Bangui (Republique Centrafricaine) 25 oct. 2019 23:41
(Santiago du Chili) Le gouvernement du président chilien Sebastian Pinera se trouvait vendredi plus que jamais sous pression : plus de 820 000 manifestants ont envahi le centre de Santiago pour protester contre les inégalités sociales, une semaine après le déclenchement d’une vague de contestation sans précédent depuis des décennies. Paula Bustamante Des centaines de milliers de manifestants, brandissant des drapeaux chiliens et entonnant des chants popularisés pendant la période de la dictature d’Augusto Pinochet (1973-1990), convergeaient vers la Plaza Italia, devenue l’épicentre de cette fronde sociale inédite, ont constaté des journalistes de l’AFP. « À cette heure (18 h 08), la police indique que plus de 820 000 personnes sont rassemblées » sur la plaza Italia, a indiqué la mairie de Santiago dans un tweet. D’autres manifestations réunissant plusieurs milliers de personnes se déroulaient au même moment dans plusieurs autres grandes villes. « Ce sera probablement le plus grand rassemblement de tous les temps », s’enthousiasmait Francisco Anguitar, 38 ans, un agent de développement en intelligence artificielle, dans le cortège de Santiago. « Nous demandons justice, honnêteté, éthique au gouvernement. Nous ne voulons pas le socialisme, le communisme, nous voulons moins d’entreprises privées, plus d’État », a-t-il ajouté. Alors qu’une grande partie du pays et la capitale restaient sous état d’urgence, avec 20 000 policiers et militaires déployés, la manifestation dans la capitale se déroulait dans le calme. Plus déterminés que jamais, les protestataires ne relâchaient pas la pression sur le pouvoir chilien. Dans la matinée, des centaines d’automobilistes et de chauffeurs routiers avaient participé à des opérations escargot sur les autoroutes qui relient Santiago au reste du pays pour protester contre les prix des péages, provoquant d’importants embouteillages, a constaté l’AFP. « Nous, les petits transporteurs, nous sommes accablés par les prix des autoroutes […] nous rejoignons la mobilisation », a déclaré à l’AFP Marcelo Aguirre, un chauffeur de 49 ans. « Au lieu de se disputer » La question du prix du transport avait déjà été le détonateur de ce mouvement social inédit dans un pays loué pour sa stabilité, lorsque les étudiants avaient appelé à protester contre une augmentation de plus de 3 % du prix du ticket de métro dans la capitale. Malgré la suspension de la mesure, la colère sociale n’est pas retombée. Le mouvement, hétérogène et sans dirigeants identifiables, s’est amplifié, nourri par le ressentiment face à la situation socio-économique et aux inégalités dans ce pays de 18 millions d’habitants. L’annonce mardi par M. Piñera d’une série de mesures sociales, dont une augmentation du minimum vieillesse, une hausse des impôts des plus riches, et un gel de la hausse de 9,2 % de l’électricité, ne semble pas avoir eu l’effet escompté. Le président a demandé vendredi « à tous les députés et sénateurs, au lieu de se disputer et de discuter autant, d’approuver en urgence ces projets » de loi. Pour la septième nuit consécutive, les 7,5 millions d’habitants vont passer la nuit sous couvre-feu, qui a toutefois été à nouveau réduit d’une heure, de 23 h à 4 h. Des affrontements entre manifestants et forces de l’ordre, ainsi que des pillages ont été encore rapportés jeudi dans les quartiers périphériques de la capitale et quelques autres villes du pays. Face à la multiplication des allégations sur des violations des droits de l’homme, la Haut-Commissaire aux droits de l’Homme des Nations unies et ex-présidente chilienne, Michelle Bachelet, a annoncé l’envoi d’enquêteurs. Selon l’Institut national des droits humains (INDH), 584 personnes ont été blessées depuis le début des troubles le 18 octobre, dont 245 par armes à feu. Devant la presse, le ministre de la Défense, Alberto Espina, a déclaré jeudi que l’armée agissait pour protéger les droits de la personne des Chiliens, non pour les violer. Outre la mission onusienne annoncée par Mme Bachelet, le président Piñera a invité Mme Bachelet et José Miguel Vivanco, le directeur de la division Amériques de l’ONG Human Rights Watch, à se rendre au Chili. Le père de Mme Bachelet, arrêté et torturé après s’être opposé au coup d’État de Pinochet, est mort en prison en 1974. Elle-même a été torturée avant de partir en exil.
Avec AFP
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