Une nouvelle tentative de réconciliation nationale pour ramener la paix en Centrafrique a été lancée lundi à Brazzaville mais ses chances de réussite paraissent minces alors que les violences intercommunautaires ont encore fait un mort dans la matinée à Bangui.
Le «Forum pour la réconciliation nationale et le dialogue politique» s’est ouvert au Palais des congrès peu après 11h (6h HAE) et est censé s’achever mercredi par un engagement à cesser toutes les violences et la signature d’un accord de cessation des hostilités et de désarmement des groupes armés, préalables à un nouveau processus politique.
Dès son ouverture, la rencontre suscite cependant des doutes sur les résultats dont elle pourra accoucher du fait de l’absence d’un certain nombre d’acteurs de la crise.
Arrivée dimanche à Brazzaville, Catherine Samba Panza, présidente de transition de la Centrafrique, cantonnée dans un rôle de figurante lors de précédents pourparlers de paix, a estimé que le Forum était une «étape importante … pour qu’ensemble on décide de la cessation des hostilités et des violences».
Mais la situation reste toujours volatile dans le pays.
Lundi, un ex-combattant de la rébellion Séléka (essentiellement musulmane) a été tué à Bangui par des miliciens anti-balaka (majoritairement chrétiens), a annoncé à l’AFP la Misca, la force africaine en Centrafrique.
En représailles, des ex-Séléka ont pris en otage plusieurs jeunes et ont blessé le père de l’un d’entre eux, selon la même source. Des éléments de la force européenne (Eufor) ont pris position autour du camp de ces Séléka et la Misca a renforcé son dispositif dans le quartier des troubles.
«Tirer les leçons du passé»
Depuis le renversement en mars 2013 du président François Bozizé par la rébellion Séléka, la Centrafrique, ancienne colonie française riche en diamants, en pétrole et en uranium, est plongée dans le chaos. Les violences intercommunautaires quasi quotidiennes ont fait des milliers de morts et des centaines de milliers de déplacés.
Les ex-rebelles Séléka et les milices anti-balaka s’affrontent dans un cycle meurtrier et sanglant d’attaques et de représailles dont les civils sont les premières victimes.
À Brazzaville, l’ex-rébellion Séléka est représentée, mais pas sa branche dissidente. Les milices anti-balaka sont représentées par un coordonnateur national, mais le mouvement n’ayant aucune structure centralisée, celui-ci ne pourra parler au nom de tous les groupes éparpillés dans le pays.
Le gouvernement de transition est présent, mais la classe politique, les dirigeants religieux et la société civile se sont divisés, bon nombre de personnes refusant de prendre part à une nouvelle rencontre hors du pays.
L’interventionnisme des pays de la région pour tenter de régler la crise est mal vécu, qu’il s’agisse du Gabon ou du Tchad, qui ont abrité des sommets n’ayant rien arrangé, ou encore du Congo.
Médiateur des pays de la région pour la crise centrafricaine, le président congolais Denis Sassou Nguesso a appelé les participants à s’«approprier le processus de retour à la paix, à la sécurité, à l’unité, à la réconciliation nationale et à la prospérité».
«La décision vous revient… nous considérons Brazzaville comme la première étape d’un long processus qui se déroulera chez vous», a-t-il ajouté, notant que le pays avait «atteint l’abîme» et qu’il était temps «de tirer les leçons de toutes les expériences passées.»
Pour Thierry Vircoulon, directeur du programme Afrique centrale du cercle de réflexion International Crisis Group, la question de la représentativité et le peu de temps prévu pour la rencontre risquent néanmoins «de peser sur sa réussite et sur la mise en oeuvre des décisions qui y seront prises».