CENTRAFRIQUE : L’AUTORITÉ DE L’ÉTAT DOIT ÊTRE RESTAURÉE
Bangui, le 13 décembre 2017.
Par : Joseph Akouissonne, CNC.
UN DÉFI DE TAILLE
Le président Touadera et son équipe sont confrontés à un immense défi : faire en sorte que les représentants de l’État puissent se déployer sur tout le territoire. Depuis plusieurs semaines, préfets et sous-préfets sont en effet empêchés de rejoindre leurs régions d’affectation par des bandits de grands chemins. Dans les provinces qu’ils occupent, les ex-Sélékas et leurs mercenaires perturbent l’installation de ceux qui viennent représenter l’État.
Affront insupportable pour un pouvoir légitime ! C’est comme si les séditieux faisaient un bras d’honneur au gouvernement et aux Centrafricains ! Le pouvoir reste interdit devant cette injure, cette négation de sa puissance, cette humiliation insupportable. Au rythme où surgissent les calamités, ce sont bientôt les bandes armées qui nommeront elles-mêmes leurs préfets.
A la frontière poreuse avec le Tchad, le flot des renforts de mercenaires venus soutenir Ali Darras, le chef rebelle, et sa bande ne cesse d’enfler. Le Nigérien a transformé la région qu’il occupe en un vaste pâturage. De riches éleveurs tchadiens envoient leurs bovins brouter les herbes grasses de la RCA., moyennant 10.000 FCA par tête de bétail, acquittés directement au seigneur de la Kotto, du Mbomou et du Haut-Mbomou !
Ce Nigérien, recherché dans son pays pour plusieurs délits, s’est considérablement enrichi en Centrafrique. On le dit millionnaire. Il a donc de quoi recruter des mercenaires et s’équiper en armes. Il a les moyens d’empêcher des représentants de l’État de rejoindre les provinces qu’il occupe. Il ne faut pas oublier qu’il est un pur produit de la Transition et des forces internationales qui l’ont laissé se replier sur Bambari avec armes et bagages.
Étant donné l’effacement du pouvoir centrafricain, tout est désormais possible. L’innommable risque de se produire si le président Touadera ne change pas son fusil d’épaule pour arrêter la saignée. Malheureusement, il ne semble pas près de le faire. Nommer des bandits armés comme conseillers au gouvernement et à la présidence, c’est une véritable hérésie. Depuis leur arrivée, on constate que la situation n’a fait que s’empirer. On risque maintenant de voir surgir des califats dirigés par des émirs sanguinaires, qui accueilleront les fous de Dieu de Daech en perdition. La République Centrafricaine ne va-t-elle pas devenir un sanctuaire du terrorisme islamique et perdre définitivement son identité et sa souveraineté ? Autant dire que des périls majeurs sont à venir.
UNE AUTORITÉ MILITAIRE A RESTAURER EN URGENCE
Sans une armée forte et digne de ce nom, le pouvoir centrafricain ne pourra qu’assister, impuissant, au délitement de la nation bantoue. Le temps presse. Il faut aller au-delà du schéma qui a prévalu jusqu’ici en matière de coopération militaire. C’est-à-dire que la RCA pourrait envisager de négocier d’autres accords de défense avec d’autres pays – sans, toutefois, oublier ceux qu’elle a signés avec la France. Mais, puis-qu’apparemment, celle-ci cherche à se désengager du marigot centrafricain, rien n’empêche la RCA, État souverain, d’organiser la défense de ses citoyens et de son territoire par tous les moyens.
Seule et sans armée, elle ne pourra pas mettre fin aux agressions extérieures. Si l’ONU persiste dans le maintien de l’embargo sur les armes, si injuste et si scandaleux, la République Centrafricaine, au nom de sa survie, est en droit de le violer.
Car, alors que le pouvoir légitime est désarmé, les rebelles, eux, continuent à se fournir en équipement via le Tchad et le Soudan. Il faudra bien que les autorités centrafricaines se préparent à les affronter. Il faudra bien que le gouvernement sorte de cette illusion d’un dialogue possible avec les ex-Sélékas. Sûrs de leur force que rien ne semble ébranler, les rebelles ne viendront jamais négocier. Ce qu’ils cherchent, c’est, incontestablement, la capitulation du pouvoir légitime.
Il ne reste donc que la force pour les désarmer.
Le temps qui s’écoule est à leur avantage. Le redoublement des massacres et des pillages est là pour confirmer l’insupportable calcul des rebelles. Si on veut que la catastrophe ne se produise pas, il faut que les gouvernants se rendent compte que seules, une armée nationale et des forces de sécurité aguerries, soutenues par une coalition sans faille de tous les Centrafricains, pourront débarrasser le territoire national des rebelles et leurs commanditaires.
DES MOUVEMENTS INQUIÉTANTS DE POPULATIONS
On observe, venus des provinces contrôlées par les bandes armées, des déplacements massifs de populations vers la capitale. Fuyant les atrocités et les massacres récurrents des rebelles, les habitants de ces provinces prennent le chemin de l’exil pour se réfugier à Bangui.
Que va-t-il se passer ? Une saturation de la capitale est à craindre. Des mouvements sociaux risquent de se produire. Une surpopulation de Bangui va advenir avec son lot d’infections liées au manque de structures d’hygiène suffisantes. De jour en jour, la situation en Centrafrique va devenir incontrôlable pour le pouvoir. Le président Faustin-Archange Touadera a- t-il les moyens de sa gouvernance ? Que réserve l’avenir à ce pays damné et en perdition ? Ne faut-il pas que la population se prépare à organiser son auto-défense pour sauver sa patrie ?
JOSEPH AKOUISSONNE
(12 décembre
©2017CNC.