativement sur la dynamique du groupe en termes d’actions violentes”, soutient Aly Tounkara.”Je pense qu’il y a eu une période de vérification qu’il était vraiment mort. Il faut toujours être prudent. Parce que apparemment, ça aurait été une attaque faite par un drone armé sur cette personne. Ce n’est pas impossible que cette annonce coïncide effectivement avec un moment où beaucoup de personnes au Sahel doutent de l’efficacité de Barkhane. Donc poussent à remplacer en quelque sorte Barkhane par des mercenaires russes (du groupe privé Wagner). Parce que la Russie, elle-même, ne veut pas s’engager officiellement dans cette affaire”, répond Nicolas Normand.Des rivalités entre groupes djihadistesAdnan Abou Walid al-Sahraoui était à l’origine de nombreuses attaques terroristes dans la zone des trois frontières, aux confins du Mali, du Niger et du Burkina Faso.Il recrutait principalement parmi les membres de la communauté peule et exacerbait ainsi les conflits interethniques. D’où son inimitié avec le touareg Iyad Ag-Ghali, le chef du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM), devenu l’un de ses rivaux.”La mort du patron de l’Etat islamique au grand Sahara (EIGS) renforcera Iyad Ag-Ghali, qui, contrairement à Adnan Abou Walid al-Sahraoui, ne terrorise pas les populations civiles mais se substitute plutôt à l’Etat dans certaines parties du Mali, en leur fournissant des services de base”, ajoute Nicolas Normand.Un Homme recherchéDepuis plus d’un an et demi, il était la cible “prioritaire” de la France et de ses alliés au Sahel. Adnan Abou Walid al-Sahraoui, dont Paris a annoncé la mort, était considéré comme le plus impitoyable chef djihadiste de la zone.Des informations sur la mort du chef du groupe “Etat islamique dans le Grand Sahara” (EIGS), entre Ménaka, dans le nord-est du Mali, et l’autre côté de la frontière avec le Niger, son principal champ d’action, circulaient depuis le mois d’août.Cet homme d’une quarantaine d’années, à la barbe et au turban noirs selon les rares photos connues de lui, est né au Sahara Occidental et fut membre du Front Polisario qui réclame l’indépendance de cette région.Après avoir passé une partie de sa jeunesse en Algérie, où il aurait rejoint des groupesislamistes armés, selon plusieurs experts, il participe à la création en 2011 dans le nord du Mali du Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao).Le Mujao se fait notamment connaître avec l’enlèvement en octobre 2011 de deux coopérants espagnols et d’une Italienne dans un camp de réfugiés sahraouis près de Tindouf, dans le sud-ouest de l’Algérie.A l’époque, Adnan Abou Walid al-Sahraoui lui-même revendique le versement d’une “rançon considérable” de 15 millions d’euros au Mujao, pour leur libération en juillet 2012.
Avec DW français
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