La coalition “Publier ce que vous payez”, dirigée par Joseph Bindoumi, peut-elle vraiment lutter contre l’exploitation minière illégale de Wagner et du Rwanda en RCA ?

Par la rédaction de Corbeau News Centrafrique, CNC.
Il y a 15 ans, la RCA brillait par sa volonté de clarté sur ses ressources. Mais cette année, en 2025, face aux mercenaires russes du groupe Wagner et les rwandais qui pillent nos mines, la lutte de Joseph Bindoumi ressemble à un défi impossible à relever.
En effet, au pays de Boganda, pays de Zo Kwé Zo, un homme, Joseph Bindoumi , porte une mission qui pourrait pourtant changer la donne pour beaucoup de citoyens : faire la lumière sur ce que deviennent les richesses du pays. Coordonnateur national de la coalition “Publier ce que vous payez” (PCQVP) en RCA, il explique avec patience et clarté ce que représente cette organisation, encore méconnue de nombreux Centrafricains. Pourtant, depuis sa création le 28 mai 2010, elle réunit des dizaines d’associations bien décidées à traquer la corruption et à pousser pour que les ressources de l’État profitent enfin à ceux qui vivent sur cette terre.
La coalition, ce n’est pas une ONG classique, insiste Joseph Bindoumi. C’est un mouvement, une alliance d’organisations comme AKPE, ACAT RCA ou encore la Ligue Centrafricaine des Droits de l’Homme, qui se sont unies pour une idée simple mais puissante : obliger ceux qui exploitent l’or, le diamant ou les forêts à dire combien ils donnent à l’État, et demander ensuite au gouvernement ce qu’il en fait. ” On va voir les entreprises minières et forestières, on leur demande : qu’est-ce que vous versez ? Puis on va voir l’État et on vérifie : cet argent, vous l’avez eu ? Et après, qu’est-ce que vous en avez fait pour les gens ?”, raconte-t-il.
L’idée, c’est de suivre l’argent à la trace, de l’extraction jusqu’aux projets concrets, une école construite, une route améliorée, un centre de santé qui sort de terre. Parce que, trop souvent, les Centrafricains voient leurs ressources partir sans rien en retour. Joseph Bindoumi le déplore : aujourd’hui, personne ne peut dire combien l’or ou le diamant ont rapporté au budget en 2024. Et ça, c’est un problème.
Ce n’était pas juste un rêve en l’air. En 2011, la RCA a même été le premier pays d’Afrique centrale à être reconnu conforme aux normes de l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE). Une délégation, menée par Faustin-Archange Touadéra, alors Premier ministre, est allée à Paris chercher un prix récompensant cet effort. Mais tout a vite dérapé. Les coups d’État, notamment celui de 2013, ont stoppé net cette dynamique. L’ITIE a suspendu le pays, et la coalition a vu son influence s’effriter. “On a été suspendus encore l’année dernière, faute de quelques points”, soupire Bindoumi. Depuis 15 ans, ils poussent pour que les contrats miniers soient publics, pour que les citoyens sachent ce que les entreprises s’engagent à payer, et pour que l’argent revienne aux communautés là où les richesses sont puisées. Mais la réalité d’aujourd’hui, 15 ans plus tard, est bien loin de ces ambitions.
Un idéal d’antan étouffé par le chaos
À ses débuts, sous Bozizé, la coalition pouvait encore jouer son rôle. Les choses étaient ouvertes, on pouvait parler, critiquer, poser des questions sans trop de risques. L’idée était de suivre l’argent à la trace : des entreprises minières et forestières jusqu’aux caisses de l’État, puis jusqu’aux projets concrets pour les gens. Mais les années ont passé, et les espoirs se sont heurtés à une série de crises. Les suspensions répétées par l’ITIE, les troubles politiques, tout ça a fragilisé le système. Et puis, sous le régime actuel de Touadéra, devenu président, un tournant radical s’est opéré. Avec l’arrivée des Russes, notamment le groupe Wagner, et du Rwanda, tout s’est verrouillé. L’opacité a remplacé la transparence, et les Centrafricains en paient le prix.
Wagner et les autres : un pillage sans contrôle de nos richesses
Aujourd’hui, Wagner est partout. Prenez la mine de Ndassima, à 60 kilomètres de Bambari, dans la préfecture de la Ouaka : là, ils extraient de l’or à une échelle massive. On parle de plus de 200 milliards de francs CFA par an, rien que pour ce site, selon des estimations. À Ydéré, ils s’attaquent aussi à l’or et au mercure, chargeant des citernes entiers chaque semaine pour l’exportation. À Boda, via leur façade Lobaye Invest, ils exploitent or et diamants. Et dans la préfecture de la Lobaye, ils abattent également des bois de haute qualité pour l’envoyer à l’étranger. Mais où va l’argent ? Pas dans les poches de l’État, encore moins dans celles des Centrafricains.
Le Rwanda n’est pas en reste. Dans la Lobaye, ils extraient or et diamants, mais ça se fait dans le silence. Les Chinois, eux, sont aussi présents, mais ils respectent un minimum les règles : ils versent quelque chose à l’État, passent par des circuits officiels et mafieux. Mais pas Wagner ni le Rwanda. Avec les Russes, c’est un autre niveau : un pillage gigantesque. En 2024, le gouvernement est allé au Moscou signer un accord avec Poutine pour 25 ans d’exploitation minière. Vingt-cinq ans de mainmise sur les ressources, sans que personne n’y voie clair. Et la coalition de Joseph Bindoumi dans tout ça ? Elle est impuissante. Approcher Wagner, c’est risquer une balle dans la tête. “Tu poses une question, ils tirent, et c’est fini”, murmure-t-on. Même Joseph Bindoumi sait qu’il ne peut rien faire face à ça.
Un régime des traitres de la nation
Le pire, c’est que tout ça se passe sous le nez du pouvoir. Avant, la Constitution obligeait les contrats miniers à passer par l’Assemblée nationale. Aujourd’hui, c’est terminé. Tout se règle à la présidence, dans l’ombre. Qui touche quoi ? Où va l’argent ? Impossible à savoir. Touadéra, qui paradait à Paris pour un prix de transparence il y a 14 ans, laisse faire. Les richesses qui devraient construire des écoles ou des routes s’évaporent, et pire encore : elles alimentent la guerre. Oui, Wagner ne veut pas la paix. Ils multiplient les tensions, créent du désordre pour justifier leur présence. Plus le chaos dure, plus ils exploitent. Leurs minerais deviennent des minerais de sang, et le pays s’enfonce.
Un rêve qui tourne au cauchemar
La coalition de Joseph Bindoumi rêvait d’un pays où chaque Centrafricain verrait les fruits de son sol. Mais aujourd’hui, l’or, le diamant et le bois quittent la RCA sans laisser de traces. Les communautés locales, celles qui vivent près des mines et des forêts, restent dans la misère. Ce qui était un modèle de transparence il y a 15 ans est devenu un terrain de jeu pour mercenaires et puissances étrangères. Wagner et le Rwanda pillent sans limite, le gouvernement ferme les yeux, et le silence étouffe tout. Le combat de Joseph Bindoumi et de la PCQVP, aussi noble soit-il, se heurte à un mur. Tant que ce verrouillage perdure, les richesses de la RCA ne seront qu’un mirage pour ceux qui y vivent….
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