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Non, la Centrafrique n’a pas “formellement” interdit son espace aérien à la France et à la Minusca

mankeur ndiaye de la minusca
Monsieur mankeur ndiaye, Représentant spécial du Secrétaire général de la Minusca en Centrafrique

 

Bangui, République centrafricaine, mercredi, 31 mars  2021, 05:02:33 ( Corbeaunews-Centrafrique ). Des publications virales sur les réseaux sociaux d’Afrique francophone affirment que la Centrafrique a interdit à la France et à la Minusca (mission des Nations Unies en République centrafricaine) de survoler son territoire. Ces propos sont trompeurs et incomplets. Bangui a certes renforcé le contrôle de son espace aérien, en suspendant le survol sans autorisation de son territoire, mais l’accès au ciel centrafricain n’a pas été “formellement” interdit. De plus, cette mesure s’applique à toutes les organisations et présences étrangères dans le pays, et pas seulement à la France et à la Minusca – qui en tant que force de maintien de la paix dispose d’autorisations particulières.

La France et la Minusca interdites “formellement” de survol de l’espace aérien centrafricain? C’est ce qu’affirment plusieurs publications très commentées depuis le 23 mars sur les réseaux sociaux. Selon les auteurs de ces posts, la décision émanerait du président de la Centrafrique Faustin-Archange Touadera et concernerait “la France” ainsi que “la Minusca” (mission des Nations unies en Centrafrique), déployée dans le pays depuis 2014.

L’annonce a circulé sur différentes pages Facebook en Afrique francophone, cumulant plusieurs centaines de partages (1, 2, 3…). Certaines sont accompagnées de photos d’avions de chasse, d’autres d’un photomontage ou apparaissent le visage du président français Emmanuel Macron, la mine triste, à côté de celui du président russe Vladimir Poutine, tout sourire, en train de mimer un geste d’égorgement.

La Russie est présente depuis 2018 en République centrafricaine, pays de 4,9 millions d’habitants ravagé par une guerre civile qui a fait des milliers de morts entre 2013 et 2014. Elle tend à y supplanter la France, ancienne puissance coloniale, dont les forces armées sont présentes dans le pays depuis l’indépendance en 1960.

Depuis son arrivée en 2018, Moscou soutient ouvertement le régime du président Faustin-Archange Touadéra, notamment grâce à un accord bilatéral de défense. Elle a envoyé à Bangui une centaine d'”instructeurs militaires”, terme utilisé par Moscou pour désigner les paramilitaires privés chargés entre autres de former les soldats centrafricains et d’assurer la sécurité rapprochée de M. Touadéra.

La France de son côté compte quelque 300 soldats dans le pays, qui mènent des actions de formation des forces armées nationales et assurent si nécessaire un appui à la Minusca. En décembre 2013, après l’embrasement qui avait suivi le coup d’Etat contre le président François Bozizé, Paris avait déployé sur place plus d’un millier de soldats, dans le cadre de l’opération Sangaris. Cette opération, sous mandat de l’ONU, s’est prolongée jusqu’en 2016.

Paris et Moscou se livrent depuis à une guerre d’influence marquée par la montée en puissance de la Russie, qui a envoyé en décembre 300 soldats supplémentaires après la réélection à un deuxième mandat du président Touadera, suivie par une offensive surprise de groupes rebelles, qualifiée de “tentative de coup d’Etat” par le gouvernement centrafricain.

Est-ce en raison de ce rapprochement entre Bangui et Moscou que la Centrafrique a décidé de renforcer le contrôle de son espace aérien? C’est ce que sous-entendent les publications virales sur Facebook, qui assurent que cette mesure vise expressément la France. Pourtant, cette affirmation ne correspond pas au dispositif tel que présenté par les autorités centrafricaines.

Suspension pour toutes les forces étrangères… sauf autorisation

Le 19 mars, le ministère des Affaires étrangères et des Centrafricains de l’étranger a fait circuler une note de service appelant à “une gestion rigoureuse des demandes d’autorisation diplomatique de survol (avec ou sans atterrissage) sur le territoire centrafricain“.

Ce document, adressé à “toutes les missions diplomatiques et postes consulaires et organisations internationales accréditées en République Centrafricaine”, précise que le ministère “reste le point d’entrée de toutes les demandes auprès des autorités” ainsi que le “point d’entrée des demandes d’autorisations diplomatiques de survol du territoire centrafricain“.

Contactées, les autorités centrafricaines n’ont pas donné de suite aux sollicitations de l’AFP. Mais une source travaillant au sein de l’une des organisations étrangères concernées par la mesure a reconnu l’authenticité de ce document.

 

Cette mesure n’est donc aucunement une interdiction formelle de survol mais un rappel des règles en vigueur – à savoir l’interdiction de survoler le territoire centrafricain sans autorisation préalable. De plus, la France n’est pas le seul pays concerné puisque la mesure s’applique à l’ensemble des organisations internationales et présences étrangères dans le pays.

Quant à la Minusca, elle déroge à cette règle puisqu’elle dispose d’autorisations particulières dans le cadre des “accords de siège” (traités signés entre les Nations Unis et les pays hôtes), selon des sources diplomatiques.

Les rebelles, arrivés aux portes de Bangui, se sont heurtés mi-janvier à des forces bien mieux armées et équipées que les leurs: quelque 12.000 Casques bleus, mais aussi des centaines de militaires rwandais et paramilitaires russes dépêchés à la rescousse de M. Touadéra et d’une armée démunie.

Mais en raison des troubles persistants dans le pays, le Conseil de sécurité de l’ONU a décidé le 12 mars d’augmenter progressivement de près de 3.000 Casques bleus les effectifs de la Minusca. Ces renforts avaient été demandés par la Centrafrique, la Minusca et le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres.

Rédigé par la France, le texte a été adopté par 14 membres sur les 15 siégeant au Conseil de sécurité. Seule la Russie s’est abstenue, selon des diplomates.

Le président Faustin-Archange Touadéra a pour sa part été formellement investi mardi 30 mars, trois mois après sa réelection à un deuxième mandat avec 53,16% des voix.  La participation lors du scrutin avait été estimée à 35,25% seulement, en raison notamment de l’insécurité. Quinze partis d’opposition ont rejeté cette victoire, dénonçant d'”innombrables fraudes

 

AFP

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