Jeunes Centrafricains : Formés pour survivre, pas pour travailler

Par la rédaction de Corbeau News Centrafrique, CNC.
En Centrafrique, l’université forme des jeunes centrafricains sans avenir professionnel. À Bouar et partout, ils s’improvisent chauffeurs ou vendeurs pour échapper à la misère.
Un système éducatif sans débouchés
À l’Université de Bangui, comme dans des écoles supérieure de commerce, des milliers des Jeunes Centrafricains s’investissent dans des études de droit, d’économie ou de sciences, voir même de commerce et de gestion, espérant un avenir stable. Mais une fois leur licence en poche, la réalité les frappe de plein fouet : les emplois correspondant à leurs qualifications n’existent presque pas. Ce que les Jeunes Centrafricains appellent le « diplôme de garage », un diplôme inutilisé, rangé dans un coin, incarne leur désillusion. Même dans la capitale, où les opportunités devraient être plus nombreuses, seuls 15 % des diplômés universitaires trouvent un travail dans leur domaine dans les deux ans suivant l’obtention de leur diplôme, selon une étude du Ministère de l’Éducation de 2023.
Le système éducatif, déconnecté des réalités économiques, ne prépare pas les Jeunes Centrafricains au marché du travail. Les filières techniques, comme la mécanique ou l’agriculture, manquent cruellement de moyens. À Berberati, un centre de formation professionnelle n’a qu’un seul enseignant pour trois disciplines. À Bouar, les ateliers de menuiserie sont dépourvus d’outils. Résultat : 70 % des Jeunes Centrafricains âgés de 18 à 35 ans n’ont pas d’emploi formel, d’après un rapport de la Banque mondiale publié en 2024. « J’ai étudié le droit pendant cinq ans. Maintenant, je vends des bidons d’essence au marché », confie Éric, 30 ans, dans un quartier populaire de Bangui.
Une jeunesse centrafricaine contrainte à la débrouille
Sans perspectives, les Jeunes Centrafricains se tournent vers des métiers précaires pour survivre. À Bangui, les rues sont animées par des chauffeurs de motos-taxis, des vendeurs ambulants et des « bricoleurs », ces réparateurs improvisés qui apprennent sur le tas à réparer motos, téléphones ou appareils électroménagers. « Je gagne 2 500 FCFA par jour comme chauffeur de moto. Ça couvre le riz, mais pas l’avenir », explique Junior, 26 ans, diplômé en gestion. Selon l’Organisation internationale du travail (OIT) en 2024, 85 % des Jeunes Centrafricains actifs en Centrafrique dépendent de l’économie informelle, un secteur où les revenus sont incertains et les conditions difficiles.
Dans les marchés, des Jeunes Centrafricains vendent des fagots de bois, des sachets d’eau ou des beignets. Marie, 24 ans, à Bossangoa, illustre ce virage forcé. « J’ai une licence en sociologie, mais je vends des vêtements d’occasion. Mes études n’ont aucune utilité ici », dit-elle. D’autres, à la recherche d’une issue, prennent des chemins plus risqués. À Bangui, rejoindre un parti politique ou une association soutenant le pouvoir peut rapporter un revenu modeste. « On te paye 3 000 FCFA pour assister à des marches ou porter des pancartes. C’est mieux que rien », avoue un ancien étudiant en histoire, qui préfère rester anonyme. Dans les provinces, l’orpaillage attire des centaines de Jeunes Centrafricains vers des mines artisanales, comme à Bria. Mais la majorité revient sans rien, parfois malade ou endettée. « J’ai passé huit mois dans une mine. J’ai tout perdu », raconte Alain, 25 ans, à Bozoum.
Bambari : Le reflet d’un mal national
Bambari, ville du centre de la Centrafrique, incarne cette crise de l’emploi de la jeunesse centrafricaine. Ancien carrefour économique ravagé par les conflits, elle peine aujourd’hui à offrir des opportunités à sa jeunesse. Félix, 30 ans, licencié en droit, rêvait de plaider dans les tribunaux. Aujourd’hui, il répare des motos au marché central. « J’ai postulé à tous les concours administratifs. Aucun retour. Alors, j’ai appris la mécanique tout seul », explique-t-il. Avec 4 000 FCFA par jour, il subvient à peine aux besoins de sa femme et de ses deux enfants. Une enquête régionale de 2024 montre que 65 % des Jeunes Centrafricains actifs de Bambari occupent des emplois informels, comme Félix.
Aline, 25 ans, diplômée en agronomie, a vu ses projets s’effondrer. « Je voulais cultiver des légumes, mais je n’avais ni terrain ni argent. Maintenant, je vends des beignets », confie-t-elle. Formée pour moderniser l’agriculture, elle a appris à cuisiner grâce à des vidéos en ligne. Christian, 27 ans, ancien étudiant en économie, transporte des marchandises à moto. « À Bambari, tu choisis : chauffeur, vendeur ou politique. J’ai pris la moto », dit-il. Chaque mois, 200 Jeunes Centrafricains quittent Bambari pour les mines d’or de Bria, mais 80 % reviennent sans gains, selon les autorités locales. Par ailleurs, 1 200 dossiers de candidature s’entassent à la préfecture pour des postes administratifs jamais pourvus.
Le Centre de Formation Professionnelle de Bambari lutte pour attirer les Jeunes Centrafricains centrafricaine. « Ils ne croient plus en nos programmes. Ils veulent des résultats immédiats », explique un formateur. Sur 100 inscrits, seuls 15 terminent leur formation, car les filières – couture, menuiserie, agriculture – ne répondent pas aux besoins du marché local, dominé par le commerce informel. Quelques initiatives émergent, comme une ferme avicole collective soutenue par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), qui vise à employer 50 jeunes, ou des ateliers de formation au bâtiment. Mais ces projets restent insuffisants face à l’ampleur du défi.
Le recours à la politique et aux milices
Dans tout le pays, la politique devient un refuge pour certains Jeunes Centrafricains . À Bangui, à Berberati ou à Bambari, rejoindre un parti au pouvoir ou créer une association de soutien au président peut garantir un revenu, même modeste. « On te donne de l’argent pour applaudir ou manifester. C’est humiliant, mais ça paye », confie un jeune à Bangui. Plus inquiétant, des milices liées au pouvoir recrutent des jeunes désœuvrés, notamment à Bangui, en leur promettant argent et protection. « Mon frère a rejoint l’armée, puis détaché dans une milice de la garde présidentielle. Il mange tous les jours, mais il vit dans la peur », raconte Aline. Ce phénomène, répandu à travers le pays, prive la jeunesse centrafricaine d’un avenir stable.
Un drame qui touche tout le pays
La crise de Bambari n’est pas un exception. À Bangui, les diplômés deviennent chauffeurs ou vendeurs ambulants. À Berberati, ils cultivent des champs par nécessité. À Bouar, ils réparent des téléphones sans formation. À Bossangoa, ils écoulent des produits dans les marchés. Partout, les jeunes partagent la même frustration : ils ont étudié, mais le système les a abandonnés. « On ne veut pas de pitié. On veut juste une chance de travailler », déclare Félix, en nettoyant un carburateur à Bambari. Ce cri du cœur résonne dans chaque ville, chaque village, où une génération lutte pour donner un sens à ses diplômes….
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