CENTRAFRIQUE : L’AVENIR ET LA SURVIE DU PAYS DÉPENDENT DE LA COMBATIVITÉ DE SA JEUNESSE
Bangui, le 30 octobre 2017.
Par : Joseph Akouissonne, CNC.
LE SURSAUT DES JEUNES, PORTEURS DU FLAMBEAU DE L’ESPOIR
Il est réconfortant d’entendre la jeunesse centrafricaine donner fortement de la voix. Ne vient-elle pas de signifier à l’opinion nationale et internationale qu’elle ne baissera pas les bras devant l’incompétence incurable et l’apathie des gouvernants, devant la gabegie et la mauvaise gestion qui tiennent lieu de gouvernance, devant l’abandon du peuple à la barbarie des groupes armés ? Cette jeunesse, dont le silence ressemblait à une muselière, vient de briser l’insupportable bâillon.
En effet, dans un communiqué daté du 21 octobre 2017, le Conseil National de la Jeunesse a mis en garde : « le CNJ et toutes les organisations de la jeunesse condamnent, avec la dernière fermeté, toutes les agressions et les massacres à l’endroit de la population civile et innocente. » Et son président, Francis Mongombé, de poursuivre : « engagé dans le processus de la paix et de la reconstruction nationale, le CNJ prendra toutes ses responsabilités en alertant l’opinion nationale et internationale pour le salut de la nation et la survie de la jeunesse. »
Cet avertissement rejoint le ras-le-bol des Centrafricains, de plus en plus tentés par l’auto-défense. Le salut de leur pays ne pourra surgir que par la pugnacité et la résistance de tous, à commencer par celles des jeunes. Depuis trois ans environ, moult réunions pour rechercher la paix et la réconciliation nationale se sont tenues sans que la situation désespérée du pays ne change d’un iota.
Il y a eu le voyage du Souverain Pontife, qui souleva tant d’espoirs étant donné la piété du peuple centrafricain. Il vient d’y avoir le déplacement du Secrétaire Général de l’ONU, dont on attendait beaucoup, mais qui risque de se perdre dans les méandres du bourbier centrafricain. Il y a eu, enfin, depuis trois ans, les multiples interventions militaires étrangères et surtout françaises, qui n’ont pas réussi à couper les ardeurs séparatistes de rebelles.
Ceux-ci occupent, désormais, 80% du territoire. Le gouvernement légal dispose, pour sa part, des 20% restants dans le périmètre de Bangui. Une partition de fait semble avoir été décrétée par les séditieux dans certaines provinces. Le gouvernement, désarmé, ne peut que s’en remettre entièrement au bon vouloir des puissances étrangères, qui brouillent les cartes et sont incapables de protéger les populations et de ramener la paix. Face à cette situation désespérée, on ne voit pas comment un pouvoir sans armes et sous protectorat pourrait pacifier le pays et assurer la réconciliation de tous.
C’est pourquoi l’engagement de la jeunesse est extrêmement important. C’est sur elle que repose l’avenir du pays.
« TOUS ENSEMBLE » POUR BRISER LE CYCLE DES MASSACRES
On a tout essayé pour briser le cycle infernal du carnage. Les médias ont organisé des débats avec des spécialistes auto-proclamés de la République Centrafricaine pour tenter de démêler et de comprendre le pourquoi du chaos. Rien n’y a fait. D’analyses hasardeuses en à-peu-près, les soi-disant connaisseurs de la RCA n’ont pas cessé d’embrouiller les pistes et de complexifier une situation, déjà terriblement compliquée.
Il faut cesser de regarder les Centrafricains et leur pays avec des lunettes néocolonialistes.
Il s’agit, en fait, d’une mosaïque d’ethnies et de confessions, qui a su, au fil du temps, faire son unité à travers une langue commune : le Sango. Pourchassés par les razzias esclavagistes arabes descendues du Soudan pour le compte des marchands d’esclaves occidentaux, les Centrafricains ont trouvé refuge dans l’épaisseur de l’impénétrable forêt équatoriale. Ils ont dû affronter un milieu particulièrement hostile et résister aux multiples invasions colonialistes. Rarement une colonie aura été traitée de la sorte : partage sommaire des territoires, en parcelles cédées à des sociétés concessionnaires racistes et brutales, ayant le droit de vie et de mort sur les indigènes, soumis aux travaux forcés et déresponsabilisés.
Fondateur de la République centrafricaine, Barthélémy Boganda aura su contribuer à l’unification de ce pays, si morcelé et martyrisé par la colonisation. Il envisagea de créer « Les Etats Unis de l’Afrique Latine » Ce qui aurait fait de la sous-région une puissance économique indéniable, gage d’un développement et d’une stabilité.
L’ESPOIR AUJOURD’HUI ?
Aujourd’hui, « tous ensemble », comme aimait à le répéter Boganda, les jeunes citoyens vont résister aux bandes armées et, n’en doutons pas, les vaincront. Ils sauront empêcher la dislocation de leur pays. La Centrafrique est peut-être entrée dans « une guerre de cent ans », mais, in fine, elle en sortira victorieuse.
Ne l’oublions pas : c’est la jeunesse centrafricaine, cette courageuse jeunesse, qui, jadis, a détrôné Bokassa le tyran par une insurrection dans les rues de Bangui. Si le pouvoir actuel ne fait rien, les jeunes centrafricains prendront la relève et demanderont des comptes.
Les efforts du président Touadera pour susciter un dialogue avec les bandes armées sont justifiés. Cependant, il est tout aussi légitime de penser que les rebelles ne prendront pas cette main tendue. Comment dialoguer avec une multitude de factions rebelles qui s’affrontent entre elles et ne sont d’accord sur rien ? Les appels constants à un cessez-le-feu et à un désarmement n’ont jamais trouvé d’écho chez les séditieux, déterminés à s’emparer du pouvoir par la force.
Le pays est à l’image du fleuve Oubangui, tumultueux et indomptable. C’est lui qui prendra son destin en main. Son peuple – sa jeunesse surtout – courageux et même téméraire, saura garantir l’intégrité de son territoire. La paix et la réconciliation nationale surgiront par sa volonté et son unité.
« Vive la République Centrafricaine, Démocratique, Une et Indivisible ! »
JOSEPH AKOUISSONNE
(2 9 octobre 2017)