Centrafrique : Quarante-quatre ans après Bokassa, Touadera ressuscite la présidence à vie

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Centrafrique : Quarante-quatre ans après Bokassa, Touadera ressuscite la présidence à vie

Prestation de serment du Président Touadera le 30 mars 2021 à l'assemblée nationale à Bangui, illustrant l'article sur Centrafrique : Quarante-quatre ans après Bokassa, Touadera ressuscite la présidence à vie
Prestation de serment du Président Touadera le 30 mars 2021 à l’assemblée nationale à Bangui

 

 

Par la rédaction de Corbeaunews-Centrafrique.

 La démocratie centrafricaine vient de subir un coup fatal. Avec sa nouvelle Constitution promulguée le 30 août 2023, le président Faustin Archange Touadéra s’arroge les pleins pouvoirs et ouvre la voie à une présidence illimitée, suivant les pas de l’empereur Bokassa. Une régression constitutionnelle dénoncée par Danièle Darlan, l’ancienne présidente de la Cour constitutionnelle, limogée en 2022 pour avoir osé s’opposer à ce projet. Dans son ouvrage de référence sur l’histoire constitutionnelle du pays, elle met en garde : “La descente aux enfers de la République Centrafricaine a commencé dès le lendemain de l’indépendance par l’instauration d’un régime dictatorial”. Une analyse prémonitoire qui résonne particulièrement aujourd’hui.

 

“La descente aux enfers de la République Centrafricaine a commencé dès le lendemain de l’indépendance par l’instauration d’un régime dictatorial”, souligne Danièle Darlan, ancienne présidente de la Cour constitutionnelle, limogée en 2022 pour avoir osé s’opposer au projet de révision constitutionnelle. Dans son ouvrage “L’évolution constitutionnelle et juridictionnelle de la République centrafricaine à travers les textes”, elle retrace minutieusement cette dérive constante vers l’autocratie.

 

Promulguée le 30 août 2023 par le président Faustin Archange Touadera alias Baba Kongoboro, la nouvelle Constitution centrafricaine supprime la limitation des mandats présidentiels. Une modification qui s’inscrit dans une longue tradition de manipulations constitutionnelles visant à pérenniser le pouvoir en place.

 

La nouvelle Loi fondamentale, adoptée dans un contexte trouble où une partie du territoire échappe encore au contrôle de l’État, renforce considérablement les pouvoirs présidentiels. Elle crée un poste de vice-président nommé directement par le président, et accorde au chef de l’État le pouvoir de nommer la majorité des membres du Conseil constitutionnel. Plus inquiétant encore, le contrôle parlementaire sur les contrats miniers est supprimé, ouvrant la voie à une gestion opaque des ressources naturelles du pays.

 

“C’est l’unique but de cette réforme constitutionnelle. Le président Touadera veut rester au pouvoir ad vitam æternam, comme l’empereur Bokassa avant lui”, dénonce un leader du BRDC interrogé par la rédaction du CNC.

 

L’histoire constitutionnelle centrafricaine est jalonnée de telles dérives. En 1960, à peine cinq mois après l’indépendance, le président David Dacko adoptait une série de lois liberticides. “La dérive totalitaire en RCA n’a pas commencé avec Bokassa, mais bien sous Dacko”, rappelle Danièle Darlan, “même si celui-ci n’a peut-être pas eu les moyens ni le temps de mettre en œuvre ces textes, il en porte la responsabilité”.

 

Le 12 décembre 1960, quatre lois particulièrement répressives sont adoptées : l’une permettant la déportation et l’assignation à résidence des opposants, une autre réprimant les “actes de résistance”, une troisième réprimant les “écrits subversifs”, et une dernière permettant la dissolution des partis politiques et syndicats. Un arsenal juridique qui préfigurait la dictature à venir.

 

En 1966, Bokassa va plus loin en abolissant purement et simplement la Constitution. Dix ans plus tard, il s’autoproclame empereur. La Constitution de 1976 stipulait alors : “C’est par une libre et unanime décision que les représentants du parti unique ont érigé la République Centrafricaine en Monarchie Parlementaire”. Une “unanimité” qui rappelle étrangement les 95% de “oui” obtenus lors du référendum constitutionnel de 2023.

 

“La situation est même plus pire actuellement, où Touadera et ses soutiens utilisent les mercenaires criminels qui tuent massivement les centrafricains   “, confie sous couvert d’anonymat un ancien haut fonctionnaire. “Au moins, Bokassa assumait ouvertement ses ambitions impériales. Aujourd’hui, on garde les apparences démocratiques tout en vidant les institutions de leur substance”.

 

De Bangui à Bérengo, où Bokassa avait établi sa cour impériale, il n’y a que 76 kilomètres. Un trajet symbolique qui illustre la proximité entre république et autocratie dans ce pays riche en ressources naturelles mais classé parmi les plus pauvres au monde.

“Les changements inconstitutionnels ont entraîné une instabilité chronique“, note Danièle Darlan, “mais le plus grand impact a été le changement des mentalités, les divisions, la destruction du tissu social”.

 

La nouvelle Constitution de 2023 s’inscrit dans cette longue tradition de textes fondamentaux taillés sur mesure pour un homme. Elle introduit même une nouveauté inquiétante :

seuls les Centrafricains “d’origine” peuvent désormais être candidats aux élections nationales et assurer les hautes fonctions civiles et militaires, une disposition qui risque d’exacerber les tensions communautaires.

 

Alors que le pays peine encore à se relever de la crise de 2013-2016, cette révision constitutionnelle apparaît comme un dangereux retour en arrière. Soixante-trois ans après son indépendance, la République centrafricaine semble condamnée à répéter les erreurs du passé, sacrifiant les aspirations démocratiques de son peuple sur l’autel des ambitions personnelles de ses dirigeants.

 

 

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