CENTRAFRIQUE : LA PAIX ET LA RÉCONCILIATION NATIONALE, OUI ! MAIS A QUEL PRIX ?
Bangui, le 26 septembre 2017.
Par : Josephe Akouissonne, CNC.
SURENCHÈRES PRÉVISIBLES
Les prédateurs du monde entier vont désormais penser qu’en République Centrafricaine, pour s’emparer du pouvoir, il suffit de fouler aux pieds la légitimité du gouvernement légal et de se livrer à un chantage odieux en prenant en otage des responsables politiques désarmés et une population terrorisée.
Le fait d’avoir nommé des tueurs au gouvernement de la République va, vraisemblablement, inciter les autres factions Sélékas à se livrer à des surenchères inacceptables. Ces criminels voudront tout : le Palais de la Renaissance et les tiroirs-caisses de l’État ! Ils savent maintenant qu’en multipliant les oukases insupportables, ils réussissent à faire plier le gouvernement centrafricain tout en bénéficiant du silence incompréhensible de la France et de l’ONU.
Car comment comprendre l’aphonie des puissances tutrices face à l’inacceptable ? Aucune ne donne de la voix pour stigmatiser l’entrée des membres des ex-Sélékas au gouvernement ! Beaucoup de Centrafricains prendront, à juste titre, ce silence comme le résultat de conciliabules entre puissances étrangères et rebelles. L’ambiguïté de leur positionnement interpelle : leurs hésitations à utiliser les moyens nécessaires pour éradiquer les poches rebelles, le maintien de l’embargo sur les armes, tout laisse pantois.
Aujourd’hui, c’est comme si un accord secret avait scellé le sort de la République Centrafricaine. Ce que les patriotes centrafricains redoutaient avant tout, à savoir la partition de leur pays, trouve un début de réalisation dans l’intrusion des rebelles meurtriers au gouvernement du pays.
Depuis longtemps, nous avons fait part, ici, de nos craintes à propos de la trahison des populations centrafricaines par leurs gouvernants : ne sont-ils pas soudoyés par les forces internationales pressées de s’extraire du bourbier centrafricain, de peur de s’enliser en RCA et de compromettre leur contrôle sur les immenses richesses du pays ? Les coups d’états précédents fomentés par la France n’étaient-ils pas destinés à installer au pouvoir des pantins afin de s’assurer de l’exploitation des matières premières ?
IMPACT DU PLAIDOYER DE FAUSTIN-ARCHANGE TOUADERA A LA TRIBUNE DE L’ONU
Il est à craindre que le plaidoyer légitime onusien du Président Touadera ne soit entendu. Il est fort probable que le Centrafrique ne retombe dans l’oublie. L’ONU n’a, jusqu’à présent, résolu aucun conflit en Afrique. Le Sud-Kivu en RDC et le Mali sont là pour en témoigner. On ne peut que saluer la bonne volonté exemplaire du Secrétaire Général, Antonio Guterres, mais elle n’aboutira à aucun résultat tant que le Conseil de Sécurité, dominé par les puissances impérialistes et néocoloniales, veillera à ses propres intérêts sur le continent africain.
C’est ainsi que l’ignominieux embargo sur les armes vient d’être prolongé, alors qu’il laisse sans défense un gouvernement légitime et livre le pays à la voracité des ex-Sélékas. Quant aux Casques Bleus, ils ont posé et posent encore beaucoup de problèmes en République Centrafricaine. Parmi les comportements les plus insupportables, on peut citer les rapports ambigus de la MINUSCA et de son chef avec les séditieux. Il ne faut pas oublier les scandaleuses violences sexuelles faites aux adolescentes et aux adolescents centrafricains par certains éléments des Casques Bleus – et de la force Sangaris – sans oublier les accusations de pédophilie. Comment les parents des innocentes victimes, ulcérés dans leur chair, pourraient-ils accepter ces abominables trahisons ? En outre, les ordres donnés par les autorités centrafricaines, dans le domaine de la sécurité et de la protection des populations, ne sont même pas pris en compte par la MINUSCA.
Pendant que le président Touadera, à la tribune de l’ONU, demande à la communauté internationale d’augmenter ses efforts afin de ramener la paix en Centrafrique, le chef de la MINUSCA à Bangui, Parfait Onanga-Anyanga, annonce une possible réduction des Casques Bleus.
Or le Centrafrique n’a jamais été aussi menacé. La violence est partout. Des nouvelles bandes de terroristes surgissent de toutes parts. Certaines régions sont en état de partition. Les morts se comptent chaque jour par dizaines. Le nouveau gouvernement est aphone. Nommé en pleine crise et en urgence absolue, le gouvernement Sarandji II semble tomber dans la léthargie qui avait empêché Sarandji I d’agir.
Et que sont devenues les promesses des donateurs de Bruxelles ? Le peuple ne devrait-il pas être informé sur la gestion des fonds attendus ?
Lors de sa conférence de presse, tenue à Washington, le président Faustin-Archange Touadera a exprimé ses craintes de voir le Centrafrique retomber dans l’oubli. N’a-t-il pas eu raison ? Il n’y a qu’à écouter et regarder les médias internationaux : quelle place y occupe la République Centrafricaine ? Il est bien rare qu’on lui en donne une, même restreinte…
Il appartient donc aux Centrafricains, où qu’ils soient, de donner de la voix sur tous les supports de communication possibles, pour que leur pays ne tombe pas dans l’oubli et reprenne la place qui lui est due dans le concert des nations.
JOSEPH AKOUISSONNE
(26 septembre 2017)