Centrafrique : présidentielle de 2021, Touadéra et son équipe se prépare activement.
Bangui, le 27 novembre 2017.
Par : Gisèle MOLOMA, CNC.
« 2021 c’est proche, mais notre pouvoir y s’éloigne dangereusement » dixit un proche parent du président Faustin Archange Touadéra. Visiblement, le bateau Fatiste s’écarte du lit du vent et la panique s’empare les passagers à bord. L’idée venue au bidel en chef du navire Arthur Bertrand PIRI pour le rapprocher du lit du vent : créer leur propre parti politique. Et comment ils procèdent ? Enquêtes.
Depuis son arrivée à la magistrature suprême de l’État en mars 2016, le président Faustin Archange Touadéra et ses proches conseillers, incluant certains membres de ses proches parents influents, sont obsédés à l’idée de créer un parti politique propre au locataire du palais de la Renaissance. Le seul obstacle qui les empêche depuis lors, c’est la recrudescence des violences et des tueries en séries sur l’ensemble du territoire. Violences et tueries dues à l’incapacité de leur leader et à l’inaction de son gouvernement dirigé par son ami personnel et qui ne font que dégringoler, jour après jour, leur maigre cote de popularité.
Entre-temps, pour sauver la galerie et préparer le terrain, quelques partisans et militants du parti déchu, le Kwa na Kwa (KNK) de l’ancien Président François Bozizé dont le président Touadéra reste, à ce jour, le premier vice-président, se sont ralliés à sa personne et ont créé nombres des mouvements de soutien à sa politique dont les leaders ont du mal à séduire le peuple centrafricain.
Pour preuve, le résultat d’un sondage réalisé par CNC le mois dernier qui lui attribue, lui Faustin Archange Touadéra, 2% d’intention de vote, derrière Karim Meckassoua, 3% et Joseph Bendounga 4%. En tête du sondage ; Ziguélé Martin du MLPC, 26%, suivi de Anicet George Dologuélé de l’URCA, 25% et Désiré Kolingba du RDC, 13%. Les indécis, 26%. En plus, sur 100 personnes interrogées, 97 conseillent au président Touadéra de ne pas se représenter pour un nouveau mandat en 2021.
Mais depuis plus d’un mois, conscients de l’impopularité de leur leader, les premiers responsables du cercle qui gouverne le pays avec le président Touadéra notamment Arthur Bertrand Piri, Sani Yalo, Simplice Mathieu Sarandji et Maxime Balalou, s’activent en coulisse pour la mise en place du parti fédérateur de Touadéra, mais aussi, et surtout étudier son mécanisme du financement. La date butoir avancée, automne 2018 d’après une source proche de la famille à Boye-rabe.
D’après l’un des participants à leurs différentes réunions, le meilleur mécanisme de financement retenu est le modèle utilisé par le parti KNK dont ils sont issus en majorité, la contribution des membres. Et pour ce faire, décision est prise pour caser là où broutent les vaches laitières et où sont installés des nids d’abeilles, d’après leurs propres mots. En d’autres termes, nommer les cadres futures de leur parti à des postes de responsabilité où coulent le lait et le miel.
De la parole aux actes, on assiste depuis ces derniers temps à une vague des nominations, coup par coup, des pro-Touadéra dans l’administration publique centrafricaine et dans certaines organisations régionales et internationales. Du Trésor public à la CEMAC en passant par des Directions générales des sociétés d’État sous le contrôle du président du club Arthur Bertrand Piri et Directions des cabinets ministériels et institutionnels, des Touadéra sont promus et les alliés évincés.
« Les alliés nommés ne peuvent que contribuer au rayonnement de leurs leaders. Alors il faut les virer tous. Quitte à eux de nous faire allégeance en mars 2018 pour une nouvelle nomination » a fait savoir un contrôleur des impôts ayant pris part à leur réunion.
Un véritable signe avant-coureur d’un séisme politique d’une intensité sans précédente qui pourrait désorienter les boussoles internes de certains partis politiques et qui entraîneront, sans coup férir, leur naufrage politique.
D’après un spécialiste et politologue centrafricain, les séries des démissions en cascade et des défections enregistrées au sein du parti KNK de François Bozizé abandonné à Bertin BEA, du MLPC de Martin Ziguélé, de CPRS de Maître Nicolas Tiangaye et du RPR de l’ancien président par intérim de la Centrafrique Alexandre Ferdinand Nguéndet, trouvent leurs débuts d’explications dans ce schéma séismique mis en place par les proches de Touadéra.
Contacté par CNC, le sociologue Xavier Didier affirme qu’il ne peut avoir un séisme politique en Centrafrique. Pour lui, les démissions ou les défections d’un parti au profit d’un autre par certains Centrafricains ne datent pas d’aujourd’hui. « Il y’a des Centrafricains qui sont contraints de s’accrocher au parti pouvoir, soit, pour se mettre à l’abri des poursuites, soit pour garder la ligne. Et cela n’a pas du tout affaissé les partis d’où ils viennent. C’est plutôt l’inverse qui se produit naturellement par l’adhésion des nouveaux membres ». Conclut notre sociologue.
D’ici là, des émissaires du cercle sont envoyés dans différentes préfectures pour débrayer le terrain. De l’argent, des tee-shirts à l’effigie de Touadéra sont distribués à tour de bras aux populations. Les Directeurs des écoles, inspecteurs académiques, intendants, surveillants, censeurs, proviseurs des lycées, commissaires, commandants des brigades et tous les fonctionnaires et agents de l’État déjà en place dans les différentes Préfectures et Sous-préfectures sont instruits d’accueillir et de faciliter les missions précurseures. D’après nos informations, Bozoum, Berbérati, Bouar sont les premières préfectures tests avec les concours de ces autorités locales.
Et Touadéra va-t-il réussir son pari de 2021 ?
Rien n’est sûr si l’on tient compte des paramètres politiques et sociaux actuels. Son secours en faveur de sa famille en difficulté dans les tests des OPJ de la CPS a laissé un mauvais souvenir dans les régions peuplées par l’ethnie et les ethnies assimilées des agents évincés.
En plus, d’après certaines sources diplomatiques, trois quarts des alliés politiques de la « Tortue de Damara », surtout ceux qui l’ont aidé à prendre le pouvoir en 2016, ne tarderont pas à le relâcher définitivement d’ici fin 2018. L’histoire d’avoir les mains libres pour se préparer, eux aussi, aux échéances de 2020-2021.
Incompétences caractérisées, inactions prouvées et affairismes avérés, désormais, par effet de rapprochement et sous les feux de la rampe, le régime de Touadéra est assimilé à celui de son maître François Bozizé par certaines puissances internationales et régionales comme la France, l’Italie, les États-Unis, le Congo de Dénis Sassou, le Tchad d’Idriss Deby Itno et le Maroc, qui penchent, depuis un mois, sur une solution transitoire. Et les groupes armés, pour l’embrasement total qui le poussera à la porte de sortie avant 2021.
Qui vivra verra.
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