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L’inquiétante tendance apocalyptique de la démographie centrafricaine

L’inquiétante tendance apocalyptique de la démographie centrafricaine

 

Médard POLISSE-BEBE, portant un chapeau noir avec un costume gris, cravate à l'intérieur, en train de regarder tout droit dans un temps sérieux.
Monsieur Médard POLISSE-BEBE

 

 

Bangui, 22 février 2024 (CNC).  

Depuis ces dernières années, une réalité tend à se banaliser en République centrafricaine, alors qu’elle touche dangereusement à l’avenir du pays. Il s’agit de l’augmentation exponentielle du taux de mortalité dans les catégories d’âges les plus valides (jeunes et adultes). 

 

En effet, en dehors des périodes où notre pays traversait une crise militaro-politique aiguë, occasionnant des massacres et exactions à grande échelle, c’est la première fois que le territoire centrafricain enregistre un taux aussi élevé de mortalité en temps de paix. Jamais en Centrafrique, il n’y a eu autant de morts en dehors de la guerre et/ou de conflits armés. Toutes les semaines ou presque, chaque famille centrafricaine est touchée par un ou plusieurs cas de décès et cela de façon récurrente. Il suffit de sillonner les quartiers et différentes contrées de la capitale, ainsi que ceux des provinces pour s’en rendre compte. Dernièrement, un compatriote de la diaspora, de passage à Bangui, a dénombré plus d’une centaine de défilés funéraires en l’espace de trois heures vers le cimetière de Nzila.

 

À son grand étonnement, les habitants du secteur ont fait savoir que « c’est comme ça tous les jours de la semaine ici, sauf le dimanche ». Dans plusieurs familles aujourd’hui, l’on ne compte plus les cas de décès des personnes qui sont allées à l’hôpital pour des maladies banales, mais qui ont laissé la vie. Alors, imaginez une telle hécatombe régulière à l’échelle de l’ensemble du territoire… D’ailleurs, la multiplication des annonces macabres ou nouvelles nécrologiques sur les réseaux sociaux, dans les médias de la place et autres canaux informels de communication témoignage de la réalité terrifiante de ce phénomène.

 

Alors pourquoi les autorités centrafricaines, notamment la Présidence de la République, l’Assemblée nationale, la Primature, les ministères de la santé et celui des affaires sociales, ne se prononcent-ils pas sur le sujet ? Quelles sont les statistiques réelles du taux de mortalité de ces huit (8) dernières années en République centrafricaine ? Quelles mesures ont-elles été prises pour lutter efficacement contre cette augmentation exponentielle du taux de mortalité ?

 

Au-delà de la douleur et du désespoir des familles fortement éprouvées, c’est l’inquiétude liée à une telle situation extrêmement grave (au regard de l’avenir du pays) qui devient préoccupante. Surtout lorsqu’on sait que les autorités centrafricaines actuelles ne font presque rien pour endiguer cette situation afin de contenir l’hégémonie, à défaut de l’arrêter.

 

Une chose est sûre : les structures sanitaires sont devenues rudimentaires par manque d’investissement, transformant ainsi les hôpitaux, de manière épouvantable, en mouroirs. Autrement dit, l’hôpital qui aurait pu être un lieu de lutte pour la vie, devient paradoxalement un lieu de lutte pour la mort, surtout à grande échelle. Et ça, ce n’est pas acceptable !

 

Cela dit, alors que toutes les nations (développées ou qui ambitionnent de l’être) se battent à coup de grands frais et d’investissements colossaux pour leur « réarmement démographique » (terme employé par le Président Emmanuel Macron dans son adresse à la nation du nouvel an), à travers des politiques incitatives de natalité et de lutte contre la mortalité, la République centrafricaine continue de perdre, à l’inverse, de façon vertigineuse, ses bras, ses compétences, ses ouvriers, ses cadres, ses enfants, bref ses filles et ses fils, par manque de politiques stratégiques dans ce sens.

 

La démographie centrafricaine, qui aurait dû être un levier de croissance et de développement à l’instar de la plupart des pays africains, européens, asiatiques (pour ne citer que ceux-là), est ainsi amputée des ressources humaines indispensables pour son présent et son avenir. Tout cela n’est pas sans conséquences, non seulement pour le développement économique et social du pays, mais surtout pour les familles désormais en proie au désespoir, au désœuvrement, à la délinquance juvénile, bref à la déchéance sociale.

 

Par ailleurs, en dehors du taux excessif de mortalité, il est à craindre désormais la montée inquiétante de ceux de nos concitoyens qu’on pourrait appeler désespérément des « morts ambulants ». Car, à force d’absorber quotidiennement les quantités débordantes de poussières dans les rues de Bangui et de certaines provinces, beaucoup de gens ont mis involontairement et inconsciemment en péril leurs poumons, par conséquent leur santé et leur vie. Eu égard à la dégradation du système sanitaire (pour ne pas dire son état déliquescent), plusieurs de ces victimes sont condamnées d’office à la mort lente et systématique. Il en est de même de nos compatriotes victimes de dérives graves et d’exactions de toutes sortes de par les mercenaires russes du groupe Wagner qui volent, violent, tuent dans l’impunité la plus totale.

 

Rien qu’à voir les choses sous cet angle, il semble absolument scandaleux de « laisser mourir » autant de personnes innocentes ou d’envisager l’éventualité d’autant de pertes en vies humaines dans un avenir proche, au mépris total du principe de « non-assistance à personne en danger ». D’où la question de savoir si les autorités centrafricaines actuelles (à commencer par le Président TOUADERA lui-même) seraient-elles réellement conscientes du désastre actuel et de celui qui se profile ?

 

Sans épiloguer sur les grandes théories démographiques et ses implications, la force politique, économique, sociale et culturelle d’un pays se détermine par sa densité démographique. Les grandes nations et autres grands pays émergents sur les différents continents en sont une parfaite illustration.

 

Si les autorités centrafricaines voulaient maintenir le Centrafrique dans « l’éternel » sous-développement, elles ne s’y prendraient pas autrement, en laissant la population être décimée progressivement. Et ça, ce n’est pas acceptable non plus !

 

Par conséquent, afin d’éviter au pays ce sort apocalyptique, il est temps de se mobiliser fortement pour arrêter cette hémorragie avant qu’il ne soit trop tard. Car, pour conjurer ce mauvais sort, les larmes, les jérémiades, les indignations et simples condamnations de principe ne suffisent plus. Il faut des actions fortes, résolues et massives visant à mettre les autorités actuelles, au premier rang desquelles le Président Faustin Archange TOUADERA, devant leur responsabilité, dans l’espoir d’éviter la déchéance assurée de la République centrafricaine.

 

 

Par Médard POLISSE-BEBE

Personnalité politique centrafricaine

 

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