Centrafrique : une dizaine d’organisations de la société civile centrafricaine accusent l’ANE de violer le code électoral et d’organiser des élections illégales.
Rédigé le 28 octobre 2025 .
Par : la rédaction de Corbeaunews-Centrafrique (CNC).
La Mission d’observation électorale du Réseau Arc-en-Ciel et quinze autres organisations accusent l’ANE de violer le code électoral et d’organiser des élections illégales.
Seize organisations de la société civile centrafricaine viennent de porter un coup sévère à la crédibilité du processus électoral en cours. Dans un communiqué rendu public le 22 septembre 2025, la Mission d’observation électorale du Réseau Arc-en-Ciel (MOE-RAC) et ses partenaires dénoncent de graves manquements de l’Autorité Nationale des Élections (ANE) qui compromettent la légalité des scrutins de décembre.
Ces organisations, parmi lesquelles figurent l’Action des Chrétiens pour l’Abolition de la Torture (ACAT-RCA), l’Association des Femmes Juristes de Centrafrique (AFJC), la Commission Episcopale Justice et Paix (CEJP), et la Ligue Centrafricaine des Droits de l’Homme (LCDH), portent des accusations particulièrement graves contre l’institution électorale.
La première violation concerne la non-publication des listes électorales définitives. Selon le chronogramme officiel rendu public le 12 août 2025, l’ANE devait publier ces listes le 23 août. Or, les observateurs constatent que l’institution s’est contentée d’arrêter des listes comptant 2 398 158 électeurs sans procéder à leur publication légale.
Cette omission viole directement l’alinéa 3 de l’article 11 du code électoral qui dispose clairement : “La liste électorale de la commune est affichée au chef-lieu de cette unité administrative, à un ou plusieurs endroits désignés par l’autorité administrative locale, en rapport avec l’ANE”. Cette obligation légale n’a donc pas été respectée.
Les conséquences de cette violation sont importantes. Plusieurs électeurs régulièrement inscrits risquent d’être privés de leur droit de se porter candidats. En effet, l’article 37 du Code Electoral exige la présentation d’un extrait de la liste électorale définitive comme élément constitutif du dossier de candidature, à défaut d’une copie de la carte d’électeur.
La deuxième violation porte sur l’application anticipée de dispositions légales non promulguées. Les organisations dénoncent le fait que l’ANE applique déjà les “dispositions dérogatoires visant à faciliter l’organisation matérielle des élections groupées” adoptées par l’Assemblée Nationale le 3 septembre 2025, alors que ces dispositions n’ont pas encore été promulguées.
Cette situation place l’ANE dans une position juridiquement intenable. L’institution applique des textes qui n’ont pas encore force de loi, violant ainsi le principe de légalité qui devrait gouverner toute procédure électorale. Cette pratique constitue un précédent dangereux qui vide de son sens le processus législatif normal.
Le communiqué souligne également l’insuffisance d’information des parties prenantes sur la mise en place des délégations électorales. Cette opacité compromet la transparence du processus et empêche un contrôle effectif des opérations électorales par les observateurs et les candidats.
Les organisations pointent aussi la faible sensibilisation des électeurs sur le déroulement des élections groupées, particulièrement concernant les procédures de vote pour les élections municipales. Cette lacune risque d’affecter gravement la participation électorale et la compréhension du processus par les citoyens.
Face à ces constats, la MOE-RAC formule plusieurs recommandations urgentes. Elle invite d’abord l’ANE à procéder “sans délai à une publication transparente, complète et accessible des listes électorales arrêtées”. Cette demande vise à réparer une violation du code électoral.
Les organisations appellent également les institutions compétentes à “promulguer et publier les dispositions dérogatoires adoptées par l’Assemblée Nationale pour l’organisation des élections groupées afin de garantir la conformité des opérations électorales au cadre légal”. Cette recommandation vise à résoudre le problème de l’application anticipée de textes non promulgués.
Le communiqué souligne que “sans une mobilisation et une compréhension claire du processus par les électeurs, la participation restera faible et pourrait ainsi compromettre la légitimité et la crédibilité de ces élections”. Cette observation pose la question de la validité démocratique d’élections mal comprises par les citoyens.
Ces critiques de la société civile rejoignent les préoccupations déjà exprimées par d’autres acteurs, notamment le constat d’huissier qui avait démontré la non-publication des listes électorales dans les mairies de Bangui. Cette convergence des critiques renforce la crédibilité des accusations portées contre l’ANE.
La gravité de ces violations pousse certains observateurs à questionner la légalité même du processus électoral. Si l’ANE continue d’appliquer des textes non promulgués et refuse de publier légalement les listes électorales, le processus entier risque d’être entaché d’illégalité.
Cette situation place les futurs candidats dans une position délicate. Comment peuvent-ils participer à un processus électoral qui ne respecte pas ses propres règles ? Cette question devient d’autant plus pertinente que les violations dénoncées affectent directement leurs droits de candidature.
Les seize organisations signataires, par leur diversité et leur représentativité, donnent un poids particulier à ces critiques. Leurs secteurs d’intervention couvrent les droits humains, la justice, la démocratie, les questions de genre et les personnes handicapées, offrant une vision large des enjeux électoraux.
Ce communiqué constitue un signal d’alarme majeur pour le processus électoral centrafricain. Il démontre que les défaillances de l’ANE ne passent pas inaperçues et qu’une partie significative de la société civile refuse de cautionner des élections organisées en violation des textes légaux.
Pour un commissaire de l’ANE contacté par la rédaction du CNC, : ” l’ANE n’a pas les moyens tant financiers que logistiques pour d’imprimer les listes électorales, les déployer sur l’ensemble du territoire pour affichage. Les partenaires financiers font fi de nos appels”.
L’appel final à la mobilisation de tous les acteurs pour “promouvoir un processus électoral inclusif, transparent et crédible, conforme aux principes démocratiques” résonne comme un ultimatum adressé aux autorités électorales. Sans correction rapide de ces violations, la légitimité des élections de décembre risque d’être compromise dès avant leur tenue.
En claire, si déjà l’ANE s’entête et poursuit ce processus électoral sur la base des dispositions du code électoral révisées alors même que ces dispositions n’ont pas encore promulguées et publiées au journal officiel, c’est que cette ANE travaille en dehors des textes qu’elle est censée les appliquer.
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