CENTRAFRIQUE : DÉSIGNATION DU PRÉSIDENT DE L’URCA COMME CHEF DE MISSION D’OBSERVATION ÉLECTORALE EN DJIBOUTI, QUELS SONT LES ENJEUX ET IMPACTS SUR LA POLITIQUE NATIONALE ?
Bangui, le 3 mars 2018.
Par : Bernard Selemby Doudou, CNC.
Lors des élections législatives du 23 février 2018 en Djibouti, le corps électoral est invité à élire soixante cinq (65) députés pour renouveler l’assemblée nationale. Animé par le souci de garantir la légalité des opérations électorales, des missions d’observation électorale sont généralement dépêchées auprès de l’État hôte dont celle de l’Union Africaine. À l’instar de l’ancienne présidente de transition, la République centrafricaine a été honorée par la désignation du président de l’URCA (Union pour le Renouveau Centrafricain) comme chef de mission d’observation électorale de l’Union Africaine.
Cet économiste et cadre de banque, diplômé de l’université de Bordeaux fut simultanément premier ministre et ministre des finances, in fine chef de file autoproclamé de l’opposition. Ces différentes expériences l’ont permis de mener avec succès les missions qui lui ont été confiées par l’Union Africaine. Cette confiance de l’Union Africaine est intervenue au moment où les autorités démocratiquement élues sont en perpétuelle recherche de repères pour endiguer la crise qui a fragilisé la notion d’Etat. S’agit-il d’une promotion, d’une reconnaissance pour devoir accompli ou d’une consécration dans son rôle de leader de l’opposition ? Dans tous les cas, ces différents voyages et rencontres politiques inquiètent, intriguent les uns et les autres. Le citoyen lambda, bien rodé des manœuvres politiques ne fait pas l’exception et s’interroge en murmurant : Cette promotion fait-elle partie de lots de récompenses liés à l’acceptation des résultats des présidentielles ? En d’autres termes, l’acceptation du résultat des urnes avait-elle fait l’objet de négociations politiques ? Cette acceptation de résultats était-elle véritablement motivée par la recherche de la paix ? Dans l’affirmative, qu’en est-il actuellement de cette paix tant recherchée ? Des remords et regrets se sont-ils invités dans l’agenda du chef de mission d’observation électorale ? Et si les élections présidentielles étaient à refaire, allait-il confirmé ou infirmé sa décision ? Cette consécration continentale fera-t-elle oublier au peuple centrafricain le sobriquet de « Monsieur 10% » qu’il traine depuis son dernier passage au ministère des finances ? Cette médiatique reconnaissance internationale constitue t-elle un pied de nez aux détracteurs qui condamnent à tort ou à travers que l’opposition centrafricaine n’est que destructive ? Quelle appréciation le pouvoir de Bangui fait-il de cette distinction honorifique ? S’agit-il d’un honneur pour la République ou d’un danger imminent pour la pérennisation de leur mandat ? Le poste de chef de mission d’observation électorale de l’Union Africaine est généralement une distinction honorifique réservée aux personnalités politiques qui ont œuvré en faveur de la démocratie et de la paix. Ainsi, peut-on affirmer que le président de l’URCA est un démocrate ? Dans l’affirmative, les critiques, remarques et suggestions du président de l’URCA contribuent-elles positivement à renforcer les acquis démocratiques ? Cette consécration internationale qui est une première pour l’opposition centrafricaine a t-elle un lien ou une incidence avec la feuille de route de l’Union Africaine sur la crise centrafricaine ? Cette distinction est-elle la conséquence du rapport accablant des experts de l’ONU sur la Centrafrique qui crucifie publiquement le pouvoir de Bangui en déclarant « qu’il n’y a pas de gouvernement digne et que le pouvoir manque de leadership » ? En tout état de cause, cette mission d’observation électorale de l’Union Africaine ouvre très certainement les portes d’un avenir meilleur et permet d’étoffer le carnet d’adresses indispensable pour une offensive diplomatique en cas de besoin. Sa famille politique doit très certainement s’en réjouir car en moins de cinq ans d’existence, elle a conquis le continent après avoir fait un score surprenant au premier tour de récente présidentielle avant de s’incliner devant le verdict des urnes. Il est évidemment important de rappeler que cette ascension fulgurante continentale ne justifie rien car c’est facile de critiquer et de s’opposer mais ne perdons pas de vue que l’exercice du pouvoir à ses réalités…souvenez-vous toujours d’où vient le sobriquet de « Monsieur 10% ». Mais attention, ne le dites à personne. Si on vous demande, ne dites pas que c’est moi.
Paris le 3 mars 2018
Bernard SELEMBY DOUDOU
Juriste, Administrateur des Elections. Tel : 0666830062
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