Affaire Ndélé 2 : Les avocats de la défense demandent l’acquittement d’Oumar Serge Abdoulaye Assan et Abdramane Seleman

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Affaire Ndélé 2 : Les avocats de la défense demandent l’acquittement d’Oumar Serge Abdoulaye Assan et Abdramane Seleman

 

CPS : Affaire Ndélé 2, Les avocats de la défense demandent l’acquittement d’Oumar Serge Abdoulaye Assan et Abdramane Seleman
L’avocat de la défense lors du procès dans l’affaire dite de Ndélé 1 devant la cour pénale spéciale.

 

Par la rédaction de Corbeau News Centrafrique, CNC.

 Le 6 mai 2025, la Cour pénale spéciale (CPS) de Bangui a examiné les plaidoiries des avocats d’Oumar Serge Abdoulaye Assan et Abdramane Seleman, accusés dans l’affaire Ndélé 2 pour des crimes présumés commis en mars 2020.

 

Détails de l’audience

 

L’audience s’est ouverte à 10h00 dans les locaux de la CPS, situés rue Martin Luther King à Bangui, sous la présidence du juge Aimé Pascal Delimo. Ce dernier était assisté des juges Émile Ndjapou et Herizo Rado Andriamanantena, ainsi que des greffiers Marie Madeleine Touakouzou et Florentin Darré. L’affaire Ndélé 2 porte sur des violences survenues entre le 6 et le 27 mars 2020 à Ndélé et dans les villages voisins de Lemouna, Gospéida et Aliou, dans le nord de la République centrafricaine. Ces événements, imputés à des factions du Front populaire pour la renaissance de la Centrafrique (FPRC), ont entraîné des meurtres, pillages, viols, tortures, mutilations et atteintes graves à l’intégrité physique et mentale de civils, principalement des ethnies Goula et Rounga. Le parquet spécial qualifie ces actes de crimes de guerre et crimes contre l’humanité.

 

Les accusés, Oumar Serge Abdoulaye Assan, Abdramane Seleman (alias Ada), Azor Kalite, Chafardine Moussa, Antar Hamat et Oscar Wordjono-Drogba, sont poursuivis pour leur implication présumée dans ces violences. L’audience du 6 mai s’est concentrée sur les plaidoiries des avocats de la défense, Maître Edgar Simplice Ngama pour Assan et Maître Biennois Angrika Sarrassengue pour Seleman, qui ont tous deux requis l’acquittement de leurs clients.

 

Intervention de Maître Edgar Simplice Ngama pour Oumar Serge Abdoulaye Assan

 

Maître Ngama a débuté sa plaidoirie en présentant un document reçu le 5 mai 2025 : une copie du jugement supplétif d’acte de naissance nº081, daté du 15 juin 2004, attestant qu’Oumar Serge Abdoulaye Assan était né à cette date. Ce document établit que l’accusé avait 16 ans le 6 mars 2020, date des faits reprochés, ce qui le rend mineur selon la législation centrafricaine. L’avocat a signalé une incohérence dans les dossiers administratifs : les registres de la maison d’arrêt, les procès-verbaux des enquêteurs, les documents du cabinet d’instruction et les déclarations de l’accusé mentionnaient des dates de naissance divergentes, certaines indiquant 2002 ou 2003. Cette confusion, selon Maître Ngama, constitue une irrégularité procédurale majeure.

 

Pour appuyer sa défense, l’avocat s’est référé au Règlement de procédure et de preuve (RPP) de la CPS, adopté en 2018, qui autorise la soumission de nouvelles pièces par la défense avant la clôture des débats. Il a précisé que l’article 67 du RPP permet la recevabilité de tout moyen de preuve, y compris les témoignages oraux ou documents écrits, pourvu qu’ils soient pertinents. Maître Ngama a également invoqué l’article 106 du Code de protection de l’enfant, promulgué par la loi nº13.006 du 28 novembre 2013 en République centrafricaine. Ce texte stipule que les mineurs en conflit avec la loi, qu’ils soient accusés, victimes ou témoins, relèvent exclusivement de la compétence des tribunaux pour enfants. Il ajoute que les enfants associés à des groupes armés, comme les enfants soldats, sont avant tout considérés comme des victimes et ne peuvent être poursuivis pénalement pour leur seule appartenance à ces groupes.

 

Maître Ngama a argué que la CPS, en tant que juridiction spécialisée dans les crimes internationaux, n’a pas autorité pour juger un mineur comme Assan. Il a insisté sur le fait que, même si l’accusé avait participé aux faits reprochés, sa minorité et son statut potentiel d’enfant soldat l’exonèrent de responsabilité pénale. L’avocat a transmis une copie du jugement supplétif d’acte de naissance à la Cour et a requis l’acquittement immédiat de son client.

 

Intervention de Maître Biennois Angrika Sarrassengue pour Abdramane Seleman

 

Maître Sarrassengue, avocat d’Abdramane Seleman, a plaidé pour l’acquittement en contestant la participation de son client aux attaques du 6 mars 2020. Il a déclaré que le parquet spécial, dirigé par le procureur Alain Tolmo, n’a pas fourni de preuves directes ou circonstancielles établissant la culpabilité de Seleman. Dans son mémoire, l’avocat a développé plusieurs arguments :

Inaptitude à comparaître : Un rapport d’expertise psychiatrique, daté de février 2025 et rédigé par un psychiatre judiciaire mandaté par la CPS, conclut que Seleman présente des troubles psychiques le rendant inapte à participer activement à son procès. Maître Sarrassengue a soutenu que juger un accusé dans cet état viole les principes d’un procès équitable, tels que garantis par l’article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, ratifié par la République centrafricaine en 1981.

Irrégularités procédurales : L’avocat a dénoncé l’impossibilité pour la défense de convoquer des témoins à décharge, en raison de contraintes logistiques et sécuritaires imposées par la CPS. Il a également critiqué l’absence de contextualisation des faits dans le dossier d’accusation, notamment sur le rôle des factions du FPRC dans les violences.

Faiblesses des preuves : Maître Sarrassengue a contesté la recevabilité de plusieurs pièces à conviction, telles que des témoignages anonymes recueillis par les enquêteurs en 2021, qu’il juge non vérifiables. Il a pointé l’absence de preuves matérielles, comme des enregistrements ou des rapports balistiques, liant Seleman aux crimes.

Imprécision des charges : L’ordonnance de clôture, émise par le cabinet d’instruction en octobre 2024, manque de clarté sur les faits spécifiques reprochés à Seleman. L’avocat a rappelé que, selon l’article 56 du RPP, la CPS ne peut modifier la qualification des faits sans renvoyer l’affaire au juge d’instruction.

– Lacunes de la partie civile : La demande de réparations déposée par les représentants des victimes, regroupant 47 plaignants, repose sur des déclarations générales sans lien direct avec Seleman, selon l’avocat.

 

Maître Sarrassengue a conclu sa plaidoirie en invoquant le principe fondamental du droit pénal selon lequel le doute profite à l’accusé, codifié à l’article 66 du RPP. Il a requis l’acquittement de Seleman, arguant que l’accusation n’a pas atteint le seuil de preuve requis pour une condamnation.

 

Position du parquet spécial

 

Le parquet spécial, représenté par le procureur Alain Tolmo, a maintenu ses accusations contre les deux accusés. Pour Abdramane Seleman, il a requis une peine de 20 ans d’emprisonnement, s’appuyant sur des témoignages de victimes et des rapports d’enquête de 2021 qui décrivent les exactions commises par des membres du FPRC à Ndélé. Pour Oumar Serge Abdoulaye Assan, le parquet a contesté la validité du nouvel acte de naissance, arguant que des documents antérieurs, notamment un extrait de naissance daté de 2002, indiquent que l’accusé était majeur en 2020. Le procureur a requis une peine de 30 ans contre Assan, soulignant la gravité des actes reprochés, incluant des meurtres et des viols.

 

Déroulement et organisation de l’audience

 

L’audience, qui a duré cinq heures, a été marquée par des échanges techniques entre les avocats et la Cour. Les débats ont porté sur la recevabilité des nouvelles pièces, la compétence juridictionnelle et la fiabilité des preuves. À 15h10, le juge Delimo a suspendu la séance, renvoyant la suite des plaidoiries au 7 mai 2025 à 9h00. Cette prochaine audience permettra à Maître Sarrassengue de finaliser sa plaidoirie pour Abdramane Seleman et à Maître Guy Antoine Dangavo de présenter la défense des autres accusés, jugés par contumace.

 

Cadre institutionnel de la CPS

 

La Cour pénale spéciale, créée par la loi organique nº15.003 du 3 juin 2015, est une juridiction hybride composée de 25 juges, dont 13 nationaux et 12 internationaux. Elle est mandatée pour enquêter et juger les crimes internationaux commis en République centrafricaine depuis le 1er janvier 2003, conformément à son règlement de procédure adopté en 2018. La CPS, financée par des partenaires internationaux comme les Nations unies et l’Union européenne, opère dans un contexte sécuritaire et logistique complexe, ce qui a retardé ses travaux jusqu’à la reprise des audiences….

 

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